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15 octobre 2023 7 15 /10 /octobre /2023 12:58

28 TOA

28° dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Is 25,6-9 ; P 22 (23) ; Ph 4,12-14.19-20 ; Mt 22,1-14

Dans la première lecture, Isaïe compare le jour du Seigneur à un festin préparé pour tous les peuples, un festin où Dieu essuie les larmes de tous les visages, un temps où l’on dit « Voici notre Dieu, en lui nous espérions et il nous a sauvés ». Et dans l’évangile, Jésus reprend cette image pour parler du royaume des Cieux. Mais il ajoute quelques précisions qui méritent notre attention.

D’abord il ne s’agit pas d’un quelconque festin, c’est le banquet préparé par le roi pour les noces de son fils. On sait que dans l’Apocalypse seront évoquées les « noces de l’Agneau » pour parler de la fin des temps et du rassemblement de l’humanité autour du Seigneur, et la parabole nous fait comprendre que le royaume des Cieux a quelque chose avoir avec le Fils de Dieu. Ainsi le roi ne convie pas ses invités à un anniversaire, ni à son couronnement, ni même à ses propres noces, mais à celles de son fils. Le banquet dont il est question n’est pas un repas protocolaire, c’est un repas de famille, c’est le partage d’une joie, c’est l’invitation à une intimité, l’expression d’une amitié et d’une proximité. Or voilà que les invités ne veulent pas venir. Ce n’est pas qu’ils ne peuvent pas, mais ils ne veulent pas. Alors le roi insiste : « tout est prêt », c’est le moment … comme s’il ne pouvait pas imaginer que ses invités refusent de partager sa joie. Alors apparaissent clairement les raisons de ce refus : l’indifférence pour certain qui préfèrent s’occuper de leurs affaires ; l’hostilité pour d’autres qui maltraitent les messagers et les tuent. Premier enseignement, premier avertissement : le désir de Dieu se heurte à la volonté de l’homme : la présence de Dieu ne s’impose pas. Dieu ne peut rien, si l’homme ne veut pas.

Alors le roi va élargir son invitation et chercher à rassembler des convives pour partager sa joie. Pour cela il envoie des serviteurs à la croisée des chemins. Sans doute est-ce l’endroit le plus efficace puisque les serviteurs pourront inviter ceux qui sont sur des chemins différents. Mais ils ne sont pas envoyés pour frapper aux portes des maisons, ni sur les chemins qui ne se croisent pas, comme celui qui va jusqu’au champ, ou celui qui va jusqu’au commerce ! La croisée des chemins est l’image d’une incertitude et d’un choix : du lieu où se pose la question quelle route prendre maintenant ? Ne sont pas invités ceux qui sont tranquillement installés dans le confort de leurs habitudes, mais ceux qui sont disponibles à l’imprévu, ceux qui ne sont pas conduits par leur certitude ou leur routine. Peu importe qu’ils soient bons ou méchants, peu importe qu’ils soient connus ou inconnus, habitants du pays ou étrangers de passage, ce qui importe c’est qu’ils soient à la croisée des chemins, disponibles à l’imprévu. Deuxième enseignement, deuxième avertissement : l’appel de Dieu nous surprend et nous déroute. Dieu nous propose ce que nous n’avions pas prévu, ce que nous ne pensions pas possible. Il n’y a pas d’espérance sans disponibilité.

Et puis il y a cette scène étrange et dérangeante, de l’homme qui ne porte pas le vêtement de noces. Spontanément on peut penser qu’il y a quelque inconséquence de la part du roi à inviter à l’improviste et de reprocher ensuite qu’on ne soit pas prêt. Mais il faut remarquer que l’homme est le seul à ne pas avoir ce vêtement de noces : tous les autres ont pu en trouver un. Et la question du roi n’est pas agressive : il demande la raison de cette situation, mais l’autre refuse de répondre. Il ne présente pas d’excuse, il ne donne pas de raison. On comprend alors qu’il n’est pas là pour participer aux noces, mais pour autre chose qu’on ne saura jamais ! Il est entré dans la salle mais pas dans l’esprit de la fête. Ce n’est pas qu’il n’a pas eu le temps de se préparer : il ne veut pas participer, seulement profiter. Mais c’est un repas de noces, pas une banque alimentaire … la parole qui invite appelle une réponse et non pas une posture. Les pères disent que le vêtement de noces est le symbole de la charité. Il ne sert à rien de se rapprocher du Seigneur si l’on n’accepte pas que cela nous change et nous transforme. Troisième enseignement, troisième avertissement : le don de Dieu n’est pas impersonnel, il se partage et nous engage. Dieu n’agit pas dans l’automatisme mais dans la relation. Le salut n’est pas à sens unique, c’est une alliance

« Voici notre Dieu, en lui nous espérions et il nous a sauvés » disaient les participants au festin préparé sur la montagne. La parabole des invités à la noce nous avertit que Dieu ne s’impose pas et que ne le trouvent que ceux qui veulent bien le rejoindre ; que l’espérance n’est pas un projet mais la disponibilité à se laisser surprendre et dérouter par la parole ; que le salut est un appel qui nous sollicite et nous engage à entrer nous aussi dans la joie des noces de l’Agneau.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Porte du Ciel, qu’elle nous apprenne à désirer ce que le Père nous propose. Refuge des pécheurs, qu’elle fasse retentir en nos cœurs l’appel du Seigneur. Arche de la Nouvelle Alliance, qu’elle nous entraine dans le partage du Don de Dieu, pour que nous puissions participer au Royaume des Cieux, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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8 octobre 2023 7 08 /10 /octobre /2023 18:37

27TOA

27° Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Is 5,1-7 ; Ps 79 (80) ; Ph 4,6-9 ; Mt 21,33-43

La parabole que nous venons d’entendre dans l’évangile paraît assez simple à comprendre. Comme le rappelaient la première lecture et le psaume, dans la Bible, la vigne est l’image de l’alliance et du peuple de Dieu. Aussi, l’histoire de ce maître qui confie une vigne à des vignerons et qui n’arrive pas à récupérer le produit de la vendange est l’image de l’histoire du salut. Dieu a planté une vigne, et l’a confiée aux hommes. Puis, au moment venu il a envoyé ses serviteurs, les prophètes, pour que lui soit rendu l’honneur qui lui est du. Entre parenthèse, ça veut dire que les vignerons ne l’avaient pas fait parvenir spontanément. Seulement les prophètes ont été frappés, tués, lapidés. Alors Dieu a envoyé son fils, Jésus qui a été mis à mort lui aussi. Que se passera-t-il ? Il confiera sa vigne, sa loi, son message, son amour, sa vie à d’autres qui sauront le respecter. Voilà pourquoi Jésus conclut en disant aux chefs des prêtres et aux anciens : « le Royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à une nation qui lui fera produire son fruit ».

Mais l’intérêt de cette parabole n’est pas de nous fournir une image pour résumer l’histoire religieuse du monde. Elle nous rappelle que travailler à la vigne du Seigneur implique un devoir vis-à-vis de Dieu, et elle nous avertit aussi de certains pièges qui peuvent nous guetter si nous ne sommes pas vigilants. En fait les vignerons dont parle Jésus ont fait trois erreurs, qui sont de plus en plus graves.

La première erreur qu’ils ont faite a été de ne pas, spontanément, faire parvenir au maître de la vigne le produit des vendanges. On pourrait dire que c’est l’image de l’ingratitude spirituelle. C’est l’erreur de ceux qui ne remercient jamais. Dans notre vie ordinaire, nous considérons que remercier est la forme élémentaire de la politesse … alors, est-ce que nous y veillons dans la vie spirituelle ? La prière de remerciement s’appelle l’action de grâce, c’est-à-dire l’acte par lequel nous rendons grâce. Rendre grâce, c’est reconnaître que Dieu nous a fait grâce. Est-ce que nous savons remercier le Seigneur pour ce qu’il nous donne, pour ce qu’il nous confie ?

La deuxième erreur est plus grave que la première. On peut admettre que, pris par le travail, les soucis et les préoccupations, les vignerons aient oublié de rendre grâce … mais lorsque les serviteurs se présentent ils refusent de leur remettre ce qu’ils doivent au maître de la vigne. C’est l’image de l’orgueil spirituel. C’est l’erreur de ceux qui se croient propriétaires de ce qui leur a été confié. « C’est à moi ! » « C’est grâce à moi » « Je le mérite » pensent-ils. Et cela doit nous interroger sur la manière dont nous considérons nos qualités. A quoi servent-elles ? A qui servent-elles ? A nous ou à Dieu ? Ce que nous faisons – et que nous faisons bien – pour qui le faisons-nous ? pour nous ou pour Dieu ? Nous sommes gentils, accueillants, intelligents, beaux, astucieux, aisés, attentifs, généreux – tout ce que vous voulez – mais à qui cela profite-t-il ? Est-ce que nous mettons ces qualités au service de Dieu, ou bien servent-elles seulement pour notre propre profit ?

Mais peut-être certains trouveront que j’exagère, et que vu les efforts que nous faisons pour faire les choses, vu la fatigue du travail, il est normal que nous en profitions. Sans doute mais à quel prix ? Car il y a la troisième erreur des vignerons : ils ont voulu l’héritage et pour cela ils ont tué l’héritier. Au lieu de recevoir leur salaire, ils ont cherché à s’emparer du domaine. Au lieu de faire confiance à la justice du maître, ils l’ont considéré comme un concurrent. Leur troisième erreur est l’image de la mort spirituelle. C’est la plus terrible parce qu’elle a un caractère définitif. Dans la tradition, on appelle cela la damnation, cette forme de péché contre l’esprit dont parle Jésus. Nous ne pouvons pas vivre sans Dieu, car il est la vie. Nous ne serons héritiers de Dieu que si nous le sommes dans le Christ, pas si nous le nions, pas si nous l’ignorons, pas si nous le refusons. Les deux premières erreurs peuvent être réparées, il peut y avoir un pardon … mais cette dernière erreur est irrémédiable parce que Dieu ne peut rien pour celui qui le refuse.

Évidemment ces considérations ne sont pas drôles, ni à entendre, ni à dire. Mais si Jésus raconte cette histoire, c’est pour avertir, c’est en espérant que ceux qui l’écoutaient réaliseraient la gravité des enjeux. Car il n’y a, dans l’enchaînement des erreurs des vignerons aucune fatalité. L’ingratitude spirituelle ne conduit pas nécessairement à l’orgueil spirituel, et l’orgueil spirituel ne conduit pas nécessairement à la mort spirituelle … heureusement ! Mais nous devons prendre au sérieux l’avertissement du Seigneur pour ne pas nous laisser entrainer dans l’escalade du péché. Le meilleur moyen d’éviter la mort spirituelle c’est d’être attentif à l’humilité qui nous préserve de l’orgueil spirituel. Le meilleur moyen d’éviter l’orgueil spirituel, c’est de reconnaître les bienfaits de Dieu en évitant l’ingratitude spirituelle. Voilà pourquoi saint Paul recommandait aux Philippiens : « en toute circonstances, priez et suppliez, tout en rendant grâce ».

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous protège de l’aveuglement du cœur et nous empêche de nous enfoncer dans le refus de Dieu. Elle est la Tour d’ivoire, le Secours des Chrétiens et la Mère de Miséricorde, qu’elle nous accompagne quand nous travaillons à la vigne du Seigneur, qu’elle nous fasse découvrir le don de Dieu et nous rappelle de rendre grâce. Et qu’ainsi la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu’on peut imaginer, garde notre cœur et notre intelligence dans le Christ Jésus notre Seigneur, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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1 octobre 2023 7 01 /10 /octobre /2023 10:31

26TOA

26ème dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Ez 18, 25-28 ; Ps 24 (25) ; Ph 2,1-11 ; Mt 21,28-32

Il me semble que la parabole que nous venons d’entendre est assez facile à comprendre : il vaut mieux faire sans dire que dire sans faire ! Le texte d’Ézéchiel en première lecture ajoutait un autre aspect : ce qui compte c’est la fin ; il ne suffit pas de bien commencer, il faut aussi bien finir ! Sans doute, si ces enseignements sont faciles à comprendre, ils sont plus délicats à mettre en pratique. Mais ça, personne ne peut le faire à notre place. Est-ce que pour autant l’homélie va déjà s’arrêter ? Au risque de décevoir certains, ce serait un peu dommage. Non pas pour le prestige (tout relatif) du prédicateur, mais parce que nous pouvons profiter que la première lecture et l’évangile ne nécessitent pas de longs commentaires pour nous arrêter sur la deuxième lecture.

Car c'est un très beau texte qui nous a été proposé. Un de ces textes qu'on devrait presque savoir par cœur. Saint Paul commence par montrer la voie de la plénitude. Il ne s'agit pas simplement de participer aux prières et aux activités de l'Église, même si c'est très important et très honorable. Pour que la joie soit parfaite il faut aussi rechercher l'unité. Autant il est relativement aisé de prendre de bonnes habitudes, de se mettre à l'écoute et à l'école de la parole de Dieu ; autant, garder l'unité avec ceux qui nous entourent demande un effort constamment renouvelé. Pour prendre une image, il est plus facile de circuler tout seul qu’au milieu d’une foule, plus on est entouré plus il faut être vigilant ! Quels sont donc les points d’attention pour être et rester unis ?

Tout d’abord renoncer aux intrigues et à la vantardise. Celui qui cherche à se montrer, à passer en premier ou à conduire systématiquement les autres à ce qu’il veut, ne contribue pas à l’unité. On ne pourra jamais maintenir l’unité si l’on attend que les autres se règlent sur nous, il faut au contraire s’efforcer de faire attention aux autres. Saint Paul a une expression très forte sur le sujet : « avoir assez d’humilité pour estimer les autres supérieurs à nous-mêmes ». Et il nous donne l’exemple du Christ. Lui qui était de condition divine, lui qui aurait pu revendiquer d’être traité à l’égal de Dieu, il s’est dépouillé, il a pris la condition des hommes, et dans celle-ci la place du plus petit, du plus méprisé, puisqu’il a accepté de mourir, et de mourir sur une croix.

Cet exemple du Christ nous montre qu’il ne s’agit pas d’être inférieur ou de se mépriser : l’unité se joue dans le regard que nous portons sur les autres. On ne peut pas être unis à quelqu’un qu’on regarde de haut, ce qui va nous garder dans l’unité, c’est de savoir contempler le don de Dieu chez l’autre, de voir en lui l’image et la ressemblance du Père. Bien sûr, il y a aura des moments où cette image sera difficile à reconnaître, brouillée par les conflits et les défauts. Mais quand une image est floue, ce n’est pas toujours à cause du brouillard, c’est aussi parfois à cause des lunettes de celui qui regarde !

Alors, aujourd’hui, laissons-nous interpeller par les mots de l’apôtre. Après tout, œuvrer pour l’unité n’est-ce pas travailler à la vigne du Seigneur ? Mais recherchons-nous l’unité ? Est-ce que nous voulons travailler à l’unité ? Elle est la plénitude de la joie et la perfection de notre vocation. Si nous n’avons pas cette passion pour l’unité, il est temps de se repentir comme le premier fils, et de s’engager dans cette voie. Comment ? Nous avons vu que la clé de l’unité c’est le regard que nous portons sur les autres. Si nous réalisons que nous prenons un peu tout le monde de haut, si nous avons l’impression de valoir mieux que ceux qui nous entourent, ce n’est pas la peine d’en rechercher les raisons : il n’y a que des mauvaises raisons ! Il vaut mieux prendre le temps de contempler la mission du Christ et de suivre son exemple : ne pas revendiquer un rang, même justifié, mais accepter de prendre la condition de serviteur pour entrer dans la dynamique de Pâques, où nous avons été baptisés, et qui nous conduira à la plénitude de notre humanité !

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais nous aide à entendre cette parole est à la mettre en pratique. Elle qui s’est reconnue l’humble servante du Seigneur, qu’elle nous apprenne à lutter contre toute forme d’orgueil et d’arrogance. Elle qui est le Refuge des pécheurs, qu’elle nous montre ce que nous devons faire pour nous convertir et nous éloigner des attitudes qui nous égarent. Elle qui est la Mère de l’Église, qu’elle nous accompagne dans notre chemin vers l’unité pour que nous puissions avancer vers le Royaume, vers le rassemblement de tous en Dieu, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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24 septembre 2023 7 24 /09 /septembre /2023 13:10

25TOA

25° Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Is 55,6-9 ; Ps 144 (145) ; Ph 1,20c-24.27a ; Mt 20,1-16a

La conclusion de la deuxième lecture est assez poignante et elle nous interpelle : « Quant à vous, ayez un comportement digne de l’Évangile du Christ ». Voilà une parole que nous ne devons pas entendre distraitement mais qui doit nous aiguillonner et nous guider. Encore pour cela faut-il écouter et méditer cet évangile. Puisque nous avons entendu la parabole des ouvriers de la dernière heure, voyons ce qu’elle nous propose comme comportement digne de l’Évangile du Christ.

Tout d’abord, il y a cette invitation d’aller travailler à la vigne du Seigneur. Le premier comportement qui nous est demandé est un engagement. Il ne s’agit pas d’une posture ni même d’une rencontre fût-elle affectueuse, il s’agit de se mettre au service, de participer à l’œuvre du Père, de collaborer à la préparation du Royaume. Les ouvriers de la parabole nous montrent trois manières d’accueillir cette invitation : dans l’alliance, à l’image de ceux qui ont convenus avec le maître le salaire de la journée ; dans la confiance en la promesse, à l’image de ceux à qui le maître a promis « ce qui est juste » ; dans la foi en la personne elle-même, comme les ouvriers de la dernière heure qui s’engagent sur les seules paroles « allez à ma vigne, vous aussi ». Ainsi, il y a plusieurs manières d’entendre l’appel du Seigneur, plusieurs manières de s’engager, mais tous ont relevé les manches et sont allés travailler à la vigne.

Ensuite le texte suggère un comportement à éviter. Celui des ouvriers de la première heure qui récriminent. Qu’est-ce qui motive leur revendication ? Ce n’est pas ce qu’ils ont reçu, puisque c’est ce qui était convenu. Ce n’est même pas le fait de recevoir la même chose que les autres, c’est le fait que les autres reçoivent la même chose qu’eux : « tu les traites à l’égal de nous ». Ce comportement à éviter, ce comportement indigne de l’évangile, c’est de regarder les autres en se considérant supérieur, c’est d’estimer que l’on vaut mieux que les autres. C’est d’ailleurs l’un des dangers de l’engagement : croire que cela nous élève au-dessus de nos frères. Sans doute l’engagement et le service nous rendent meilleurs, mais meilleur que ce que l’on était et non pas meilleur que les autres !

D’où l’importance du troisième comportement digne de l’Évangile que suggère la parabole : imiter le maitre de la vigne qui considère ses ouvriers pour ce qu’ils sont avant de les mesurer à ce qu’ils font. En donnant à chacun la même chose, le maitre manifeste l’égalité fondamentale de tous, indépendamment de leur utilité. Le Christ nous invite ainsi à considérer l’image de Dieu en ceux que nous rencontrons, à rebours d’une vision utilitariste qui ne s’intéresserait qu’à ce que l’autre peut nous apporter. Ce n’est pas un encouragement à ne rien faire : le maitre n’est pas allé distribuer des deniers dans la rue. Mais c’est un rappel de la dignité de tout homme, généreusement aimé par le Seigneur. Nous sommes ainsi invités à partager le regard de Dieu sur chacun. Ce qui vaut d’ailleurs tant dans nos relations que sur nous-mêmes, lorsque la vie ou les circonstances nous empêchent de faire ce que nous voudrions : c’est nous que le Seigneur aime, et non pas ce que nous faisons.

« Ayez un comportement digne de l’Évangile » nous demandait saint Paul, la parabole des ouvriers de la dernière nous désigne au moins trois comportements dignes de ce que nous avons reçu : l’engagement au service de l’œuvre de Dieu, l’humilité qui évite de se croire supérieur aux autres, et le respect de la dignité humaine en toute circonstance.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Humble servante du Seigneur, qu’elle nous rende disponibles à l’appel de Dieu ; Consolatrice de ceux qui souffrent, qu’elle nous encourage à rester en tenue de service ; Refuge des pécheurs qu’elle affermisse notre confiance dans le cœur de Dieu pour que nous puissions reconnaître sa présence et en resplendir dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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17 septembre 2023 7 17 /09 /septembre /2023 13:05

24TOA

24ème dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Si 27,30 - 28,7 ; Ps 102 (103) ; Rm 14,7-9 ; Mt 18,21-35

Il y a quelque chose de révoltant dans l’attitude du débiteur impitoyable : on vient de lui remettre soixante millions, et il s’acharne sur cent. Évidemment, le but de Jésus en racontant la parabole étant de nous faire réagir, il force le trait pour susciter l’indignation. Cela dit, les témoins de la scène ne sont pas indignés mais attristés … et cela doit aussi nous aider à comprendre correctement l’enseignement qui nous est proposé aujourd’hui.

Avant même les considérations mathématiques, ce qui choque, c’est l’attitude même de l’homme. Le maître a fait preuve de clémence et de générosité envers lui, l’évangile dit même que le maître a été saisi de compassion, et voilà qu’à peine sorti, il se jette sur son compagnon pour l’étrangler. Comment une telle agressivité peut-elle survenir ? Sans doute connaît-il un bouillonnement émotionnel après sa comparution devant le roi. Mais au lieu d’être soulagé et reconnaissant, le voilà stressé et agressif. Comme s’il n’avait pas compris ce qui venait de lui être accordé et qu’il se pensait toujours redevable d’une dette gigantesque. La miséricorde du maître n’a pas adouci son cœur, parce qu’elle n’est pas été reconnue comme miséricorde. Soit qu’il ne croie pas à la remise de la dette, soit qu’il se sente humilié par la scène qui a révélé sa situation pitoyable … au sens le plus littéral du terme, de ce qui provoque la pitié.

Et nous voilà devant le deuxième problème de cette histoire : la symétrie ignorée. Alors que son compagnon prononce les mêmes paroles que celles qu’il a prononcées devant le roi, il ne veut pas avoir la même attitude que le maître. Il regrette d’avoir fait pitié, alors il ne veut pas avoir pitié. La première lecture mettait bien en valeur les enjeux de cette symétrie entre ce que nous accordons aux autres et ce que nous attendons de Dieu. Comment pourrait-on revendiquer pour nous ce que nous refusons aux autres ? La Parole suggère deux manières de vivre cette symétrie : si nous ne donnons pas aux autres ce que nous recevons de Dieu, au moins accordons aux autres ce que nous espérons de Dieu. Si Dieu n’est pas le modèle qui guide nos relations, réalisons que nos relations seront le modèle de l’attitude de Dieu pour nous. La mesure dont nous nous servons, servira pour nous.

La conclusion que Jésus donne à la parabole, en réponse à la question de Pierre, précise bien où se situe le pardon. Il ne s’agit pas d’un décompte, il ne s’agit pas non plus d’une patience, mais d’une disposition de cœur. Non pas le cœur romantique qu’on dessine pour exprimer une émotion, mais le cœur biblique, ce qui nous constitue profondément et manifeste ce que nous sommes. C’est là que nous devons laisser résonner la parole de saint Paul dans la lettre aux Romains : « aucun d’entre nous ne vit pour soi-même, et aucun ne meurt pour soi-même, si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur ». Le pardon n’est pas une indulgence philosophique ni un héroïsme sublime ; il n’est pas non plus le marchandage divin pour nous mériter la clémence éternelle. Le pardon est le mouvement d’un cœur de chair, qui refuse de se laisser durcir par la souffrance et les inquiétudes, mais qui accepte d’être brisé et broyé pour continuer à aimer même quand c’est difficile. Il y a dans le pardon quelque chose de divin, ce qui ne signifie pas qu’il nous soit inaccessible, mais que nous pouvons le partager, en reconnaissant que nous y participons.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Refuge des pécheurs, qu’elle nous apprenne à reconnaître la générosité de Dieu dans le pardon. Mère de miséricorde, qu’elle nous montre comment donner ce que nous avons reçu et recevoir ce que nous pouvons donner. Miroir de la Sainteté de Dieu, qu’elle fasse battre notre cœur au rythme du cœur de Dieu pour que nous puissions demeurer en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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3 septembre 2023 7 03 /09 /septembre /2023 13:45

22TOA

22° Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Jr 20,7-9 ; Ps 62 (63) ; Rm 12,1-2 ; Mt 16, 21-27

« Ne prenez pas pour modèle le monde présent ». L’exhortation de saint Paul aux Romains résonne du reproche de Jésus à saint Pierre : « tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ». Et c’est une parole qu’il est bon d’entendre et de méditer.

Peut-être y a-t-il des époques plus que d’autres où la différence entre les pensées de Dieu et les pensées des hommes est plus évidente voire plus douloureuse. Pourtant cela a toujours été vrai, et c’est un défi constant du chrétien que d’accepter de ne pas faire ou penser comme tout le monde mais de chercher d’abord à discerner la volonté de Dieu. Ce qui doit nous guider dans notre vie, c’est d’abord ce qui est capable de plaire au Seigneur, et cela implique souvent d’aller à contre-courant des habitudes ou des opinions communes. La première conséquence, c’est cette sourde incompréhension du monde qui vaut parfois des moqueries ou des injures, à l’image de ce dont témoignait Jérémie dans la première lecture. Certes c’est désagréable et contrariant d’être humilié ou méprisé, mais le Christ en croix nous rappelle que la fidélité à Dieu est préférable à la considération des foules. Attention toutefois à ne pas inverser les choses : ce n’est pas parce qu’on est humilié qu’on est fidèle à l’évangile, c’est parce qu’on est fidèle à l’évangile que l’on risque d’être humilié. La victime n’a pas toujours raison ce qui compte ce n’est ni d’être honnis ni d’être populaire, c’est d’être fidèle à la Parole de Dieu.

La deuxième conséquence, c’est que dans l’église la réforme n’est pas tant faite pour s’adapter au monde que pour revenir à l’évangile. Pourquoi revenir ? Parce qu’avec le temps il arrive que l’on confonde la foi chrétienne avec les habitudes d’une époque, et ce qui était légitime dans une situation devient incongru dans une autre. Lorsque l’on confond fidélité et immobilisme, on ne suit plus la volonté de Dieu mais le modèle du monde passé ! Celui qui ne veut pas quitter les vêtements de son enfance ne fait pas preuve de fidélité mais de ridicule. Voilà pourquoi, régulièrement, il faut vérifier la fidélité à la Parole de Dieu : ni les idées ou les habitudes d’aujourd’hui ni les idées ou les habitudes d’autrefois ne sont de bons guides pour discerner ce qui est la volonté de Dieu. On ne progresse pas en regardant le monde pour s’y adapter, mais en fixant la Parole de Dieu pour s’y conformer.

C’est que les pensées des hommes ne sont pas seulement celles des autres mais aussi les nôtres ! Pierre en fait l’amère expérience lorsqu’il prétend dicter à Jésus les modalités de sa mission. Et c’est le plus grand défi spirituel que d’accueillir la parole de Dieu lorsqu’elle nous déconcerte ou qu’elle nous contrarie. Même Jérémie connait cette situation : ta parole, dit-il, « était enfermée dans mes os, je m’épuisais à la maitriser sans y réussir ». On ne doit pas chercher dans la parole de Dieu la confirmation de nos opinions mais la lumière qui dévoile ce qui nous appelle, même si cela nous dérange. C’est une belle expérience que de méditer un texte biblique qui nous ravit et nous console, mais le moment où nous réalisons que c’est la parole de Dieu et non pas la parole des hommes, c’est quand un enseignement nous gratte et nous agace. Dans l’Apocalypse, l’ange donne au narrateur un livre qui est doux comme le miel dans la bouche mais amer aux entrailles. C’est une bonne image de la Parole de Dieu qui est à la fois consolante et stimulante. Et si la Parole est à la fois consolante et stimulante, ce n’est pas seulement parce que nous ne sommes pas Dieu, mais parce qu’elle nous entraîne dans le cœur de Dieu qui est l’amour qui donne et se donne et nous invite à perdre pour trouver.

En ce début d’année pastorale, laissons résonner en nous les textes que nous venons d’entendre. Ils nous invitent à nous attacher à la Parole de Dieu plutôt qu’aux pensées des hommes, sans craindre les incompréhensions, sans suivre le modèle du monde de quelque époque que ce soit, sans prendre la volonté de Dieu à notre service, mais en nous laissant prendre par elle pour la servir.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Consolatrice des affligés, qu’elle nous fortifie dans la fidélité à l’appel du Seigneur pour que nous ne nous laissions pas décourager par les difficultés du monde présent. Secours des chrétiens, qu’elle nous guide dans le discernement de la volonté de Dieu pour que nous recherchions ce qui est capable de lui plaire. Refuge des pécheurs, qu’elle nous rende disponibles aux pensées de Dieu, pour que nous puissions renoncer à nous-même et le suivre jusqu’à la croix pour l’accueillir dans la gloire, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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27 août 2023 7 27 /08 /août /2023 12:52

21TOA

21° dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Is 22, 19-23 ; Ps 137 (138) ; Rm 11,33-36 ; Mt 16,13-20

La scène que nous rapporte l’évangile d’aujourd’hui est bien connue. Elle a suscité d’innombrables commentaires entre les différentes sensibilités chrétiennes pour savoir si elle fondait le rôle et la mission du Pape comme successeur de Pierre. Mais elle est surtout importante parce qu’elle illustre de manière remarquable la dynamique de la foi.

Tout d’abord il y a le dialogue entre Jésus et ses disciples. Le Seigneur pose deux questions : « au dire des gens, qui est le Fils de l’Homme ? » puis « et vous, que dites-vous ? pour vous qui suis-je ? ». La première question est un sondage, la deuxième une interpellation. A la première question les disciples ne font que rapporter l’opinion de la foule, la deuxième question les engage. C’est ainsi que nous pouvons comprendre la différence entre la foi et l’opinion que l’on confond trop souvent. La foi n’est pas une option comme une autre dans l’éventail des réponses possibles, elle n’est pas l’opinion de la majorité interrogée, elle implique personnellement celui qui répond et surtout elle qualifie. Toutes les opinions sont possibles, certaines sont respectables, mais seule la réponse de Pierre à la question de Jésus est la foi chrétienne. Est-ce que ça signifie qu’il comprend parfaitement ce qu’il dit ? Sans doute non, la suite des événements montrera qu’il ne réalise pas très bien ce que c’est qu’être le Christ, le Fils du Dieu vivant, et Jésus remarque « ce n’est pas la chair et le sang » qui ont conduit sa réponse, c’est-à-dire que ça n’est pas l’observation ou la réflexion qui ont guidé sa réponse. Dans une relation, les mots peuvent rester les mêmes, mais le sens peut évoluer et s’approfondir. Ainsi dans la foi on comprend petit à petit les mots que nous prononçons. Il n’en reste pas moins que la foi chrétienne est une position précise vis-à-vis de la personne de Jésus.

Ensuite, après que Pierre ait répondu, Jésus le complimente et le bénit : « Heureux es-tu », et il souligne « c’est mon Père qui est aux cieux qui t’a révélé cela ». Ainsi la foi nait-elle d’une révélation, d’une inspiration divine. On dit qu’il s’agit d’un don de Dieu. Mais comprenons bien. Ce n’est pas parce que Dieu donne que l’homme reçoit, ou plutôt, ce n’est pas parce que l’homme n’a pas reçu, que Dieu n’a pas proposé ! Il arrive qu’on ne demande pas ; il arrive aussi qu’on ne veuille pas recevoir parce qu’on attend autre chose, ou qu’on veuille conquérir par soi-même. La foi engage, mais elle suppose aussi qu’on ait laissé Dieu conduire. Dans la foi, il y a forcément un moment où l’on se laisse faire par le Seigneur, où l’on accepte que ce soit lui qui mène la danse – si vous me permettez l’expression. La deuxième lecture était d’ailleurs un beau témoignage de l’attitude qui permet la foi. « Qui a donné en premier à Dieu et mériterait de recevoir en retour ? ».

Enfin, Jésus confie une mission à Pierre. Une mission qui ressemble beaucoup à celle de gouverneur qu’Isaïe promettait à Eliakim dans la première lecture. A la différence qu’il ne s’agit plus de la clef de la maison de David, mais des clés du Royaume des Cieux. Il y a toujours un pouvoir, une responsabilité, mais il s’agit d’une responsabilité qui résonne jusque dans les cieux. Parce que le chrétien a reconnu qu’en Jésus le Ciel est venu sur la terre, il vit en sachant que ce qu’il fait sur la terre retentit dans le ciel. Il n’y a pas d’un côté ce que l’on fait sur la terre et de l’autre ce qui se passera dans le ciel : ce que l’on vit sur la terre nous prépare à la vie éternelle. C’est particulièrement vrai par les sacrements, mais c’est vrai aussi plus largement. Souvenons-nous des paroles du Jugement : « ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait ». Ainsi la foi n’est pas seulement un sentiment, mais une manière de vivre en reconnaissant que le Seigneur a donné à nos actions un poids d’éternité.

A Césarée-de-Philippe, Pierre le premier professe la foi chrétienne, et il nous permet de mieux comprendre ce qu’est la dynamique de la foi : un engagement personnel plutôt qu’une opinion, un don de Dieu qui nous invite à le suivre, l’aventure d’une vie à la mesure du cœur de Dieu.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle nous apprenne à reconnaître le Christ. Miroir de la Sainteté de Dieu qu’elle nous rende disponible au don de Dieu. Porte du Ciel qu’elle nous guide pour que nous vivions à la mesure de ce qui nous est promis et que nous demeurions en Dieu comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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20 août 2023 7 20 /08 /août /2023 08:58

20TOA

20° Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Is 56, 1.6-7 ; Ps 66(67) ; Rm 11,13-15.29-32 ; Mt 15,21-28

Si la rencontre entre Jésus et la Cananéenne est sans doute le plus spectaculaire des textes que nous venons d’entendre, il serait dommage d’ignorer l’oracle d’Isaïe comme l’enseignement de la lettre aux Romains. Les trois lectures, en effet, évoquent un même thème, manifestant ainsi son importance d’autant plus grande qu’on le retrouve à des époques différentes de l’histoire du salut. Il s’agit de savoir qui peut bénéficier de la grâce de Dieu, ou en d’autres termes ce qui définit un fidèle du Seigneur. Dans une époque où les crispations identitaires ne manquent pas, la question peut aider à clarifier ce qu’est la vraie identité chrétienne.

Une première tentation serait d’appuyer l’identité sur l’origine. Comme si l’histoire était l’élément déterminant de la vie religieuse. C’est une question qui se posait déjà au temps d’Isaïe, et plus précisément au retour de l’Exil. Certains voulaient réserver le salut aux seuls juifs et ne voulaient admettre au Temple de Jérusalem que les membres de certaines familles. Or précisément le prophète s’inscrit en faux. « Les étrangers qui se sont attachés au Seigneur, je les comblerai de ma joie ». « Ma maison s’appellera Maison de prière pour tous les peuples ». Ceux qui ont accès au Sanctuaire ce sont ceux qui « observent le sabbat sans le profaner et tiennent ferme à mon alliance ». La vie spirituelle n’est pas un héritage mais une pratique. Sans doute est-ce que cela aide de vivre dans une famille qui aime le Seigneur, mais cela ne dispense personne de s’investir soi-même et d’aimer à la première personne. Ce qui compte pour Dieu ce n’est pas le passé, mais le présent. L’identité n’est pas liée à une origine mais à un comportement.

La rencontre avec Jésus et la Cananéenne souligne un autre aspect. Jésus commence par refuser, y compris de lui parler, sous prétexte qu’elle n’appartient pas au bon groupe. Lorsqu’il dit de « ne pas prendre le pain des enfants et de jeter aux petits chiens », il évoque une appartenance. Que la femme ne nie pas, puisqu’elle va se comparer elle-même à un petit chien. Mais sa réponse et la réaction de Jésus montre que la grâce ne dépend pas de l’appartenance mais de la foi. C’est que le risque serait de croire que faire partie d’un groupe privilégié nous assure de la bienveillance divine. Si l’on appuie l’essentiel de notre identité sur l’appartenance, il y a un véritable risque d’arrogance et de présomption. Sous prétexte qu’on serait baptisé, ou qu’on serait membre de l’église, on serait assuré du salut. Au contraire, la femme de l’évangile en acceptant humblement d’être comparée à un petit chien, garde son cœur ouvert à la confiance en Dieu. Une confiance qui sait persévérer sans se décourager. Être chrétien n’est pas une étiquette mais une foi. L’adhésion à un groupe compte moins que l’accueil de la parole et la disponibilité à la grâce.

Enfin saint Paul reprend encore la question dans sa lettre aux Romains. Il explique à ces chrétiens d’origine païenne de ne pas regarder de haut les juifs, mais d’espérer la miséricorde de Dieu, comme eux-mêmes en ont bénéficié. La remarque est importante, parce qu’on pourrait facilement retomber dans une autre arrogance, celle de croire qu’on a mérité le salut grâce à ce qu’on a fait. Sans doute la pratique est-elle importante, sans doute la foi est essentielle, mais ce qui est déterminant ce ne sont pas nos habitudes ou nos sentiments, c’est la miséricorde du Seigneur. L’identité chrétienne ne se construit pas, elle se reçoit sans mérite de notre part. « Dieu a enfermé tous les hommes dans le refus de croire pour faire à tous miséricorde ». Chaque fois que nous serons tentés de nous enorgueillir de ce que nous sommes ou de ce que nous faisons, souvenons-nous de cette affirmation pour nous rappeler que sans la miséricorde de Dieu nous ne serions rien et nous n’aurions rien pu faire ; et que plutôt de nous glorifier nous ferions mieux de rendre gloire à Dieu.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Trône de la Sagesse, qu’elle nous encourage à garder fidèlement la Parole du Seigneur. Secours des chrétiens, qu’elle creuse en nous la disponibilité au don de Dieu. Refuge des pécheurs, qu’elle nous apprenne à reconnaitre la miséricorde qui nous a sauvés pour que nous puissions aimer au rythme du cœur de Dieu et demeurer en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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13 août 2023 7 13 /08 /août /2023 13:53

19TOA

19° dimanche du Temps Ordinaire - Année A

1 R 19, 9a.11-13a ; Ps 84 (85) ; Rm 9,1-5 ; Mt 14,22-33

Le dimanche, la première lecture est choisie pour faire écho à l’évangile. Ainsi l’histoire d’Elie sur l’Horeb attire notre attention sur la dimension de rencontre avec le Seigneur dans l’aventure de Pierre sur la mer déchaînée. Ni Elie, ni Pierre ne sont des débutants en la matière. On peut même dire qu’ils ont déjà l’expérience de la vie spirituelle. Pourtant ils vivent une étape nouvelle, qui purifie leur cœur et les faits progresser dans la connaissance du Seigneur.

On peut distinguer trois moments dans l’évangile : l’apparition de Jésus marchant sur une mer agitée par le vent ; la marche de Pierre sur les eaux à l’appel du Seigneur ; et enfin le dénouement. Cela évoque les trois grandes étapes du salut et illustre des stades de la relation entre Dieu et nous.

D’abord il y a la création. Alors qu’ils ont peiné toute la nuit contre un vent contraire et une mer qu’on devine agitée, les disciples voient Jésus venir vers eux en marchant sur les eaux. C’est l’image de Dieu maître des éléments, du créateur dominant la création. C’est le premier lieu de la rencontre entre l’homme et Dieu : lorsque l’on se trouve dépassé par le monde qui nous entoure. Cela peut être l’émerveillement devant la beauté d’un paysage ou la finesse de la nature, l’étonnement devant l’infiniment grand ou l’infiniment petit, ce sentiment qui nous fait pressentir que nous ne sommes ni le centre ni le maitre de l’univers. Pourtant il y a quelque chose de bouleversant dans cette rencontre : prenant conscience de sa petitesse et de sa fragilité l’homme craint le Créateur et se cache comme Adam et Eve dans le jardin des origines, ou il s’affole comme les disciples dans la barque, imaginant que ce qui les dépasse leur est hostile.

Aussi faut-il un deuxième moment, celui de la révélation : « Confiance, n’ayez pas peur ». Une phrase qui pourrait résumer toute la parole de Dieu au long des siècles. C’est le deuxième lieu de la rencontre, celui de l’alliance, figurée par le dialogue entre Pierre et Jésus. Il y a une sorte de contrat : « si c’est bien toi, ordonne-moi de venir », chacun a sa part : Dieu appelle et l’homme répond. C’est l’étape de la Loi, d’une prière où l’on s’efforce d’échanger avec le Seigneur. Je fais ceci, tu fais cela. Mais le problème c’est la persévérance ! Après un moment d’enthousiasme, vient la fatigue ou la distraction. Comme Pierre qui regarde la force du vent au lieu de fixer le Seigneur, comme Elie découragé fuyant le courroux de la reine après avoir massacré ses amis les faux prophètes !

C’est pourquoi vient le troisième moment, celui du Salut. Jésus étend la main et saisit Pierre qui s’enfonçait, comme sur l’icône de la Résurrection il étend la main pour saisir Adam enseveli dans les eaux de la mort. La prière n’est plus un contrat mais un appel : « Seigneur, sauve-moi ! ». Le Salut n’est ni l’ouragan qui fend les montagnes, ni la récompense de nos bonnes actions, mais le murmure de la brise légère qui répond au soupir de l’humanité. Il ne s’impose pas, il ne se mérite pas, il s’accueille dans la confiance.

Alors, nous, où en sommes-nous ? Avons-nous réalisé que nous ne sommes pas le centre du monde, mais que la création nous révélait le créateur ? Encore faut-il éviter de se tenir à distance, impressionné par ce qui nous dépasse ! Avons-nous entendu la Parole de Dieu qui nous invite à entrer dans l’alliance ? Encore faut-il éviter de se laisser distraire par les difficultés de la vie qui nous font oublier la présence du Seigneur ! Acceptons-nous d’aller jusqu’au Salut, de l’implorer en se laissant saisir par le Christ pour que nous puissions prier dans le cœur à cœur où compte d’abord la présence de celui qu’on aime et qui aime, pour que la nature ne soit plus un spectacle mais le lieu de la contemplation et de l’adoration ? D’une certaine manière, chacune de ces étapes est nécessaire. Demandons à l’Esprit Saint de nous éclairer pour que nous puissions discerner le pas que nous pouvons faire aujourd’hui, le lieu où nous pourrons aller pour grandir dans la présence de Dieu.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Etoile du Matin, qu’elle nous apprenne à reconnaître la présence du Seigneur. Trône de la Sagesse, qu’elle fasse résonner en nos cœurs la Parole de Dieu. Reine de la Paix, qu’elle nous accompagne jusqu’au murmure de la brise légère qui nous entraine à la suite du Christ, pour que nous puissions demeurer en lui, comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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30 juillet 2023 7 30 /07 /juillet /2023 10:34

17TOA

17° Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

1 R 3, 5.7-12 ; Ps 118 (119) ; Rm 8, 28-30 ; Mt 13, 44-52

L’évangile d’aujourd’hui continue de rapporter les paraboles du Royaume, ces comparaisons par lesquelles Jésus nous prépare aux réalités spirituelles. Des quatre paraboles que nous venons d’entendre, il y en a une qui paraît assez différente des trois autres : celle du filet. Elle parle de tri plus que de trésor, les acteurs principaux sont les anges et non pas les hommes, et elle concerne la fin du monde plutôt que l’attitude à avoir en cette vie. Mais nous ne sommes pas obligés de la considérer comme un intrus : elle peut aussi bien être un point de contraste qui fait ressortir ce que l’on risque d’ignorer. En particulier elle nous avertit de l’importance du tri, c’est-à-dire de l’alternative pour l’acquisition du trésor.

La première histoire était celle du trésor dans le champ. On comprend que l’homme qui le découvre n’est pas le propriétaire du champ, et que c’est pour cela qu’il cache le trésor après l’avoir découvert le temps d’acheter le champ. On a donc deux personnes : le propriétaire qui va vendre son champ sans savoir qu’il contient un trésor, et l’homme qui va acheter le champ en sachant que sa valeur réelle est plus grande que son prix. L’un sait ce qui lui manque, l’autre ignore ce qu’il a. C’est le premier tri, la première alternative : mieux vaut connaître ce qui nous manque qu’ignorer ce qu’on a. Cette alternative nous introduit dans la dynamique de la foi qui comporte aussi bien la connaissance du manque que la perception de ce qui est caché. Le royaume des Cieux se rejoint par la foi : en écoutant la Parole de Dieu qui nous indique ce qu’il faut désirer pour posséder le trésor que le Seigneur nous a rendu accessible.

La deuxième histoire était celle de la perle de grande valeur. L’acteur principal est un négociant, donc un marchand. Habituellement il achète pour vendre, mais ayant trouvé une perle de grande valeur, il vend pour acheter. On peut même penser qu’il gardera cette perle précieusement. Voilà donc un deuxième tri, une deuxième alternative : avoir pour perdre ou perdre pour avoir. L’alternative ne porte plus tant sur la situation de la personne que sur l’attitude. Ici, nous percevons la dynamique de l’espérance qui nous invite à ne pas se satisfaire d’un petit bonheur éphémère, mais à rechercher le grand bonheur, fut-ce au prix de quelque sacrifice. Le royaume des Cieux se rapproche par l’espérance : confiant dans les promesses divines, l’espérance donne à chaque chose son poids d’éternité.

La dernière histoire était celle du maitre de maison qui tire de son trésor du neuf et de l’ancien. La morale parait un peu moins évidente, d’autant que s’il est fait allusion à une alternative, il semblerait qu’il n’y ait pas à choisir entre le neuf et l’ancien, mais à prendre les deux ! C’est qu’en l’occurrence la tendance spontanée serait plutôt dans l’exclusivité : soit le trésor d’un musée où l’on conserve l’ancien ; soit le trésor d’une foire où l’on propose les dernières nouveautés. Jésus semble indiquer que le critère de valeur n’est ni dans l’ancienneté, ni dans la nouveauté. Ce qui donne la valeur c’est ce qui est reçu. Cela rejoint la dynamique de la charité qui se déploie dans le neuf et l’ancien car elle implique fécondité et fidélité. Le royaume des Cieux n’est ni un musée ni une foire, il se prépare par la charité qui déploie ce qu’elle reçoit, et protège ce qu’elle découvre.

Ainsi y a-t-il un lien entre trésor et tri. Si les anges trieront le trésor des hommes comme un pécheur trie ce que rapporte le filet, le royaume des Cieux est aussi comme un trésor qui ne se possède pas sans un certain tri dans nos habitudes et dans nos ambitions. La foi nous fait préférer savoir ce qui nous manque plutôt que d’ignorer ce que l’on a ; l’espérance nous conduit à perdre pour gagner plutôt que gagner pour perdre ; la charité nous apprend à déployer ce que nous recevons en conjuguant fécondité et fidélité.

Que la Vierge Marie, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Fille de Sion, elle a su accueillir le trésor de la Parole de Dieu, qu’elle nous fortifie dans la foi. Demeure précieuse, elle a su trouver la perle du Don de Dieu, qu’elle nous soutienne dans l’espérance. Mère du Bel amour, elle a su épanouir la présence de Dieu, qu’elle nous entraine dans une charité toujours plus fervente, pour que nous puissions, nous aussi, devenir disciples du royaume des Cieux dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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