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11 février 2024 7 11 /02 /février /2024 14:11

6TOB

6° dimanche du Temps Ordinaire - Année B

Lv 13,1-2.45-46 ; Ps 31 (32) ; 1 Co 10,31-11,1 ; Mc 1,40-45

L’histoire que nous rapporte saint Marc dans l’évangile de ce jour est assez dérangeante. Bien sûr, dans une lecture un peu rapide, c’est une belle histoire, celle d’une guérison, un pauvre homme que Jésus sort de sa misère. Une souffrance qui s’arrête, c’est toujours une bonne nouvelle. Mais si on prend le temps de faire attention au texte, si l’on est attentif aux détails, si l’on prend au sérieux les paroles qui nous sont rapportées, alors il faut bien remarquer qu’il y a quand même quelques ombres au tableau.

C’est que le lépreux est loin d’être parfait. Ce n’est pas parce qu’il souffre qu’il n’a rien à se reprocher et qu’il serait un modèle de foi. A vrai dire, je dois confesser qu’il m’agace. Et si j’en crois l’évangile, il semble que Jésus rejoigne ce sentiment. Certes, la traduction liturgique a choisi de lire : « saisi de compassion », mais il y a d’autres manuscrits qui disent : « Irrité, Jésus étendit la main ». De la même manière, après la purification, la traduction édulcore un peu le texte original. Au lieu de « fermement, Jésus le renvoya », il faudrait lire « le rudoyant, il le chassa » ou encore « Jésus le gronda et le jeta dehors ». Même en gardant la version adoucie, nous pouvons comprendre qu’il y a un certain nombre de choses qui ne sont pas très recommandables dans l’attitude du lépreux. D’abord il s’approche de Jésus, alors qu’il aurait dû se tenir à l’écart. Sa maladie est contagieuse, veut-il la transmettre au Seigneur ? Ensuite sa prière est un peu manipulatoire : « si tu le veux, tu peux me guérir », c’est presque un chantage, comme s’il disait, est-ce que tu veux que je reste lépreux ? Enfin, Jésus lui demande de se taire et d’aller faire constater sa purification en offrant ce qui est prévu par la Parole de Dieu, et lui, au lieu de se taire, va en parler à tout le monde … se dispensant sans doute du sacrifice prescrit. Non, vraiment, l’homme n’est pas la victime innocente des malheurs du monde, et si l’on peut comprendre le désarroi de sa situation, est-ce que la souffrance autorise vraiment à faire n’importe quoi, n’importe comment ?

Pourtant, en se focalisant sur le lépreux, nous passons à côté de l’essentiel. Car l’évangile n’est pas là pour nous parler de lui, mais de Jésus ! Au lieu de regarder le lépreux, nous devons plutôt regarder le Seigneur. Donc l’homme est imprudent de s’approcher de Jésus, mais Jésus le touche. On le met en danger, mais il ne fuit pas, il ne se dérobe pas. Au contraire, il s’implique. Le Seigneur ne se laisse pas arrêter par nos imprudences, il s’engage avec nous. Il nous révèle ainsi que ce n’est pas l’impureté qui se communique, mais la sainteté. Il ne devient pas impur parce qu’il a touché un homme impur, mais l’homme devient pur, parce que lui, le Saint, le Pur par excellence, l’a touché.

De la même manière, on lui dit « si tu le veux, tu peux me purifier », mais Jésus répond « je le veux, sois purifié ». S’il est injuste de prétendre que la maladie est voulue par Dieu, le Seigneur ne se laisse pas arrêter par nos injustices. Jésus n’est pas susceptible, mais il pense d’abord au bien de l’autre. Ce qui lui importe, ce n’est pas la précision métaphysique d’une prière, mais la situation de celui qui prie. En disant « je le veux, sois purifiée », il révèle même la volonté de Dieu qui est que nous soyons tous purs. Enfin, parce que l’homme ne l’écoute pas, Jésus se retrouve embarrassé et ne peut plus entrer ouvertement dans une ville. Lui qui est sorti de bon matin de Capharnaüm pour pouvoir parcourir la Galilée et annoncer l’évangile, il est obligé de se retirer dans un endroit désert. Pourtant de partout on vient à lui. Il peut continuer sa mission, même si ce n’est pas de la manière qu’il avait prévue. Jésus s’abandonne à la providence, confiant dans la puissance de l’Évangile qui rayonne et attire au-delà des efforts que nous faisons.

Dans la lettre aux Corinthiens, saint Paul nous conseillait d’imiter le Christ. Alors prenons le temps de le contempler. Déjà pour réaliser combien son amour nous rejoint, comme il a rejoint le lépreux, sans éviter nos imprudences, sans s’offusquer de nos injustices, sans s’épargner nos paresses ou nos désobéissances. Contemplons-le et imitons-le en acceptant de nous engager, « nous adaptant à tout le monde » ; en demeurant fidèles au cœur de Dieu « sans rechercher notre intérêt personnel » ; en restant confiants dans la puissance de celui qui veut que « tous soient sauvés ».

Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Consolatrice des affligés qu’elle nous encourage à imiter la générosité du Seigneur dans nos engagements. Refuge des pécheurs qu’elle nous guide pour que notre témoignage reste attentif à imiter la bonté de Dieu. Etoile du matin qu’elle nous apprenne à imiter la disponibilité du Christ en laissant rayonner le cœur du Père, pour que nous puissions servir la gloire de Dieu et partager sa vie, dès maintenant et pour les siècles des siècles. 

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4 février 2024 7 04 /02 /février /2024 14:13

5TOB

5° Dimanche du Temps Ordinaire - Année B

Jb 7,1-4.6-7 ; Ps 146 ; 1 Co 9,16-19.22-23 ; Mc 1,29-39

Il y a comme une résonnance de l’évangile dans la deuxième lecture. Comme Jésus, saint Paul affirme l’importance et le caractère prioritaire de l’annonce de l’évangile. Sans doute n’est-ce pas étonnant de trouver un écho des paroles du Seigneur dans l’enseignement de saint Paul, c’est même le contraire qui serait surprenant. Mais il est assez rare au temps ordinaire que la deuxième lecture et l’évangile (qu’on lit parallèlement en continu) évoquent le même thème. Accueillons la coïncidence comme un appel de l’Esprit Saint à voir comment « annoncer l’évangile »

La première chose … et on le comprend facilement, c’est l’aspect d’enseignement. Il ne s’agit pas de se raconter soi-même, mais de transmettre une parole qui nous a été confiée. « J’annonce l’Évangile sans rechercher aucun avantage matériel, sans faire valoir mes droits de prédicateur » dit l’Apôtre. En disant cela, il nous fait comprendre que l’annonce de l’évangile relève de la vie chrétienne, et que ce n’est pas réserver à certains. Il faut oser dire – parfois à contre-courant de l’opinion majoritaire – la Parole de Dieu. Cela suppose évidemment de la connaître, pour être sûr de dire l’évangile et non pas simplement notre opinion ou nos idées.  Cet aspect est particulièrement important de nos jours. La foi, l’évangile, ne vont pas de soi dans notre monde. Alors que dans un passé encore assez récent, on pouvait supposer que tout le monde connaissait l’évangile, nous réalisons que ce n’est plus le cas, et ceux que nous côtoyons ont besoin que quelqu’un leur dise ce qu’est réellement la Parole de Dieu prononcée en Jésus, celle à laquelle nous avons répondu par la foi et en laquelle nous croyons. J’aime contempler l’image de Jésus face aux apôtres qui lui disent « Seigneur tu as beaucoup de succès, tout le monde te cherche », et qui leur répond que l’annonce de la Bonne Nouvelle est prioritaire, qu’elle doit être annoncée aussi à d’autres et qu’elle passe avant sa propre popularité. C’est un bel exemple de la liberté qu’exige l’annonce de la Parole ! Le premier effort que nous devons faire pour annoncer l’évangile, c’est l’effort de dire l’Évangile, parfois humblement, parfois dans l’adversité, mais ne jamais y renoncer.

Mais il ne suffit pas de parler de Dieu … il faut aussi parler à Dieu. Et c’est sans doute la raison pour laquelle Jésus se retire pour prier, dès le petit matin. Une autre manière d’annoncer l’évangile, c’est la prière et en particulier la liturgie. Célébrer le mystère de Dieu, ensemble. Dans la liturgie, on ne se contente pas de dire le mystère, on le vit, on y participe. Si nous voulons annoncer l’évangile, si même, comme dit saint Paul, nous voulons y avoir part, il faut aussi prendre le temps de prier. Prier en contemplant le mystère de ce Dieu qui nous aime et qui se donne à nous ; prier pour le monde, comme nous le faisons dans la prière universelle, par exemple, mais comme nous pouvons le faire dans le secret de notre chambre, au cœur de notre cœur. Notre baptême nous a rendu capables de prier, nous devons veiller à accomplir ce que nous sommes. La prière est une porte ouverte sur le ciel, elle rend le mystère de Dieu réellement présent sur la terre. Rien de grand dans l’Église – et sans doute aussi dans l’humanité – ne s’est fait sans prière. C’est le deuxième effort que nous devons faire, la deuxième manière d’annoncer l’Évangile : Prier.

Enfin, après l’enseignement, après la liturgie, la troisième manière d’annoncer l’évangile, c’est d’imiter le Seigneur qui guérit les malades et chasse les esprits mauvais. Sans doute nous n’imaginons pas pouvoir guérir des fièvres, juste en tendant la main. Mais Saint Paul nous montre comment cet aspect de l’annonce de l’évangile peut nous concerner : « je me suis fait le serviteur de tous […] je me suis fait tout à tous ». Ce troisième aspect de l’évangélisation s’appelle la diaconie. Il est des fièvres comme la solitude ou la tristesse qu’une main tendue peut fort bien guérir. Tout au long de l’histoire, les chrétiens se sont fait serviteurs, cherchant à soulager les maladies et les souffrances. Ce service de l’humanité rend crédibles les paroles que nous prononçons, et mets en œuvre le mystère que nous célébrons, c’est la raison pour laquelle ce troisième aspect est aussi important que les deux autres.

Annoncer l’évangile suppose donc de dire, de prier et de servir. Certes il y a des gens qui spontanément seront plus doués, et plus enclins, à l’un ou l’autre de ces aspects, et c’est vrai que c’est ensemble, en Église, dans la complémentarité des charismes que nous évangélisons. Mais aucun de nous n’est dispensé de dire, de prier ou de servir.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Elle qui est la Vierge de l’Annonce, qu’elle nous apprenne à porter toujours plus fidèlement la Parole de Dieu. Elle qui est la Demeure de l’Esprit Saint, qu’elle nous montre comment nous tenir en présence de Dieu dans la prière. Elle qui est la Mère de Miséricorde, qu’elle ouvre nos yeux à ceux de nos frères qui ont besoin d’une main tendue pour accueillir dans leur vie la force de la Résurrection. Et qu’ainsi nous puissions demeurer en Dieu comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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28 janvier 2024 7 28 /01 /janvier /2024 13:58

4TOB

4° Dimanche du Temps Ordinaire - Année B

Dt 18, 15-20 ; Ps 94 (95) ; 1 Co 7, 32-35 ; Mc 1, 21-28

Nous voici donc invités à Capharnaüm, au début du ministère public de Jésus, alors que sa renommée commence à se répandre en Galilée, tant à cause de sa manière d’enseigner, que de cet épisode spectaculaire où il chasse l’esprit impur qui tourmentait l’un des assistants. « Tais-toi ! Sors de cet homme » a dit le Seigneur, et l’esprit est sorti de cet homme, non pas en silence mais avec un grand cri. Pourtant le plus grave n’est pas tellement cette vocifération de l’esprit impur que l’on peut regarder comme une capitulation désespérée et hargneuse, le plus grave serait que ses paroles continuent de résonner dans nos cœurs, comme s’il n’y avait que le ton et l’intention qui étaient à réprouver. Si Jésus a ordonné « tais-toi ! » c’est que tout ce qui a été dit était faux et dangereux. L’esprit est à considérer comme l’un de ces faux prophètes contre lequel le Deutéronome nous mettait en garde. Comme toujours en la matière, le diable est dans le détail, et sous l’apparence d’une vérité plausible, il n’y a une approche tordue, dont il faut se méfier. Faisons-donc taire cet esprit impur en prenant le contrepied de tout ce qu’il a dit.

Tout d’abord il y a une sorte de défiance, de mise à distance « que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? ». En grec le titre même est suspect, il faudrait le traduire par Jésus Nazarénien : la traduction française a rajouté une préposition qui n’est pas dans le texte grec. Ce qui est dommage, parce que dans tout le Nouveau Testament il n’y a que le démon de Capharnaüm qui appelle Jésus de cette manière. Il ne s’agit donc pas d’un rappel de son origine, mais d’une sorte de mépris, peut-être même une manière d’insulte. La première attitude à éviter est cette méfiance hostile. Au contraire, l’étonnement devant Jésus devrait nous rapprocher de lui, nous faire découvrir à quel point nous sommes concernés. Il y a tant de manières de se tenir à distance de l’évangile. En ne s’y intéressant pas, en en faisant quelque chose d’inaccessible, ou en le considérant comme une simple curiosité littéraire ou culturelle. On ne peut pas rester objectif devant l’évangile, pas plus qu’on ne peut rester objectif devant la parole de ceux qu’on aime ! L’expression de l’esprit impur dit littéralement « qu’y a-t-il entre toi et nous ? », alors que nous devrions dire, comme saint Paul sur le chemin de Damas : « Seigneur que veux-tu que je fasse »

Ensuite il y a de la suspicion : « Es-tu venu pour nous perdre ? » … et spontanément nous pensons que, oui, Jésus est venu perdre les esprits impurs. Mais si nous nous tenions dans la synagogue à ce moment-là, nous aurions vu un homme énervé dire « es-tu venu pour nous perdre ? » et nous nous serions peut-être posé la question pour nous. Si Jésus n’enseigne pas comme les scribes, est-ce pour nous détourner de la loi ? Non ! Jésus n’est venu pour perdre personne mais pour sauver tout le monde. Comme il est facile de décliner, sans doute plus calmement, la question du démon de Capharnaüm, chaque fois que l’on se demande à quoi sert la vie chrétienne. Est-il venu pour nous apprendre à vivre ensemble, ou à vivre mieux ? L’évangile est-il là pour que nous soyons heureux ? La prière sert-elle à surmonter les difficultés ? Tout cela n’est pas faux, mais c’est très réducteur ! Ce qui est en jeu, c’est notre salut, non seulement la vie éternelle mais la plénitude de ce que nous sommes ! Plutôt que de s’interroger sur l’utilité de la foi, nous devrions réaliser, comme saint Pierre : « Seigneur, à qui irions-nous, tu as les paroles de la vie éternelle ».

Enfin il y a de l’arrogance : « je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu ». Dans l’évangile de Marc, il n’y a que les démons qui prétendent savoir qui est Jésus. Et le titre « le Saint de Dieu » est une sorte de pléonasme. On le retrouve une seule autre fois dans la bouche de Pierre, encore y a-t-il de nombreuses variantes du texte selon les manuscrits. Bien sûr ce n’est pas faux, mais c’est un peu exagéré, surtout dans ce contexte. C’est comme si le démon de Capharnaüm prétendait opposer à l’autorité de Jésus sa propre autorité, et utilisait un titre pompeux pour se moquer de lui. Encore une fois, il faut se méfier de la vérité brandie en étendard pour s’imposer. Le savoir ne donne pas un privilège mais une responsabilité, c’est-à-dire une mission. Et l’on ne s’approche pas des mystères de Dieu par la prétention mais par l’humilité. Si nous avons une affirmation à faire devant Jésus, c’est plutôt celle de saint Thomas au soir de Pâques : « mon Seigneur et mon Dieu ».

En intimant à l’esprit impur de se taire dans la synagogue de Capharnaüm, Jésus nous avertit de ne pas l’écouter, de ne même pas y prêter attention si ce n’est pour s’en éloigner. Au lieu de se tenir à distance de l’Évangile, acceptons que l’étonnement nous conduise à la disponibilité ; au lieu de s’interroge sur le projet de Dieu, prenons la main qu’il nous tend pour nous sauver ; au lieu d’étaler notre connaissance, entrons dans l’humilité de la contemplation.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Imitons sa disponibilité au message de l’ange, en reprenant ses paroles à l’Annonciation « que tout se fasses en nous selon sa parole ». Unissons nos cœurs au sien en priant le Magnificat « car le Seigneur a fait pour nous des merveilles, saint est son nom ». Entendons son invitation aux noces de Cana : « faites tout ce qu’il vous dira » pour que nous puissions demeurer en Dieu comme il demeure en nous dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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21 janvier 2024 7 21 /01 /janvier /2024 13:04

3TOB

3° Dimanche du Temps Ordinaire - Année B

Jo 3,1-5.10 ; Ps 24 ; 1 Co 7,29-31 ; Mc 1,14-20

« Encore quarante jours et Ninive sera détruite », l’avertissement de Jonas, résonne avec celui de saint Paul : « le temps est limité ». Et l’on comprend que le message rejoint celui de Jésus : « convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ». Il est magnifique d’imaginer la scène et de contempler la force de la Parole de Dieu. Jonas parcourt à peine un tiers de la ville et tous se convertissent et changent de vie. Eh bien laissons-nous guider par notre imagination pour la méditation. Imaginons que quelqu’un passe dans la rue et proclame « encore quarante jours et Toulon sera détruite ». Que ferions-nous ?

La première réaction, c’est peut-être l’incrédulité. On ferme les portes et les fenêtres (surtout en cette saison) pour ne pas être dérangé par ce fou qui passe : on en voit tellement de nos jours ! Mais comme ce n’est pas ce qu’ont fait les habitants de Ninive, il faut se mettre dans la situation où nous reconnaissons qu’il s’agit d’une parole qui vient vraiment de Dieu, une parole qui va se réaliser.

Prenant au sérieux le message : « encore quarante jours et Toulon sera détruite », certains petits malins vont considérer que ça ne les concerne pas, puisqu’ils habitent à La Valette ou à Ollioules. D’autres penseront qu’il suffit de s’en aller, d’aller ailleurs, de mettre un peu de distance avec la catastrophe et de prendre la fuite : quarante jours, c’est largement suffisant pour faire ses bagages et partir. Mais la fuite devant la Parole de Dieu n’est jamais une solution, on ne triche pas avec la Parole de Dieu. D’ailleurs l’avertissement de saint Paul est plus général : « le temps est limité ». C’est plutôt notre vie actuelle qui est visée. Le sens de l’annonce est bien « encore quarante jours et votre vie sera détruite ».

Certains vont se faire fatalistes. On fait son testament, on met les choses en ordre et l’on attend tranquillement la fin des quarante jours. C’est ce qu’un philosophe appelle les « esprits chameaux ». On supporte et l’on croit être vertueux parce qu’on reste inactif. Mais croyez-vous que ce soit ce que voulait le Seigneur ? Des oiseaux qui se cachent pour mourir ? La Parole de Dieu n’est pas faite pour nous paralyser mais pour nous mettre en mouvement. D’autres imaginent sans doute que si on les avertissait que leur vie finirait dans quarante jours, ils en profiteront pour faire ce qu’ils ont toujours voulu faire sans jamais oser franchir le pas. Pour les plus vertueux ce sera un voyage dans un pays exotique ou une expérience enthousiasmante. Pour d’autres ce sera des choses plus ou moins légales. Peu importe après tout, si le temps est limité, il n’y a plus de punition à craindre, autant profiter de la vie. Mais devant la Parole de Dieu, la révolte ne vaut pas mieux que la résignation. Tout au plus dévoile-t-elle la vérité du cœur, les valeurs qui nous animent, les désirs inavoués qui nous font rêver.

Évidemment, la bonne réaction, celle qu’attend le Seigneur, celle qui motive sa parole, c’est celle des habitants de Ninive, celle à laquelle le Christ nous invite, celle que décrit saint Paul : la conversion. S’attacher à ce qui demeure en se détachant ce qui passe. Si ma vie est en Dieu, elle ne sera jamais détruite ; si ma vie résonne de Sa parole, le ciel et la terre passeront, sa parole ne passera pas ; si ma vie est donnée rien ne pourra la détruire. Le prestige, l’argent, la puissance, les biens matériels … ça passe. La considération, l’admiration, le pouvoir, le confort … ça passe. Le plaisir, le bien-être, la bonne santé … ça passe. Il n’y a qu’une seule chose qui ne passe pas c’est le Christ, lui qui nous appelle « Venez à ma suite ».

Oui, le temps est limité ; oui, il y a une certaine urgence à suivre le Christ ; oui, il ne faut pas tarder à tourner nos cœurs et nos vies vers l’Évangile pour vivre déjà au rythme de l’éternité. Il passe, ce monde tel que nous le voyons et il ne faut pas attendre pour s’attacher à celui qui demeure.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Etoile du matin qu’elle affermisse notre foi pour que nous puissions accueillir l’appel du Seigneur qui transforme notre vie. Porte du Ciel qu’elle fortifie notre espérance pour que nous puissions entendre la promesse et nous rendre disponible à la vie éternelle. Mère du Bel Amour qu’elle nous entraîne dans la charité, et que laissant nos cœurs battre au rythme du cœur de Dieu, nous puissions demeurer en lui, comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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14 janvier 2024 7 14 /01 /janvier /2024 14:09

2TOB

2* Dimanche du Temps Ordinaire - Année B

1 S 3,3b-10.19 ; Ps 39 ; 1 Co 6,13b-15a.17-20 ; Jn 1,35-42

Après les festivités autour de la naissance du Seigneur, nous voilà invité à reconnaître la présence de Dieu dans l’ordinaire de notre vie. Et l’évangile qui nous introduit à ce temps est celui qui rappelle le commencement de la vie publique de Jésus, quand les premiers disciples le rejoignent. Dans un premier temps, André et un autre disciple suivent Jésus. Évidemment celui-ci s’en aperçoit, et s’inquiète : « que cherchez-vous ? » après un bref dialogue le Seigneur les invite. L’évangile décrit ainsi le moment où ils passent du statut de curieux à celui de disciples : « ils allèrent, ils virent où Jésus demeurait, et ils restèrent auprès de lui ». Reprenons ces trois moments qui sont comme une description de la vie chrétienne.

« Ils allèrent ». Tout commence par un mouvement, un déplacement. C’est le signe que tout commence par une conversion, un changement. On sait que déjà, ils suivaient le Seigneur, mais le principe du mouvement c’est qu’il se déploie dans le temps. Trop souvent, on pense que la conversion est seulement un moment, alors que c’est un mouvement. Dit autrement, on ne se convertit pas une fois pour toutes, mais c’est plutôt chaque jour que l’on se convertit. Souvenons-nous des paroles de saint Paul aux Corinthiens. Ne s’adressait-il pas à des chrétiens ? N’avaient-ils pas déjà choisi le Christ ? Et pourtant il les exhorte à changer des choses dans leur vie, et ce ne sont pas des ajustements de détails. La conversion à laquelle nous sommes invités dans l’ordinaire de notre vie, consiste à vérifier que nous sommes à la suite du Christ, et non pas que nous prétendons que le Christ nous suive. Par exemple, lorsqu’on demande une bénédiction, est-ce pour que Dieu nous conforte dans notre situation ou pour qu’il nous guide jusqu’à lui ? La vie chrétienne est un mouvement, et cela implique que nous cherchions à nous convertir toujours plus et toujours mieux.

Ensuite « ils virent où il demeurait ». Voilà une précision étonnante. Plus tard, Jésus ne dira-t-il pas : « les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids, mais le fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête » ? Qu’ont donc vu André et l’autre disciple ? Il y a quelque chose de mystérieux dans cette phrase : « ils virent où il demeurait ». Parce que le deuxième moment, après la conversion, est la contemplation. Se rendre disponible au déploiement du mystère. Pour le jeune Samuel dans le Temple il s’agissait aussi de se rendre disponible au mystère : « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute ». La vie chrétienne ne peut pas en rester à une simple curiosité, ni même à un effort de conformité moral. Il faut accepter cette présence à la présence dans la prière qui se fait écoute de la Parole et contemplation.

Enfin « ils restèrent auprès de lui ce jour-là » … mais nous savons qu’ils restèrent auprès de Jésus les autres jours aussi. C’est un troisième temps : celui de l’engagement et de la fidélité. Dans un monde où tout va très vite, ce n’est pas toujours l’aspect auquel nous sommes le plus sensibles, et pourtant cela fait aussi partie de l’appel du Seigneur. La foi n’est pas une rencontre d’un jour, mais l’aventure d’une vie. La fidélité, l’engagement demandent de la persévérance, et la persévérance nous façonne petit à petit selon le cœur de Dieu. Car il ne s’agit pas de ne plus bouger, mais de revenir constamment, malgré les difficultés et malgré les lassitudes. La persévérance est une forme de purification par laquelle l’amour dépasse l’émotion, la foi dépasse l’opinion et l’espérance dépasse l’optimisme.

Ils allèrent, ils virent, ils restèrent … en trois verbes, l’évangile nous trace le programme de la vie à la suite du Christ : se convertir, contempler et s’engager.

Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Refuge des pécheurs, qu’elle nous apprenne à nous détacher de ce qui éloigne de Dieu ; Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle nous rende présents à la Présence ; Consolatrice des affligés qu’elle nous fortifie dans nos engagements, pour que nous puissions demeurer en Dieu comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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26 novembre 2023 7 26 /11 /novembre /2023 14:15

XR-A

Christ Roi de l'Univers - Année A

Ez 34,11-12.15-17 ; Ps 22 ; 1 Co 15,20-26.28 ; Mt 25,31-46

La fête du Christ Roi de l’univers, marque la fin de l’année liturgique, et (comme depuis quelques semaines), les textes de la Parole de Dieu nous invitent à penser à la fin des temps. Comme le décrivaient, chacun à leur manière, Ézéchiel et saint Paul, la fin des temps, c’est d’abord l’avènement du Royaume de Dieu, le temps où se manifeste en plénitude la Royauté du Seigneur. A travers les mots du prophète nous comprenons que cette plénitude est marquée par l’épanouissement de la vie : la brebis perdue est ramenée, la brebis blessée est soignée, la brebis affaiblie est fortifiée. Les paroles de l’apôtre sont peut-être un peu plus abstraites, mais elles rappellent aussi la plénitude de la vie, en évoquant une progression jusqu’à l’aboutissement : le dernier ennemi qui sera anéanti, c’est la mort.

Puisqu’il y a progression, cela signifie qu’on va du moins vers le plus. C’est la même dynamique qui est suggérée dans l’évangile à travers les paroles du Roi aux justes : « recevez en héritage le Royaume ». Hériter, ce n’est pas passer de rien à tout, mais de moins à plus. L’héritier se dispose à recevoir, jusqu’au moment – qui ne dépend pas de lui – où il reçoit l’héritage. Il y a bien une dynamique où l’on doit veiller au moins pour accueillir le plus. En l’occurrence, puisqu’il s’agit du Royaume de Vie, le plus nous est donné par la résurrection du Christ, mais nous devons veiller au moins, c’est-à-dire combattre ce qui conduit à la mort.

C’est bien ce qu’évoquent les œuvres rappelées par l’évangile : la faim et la soif menacent la vie corporelle. Être étranger – Jésus n’a pas parlé de touriste – c’est être privé de ses repères, de ce qui nous rassure et nous réconforte ; c’est une fragilité comme la nudité qui dépouille de ce qui protège. Autant de situations qui menacent la vie psychique. Enfin le malade et le prisonnier sont isolés, et cet isolement menace la vie sociale qui nous est aussi indispensable que la vie corporelle ou la vie psychique. Il y a bien, dans ce qu’on a coutume d’appeler les œuvres de miséricorde, un combat qui rejoint le combat du Christ, pour préserver la vie du corps, de l’esprit et du cœur. Et participer à ce combat, nous dispose à recevoir la victoire suprême, celle de la résurrection.

Peut-être certains penseront qu’ils ont suffisamment à faire pour préserver en eux la vie, face aux difficultés et aux épreuves. Le combat spirituel n’est-il pas déjà, pour chacun de nous, une participation au combat du Christ pour permettre l’avènement du Royaume ? Sans aucun doute, mais l’évangile nous rappelle que nous ne sommes pas les seuls vivants et qu’on ne défend pas la vie en ne s’intéressant qu’à la nôtre. D’une certaine manière, les textes que nous avons entendu les dimanches précédents nous invitaient à protéger la vie en nous ; l’évangile de ce dimanche nous invite à protéger la vie autour de nous. Sans cette attention aux autres, la vigilance ne serait qu’égoïsme. Il n’y a pas de vie spirituelle sans ouverture du cœur : le Seigneur ne nous est pas réservé : il est présent dans ceux que nous pouvons aider.

Reconnaître le Christ comme Roi de l’Univers, c’est reconnaître qu’il est concerné par tout et par tous. Pour hériter du Royaume préparé depuis la fondation du monde, il faut se disposer à accueillir la victoire sur la mort, en combattant ce qui menace la vie du corps, de l’esprit et du cœur.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Santé des infirmes qu’elle ouvre nos yeux à toute détresse ; Consolatrice des affligés qu’elle nous façonne un cœur selon le cœur de Dieu ; Refuge des pécheurs qu’elle nous dispose à hériter du Royaume en nous unissant à l’œuvre du Christ pour que la bonne nouvelle retentisse là où nous sommes et que nous puissions demeurer en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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19 novembre 2023 7 19 /11 /novembre /2023 14:23

33TOA

33° Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Pv 31,10-13. 19-20.30-31 Ps 127 1 Th 5,1-6 Mt 25,14-30

La parabole des talents ! Elle a fait couler beaucoup d’encre et beaucoup de salive … Elle est tellement connue qu’elle a donné au mot « talent » qui désignait une somme d’argent, le sens que l’on connaît aujourd’hui de qualité personnelle. Mais ce que l’on retient généralement c’est plutôt le sort du troisième serviteur, que par un réflexe de miséricorde - honorable mais mal placée - on a tendance à plaindre, alors que la parabole nous invite assez clairement, me semble-t-il, à ne pas l’imiter !

Il y a chez ce troisième serviteur quelque chose de tragique. Il ne reçoit pas ce que lui confie le maître. Non qu’il soit oublié de la distribution, mais il s’empresse de s’en décharger en l’enterrant. Il n’utilise pas ce qu’on lui donne ; il ne le pas fait fructifier ; et lorsqu’il rend des comptes, il le présente en disant « ton bien » alors que le maître considère que c’est « son talent ». Il ne s’agissait pas d’un prêt, mais d’un don. La meilleure preuve est que le premier serviteur est désigné comme celui qui en a dix : ce qui signifie qu’il a tout gardé. Mais alors, pourquoi demander des comptes si l’argent a été donné ? Tout laisse à penser que ce qui intéresse le maître, ce n’est pas tant le profit réalisé que le comportement des serviteurs. Il demande des comptes pour vérifier que les serviteurs sont capables de partager sa condition, qu’ils peuvent « entrer dans sa joie ».

Ainsi les talents sont l’image du don de Dieu, de ce qui nous est confié pour nous préparer à entrer dans la joie du Seigneur, c’est-à-dire dans la vie éternelle. Qu’on en ait plus ou moins, qu’on en ait cinq ou deux ou un, c’est chaque fois la clé du Royaume qui nous est confié, une clé qui ne s’utilise pas en la cachant sous terre, mais en la déployant.

Par exemple, les talents que nous confie le Père, c’est la vie. Une vie qui n’est pas faite pour être enterrée, une vie qui n’est pas une parenthèse de l’existence ; mais une vie qui est faite pour se déployer selon le cœur de Dieu, c’est-à-dire dans l’amour. Des générations de philosophes ont disserté sur le sens de la vie, l’évangile nous propose de faire l’expérience d’une vie faite pour aimer, pour donner et se donner. Les talents que nous pouvons gagner avec ceux que le Père nous confie, c’est l’amour.

De la même manière, les talents que nous confie le Fils, c’est la Révélation. On ne réalise pas à quelle point cette Parole est précieuse. Mais elle n’est pas donnée pour être inscrite dans un livre qui prendra la poussière sur nos étagères. La Parole est faite pour être vécue et mise en pratique : c’est elle qui nous indique qu’il vaut mieux donner que prendre, c’est elle qui nous propose de préférer souffrir que faire souffrir ; qui nous rappelle que l’amour grandit par le pardon et que même la souffrance peut être une occasion d’aimer en plongeant dans le mystère de Pâques. C’est la foi qui nous permet d’accueillir et de déployer la Parole reçue. Les talents que nous pouvons gagner avec ceux que le Fils nous confie, c’est la foi.

Enfin les talents que nous confie l’Esprit Saint, ce sont les charismes. Ce qu’il suscite en nous pour le bien de tous. Ces charismes ne sont pas donnés pour flatter notre orgueil ou être enfermés dans des logiques de performances ou de spécialisations. Les charismes sont les appels de l’Esprit à anticiper le Royaume des Cieux, en partageant concrètement la saveur de la Bonne Nouvelle, en rendant accessible la joie de notre Seigneur. C’est ainsi que les charismes permettent l’espérance, qui n’est ni un trait de caractère, ni la préférence pour l’hypothèse positive, mais l’aspiration confiante à participer au Royaume des Cieux. Les talents que nous pouvons gagner avec ceux que l’Esprit Saint nous confie, c’est l’espérance.

Bien loin d’être un enseignement économique ou social, la parabole des talents nous interroge sur ce que nous faisons des dons de Dieu. N’écoutons pas les paroles du troisième serviteur, ne pensons pas que le Seigneur est un maître exigeant qui nous demanderait de récolter ce qu’il n’a pas semé, de ramasser ce qu’il n’a pas dispersé. Au contraire, imitons plutôt les deux premiers serviteurs qui reçoivent le don pour l’épanouir. Le don de Dieu n’est pas destiné à être inutile, mais à être déployé pour que nous puissions entrer dans la joie du Royaume. Savons-nous recevoir le don de la vie et l’épanouir en amour ? Savons-nous recevons le don de l’Évangile et l’épanouir en foi ? Savons-nous recevoir le don des charismes et l’épanouir en espérance ?

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Mère du Bon Conseil, qu’elle nous apprenne à déployer dans la vie ce qui fait grandir la charité. Arche de la Nouvelle Alliance, qu’elle nous montre comment accueillir la Parole pour affermir notre foi. Reine des Saints, qu’elle dispose nos cœurs au souffle de l’Esprit pour que nous puissions témoigner de l’espérance et entrer dans la joie de notre Seigneur, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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12 novembre 2023 7 12 /11 /novembre /2023 14:46

32TOA

32° Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Sg 6,12-16 ; Ps 62 ; 1 Th 4,13-18 ; Mt 25,1-13

« Le Royaume des Cieux sera comparable à dix jeunes filles invitées à des noces » … Le début de la parabole ressemble à ce que nous entendons dans la liturgie, avant la communion : « Heureux les invités aux noces de l’Agneau ». Mais le début de l’histoire a beau être similaire, la suite apporte quelques nuances : si tout se passe bien pour certaines, pour d’autres l’heureuse invitation tourne au cauchemar. Évidemment, Jésus nous raconte cette histoire pour nous prévenir et nous avertir, pour que nous ne vivions pas une semblable mésaventure. Voyons donc ce à quoi il faut veiller pour éviter de nous retrouver comme celles qui finissent enfermées à l’extérieur des noces.

Tout d’abord, il y a une condition à l’invitation. Les jeunes filles ne sont pas seulement invitées, elles ont un rôle à jouer, et pour cela elles doivent venir avec une lampe. Elles n’arrivent pas les mains vides, ni même avec un cadeau : on a besoin d’elles pour éclairer la scène. « Vous êtes la lumière du monde » disait Jésus dans le discours sur la montagne. Cela suppose bien sûr que la lampe soit allumée … sinon elle est inutile ! Et c’est pour cela que celles dont les lampes s’éteignent s’inquiètent : elles deviennent inutiles. Voilà déjà un premier sujet de méditation : on n’entre pas dans le Royaume des Cieux par hasard, ou par convention parce qu’on figure dans le carnet d’adresse de l’époux. Le Royaume des Cieux a besoin de nous. Le Seigneur compte sur nous. On n’est pas des figurants ni des spectateurs mais des acteurs aux noces de l’Agneau. Il faut donc certaines dispositions. Pour reprendre l’image de la lumière, nous savons que c’est le Seigneur lui-même qui nous donne et nous transmets la lumière … Les dispositions à prendre pour accueillir l’invitation ne sont pas exagérées, mais il faut les prendre.

La suite de l’histoire montre d’ailleurs que ces dispositions supposent une certaine vigilance. L’époux tarde à venir, et toutes s’endorment. Lorsqu’enfin on annonce sa venue, certaines se trouvent embarrassées puisque leurs lampes s’éteignent. Il ne suffit donc pas de se préparer ponctuellement aux noces, il faut encore durer. C’est une dimension importante, c’est même le cœur du message de Jésus : « veillez car vous ne savez ni le jour ni l’heure ». A la mission qu’implique l’invitation aux noces, s’ajoute une qualité : celle de la persévérance. C’est ainsi qu’apparaît le deuxième sujet de méditation : l’importance de la fidélité. Dans un monde où l’on est plus sensibles aux changements qu’aux permanences, où l’on valorise l’émotion donc la réaction instantanée, nous devons être vigilants à garder cette qualité de persévérance, cette fidélité que Jésus nous désigne comme indispensable à l’entrée dans le Royaume. Ne désigne-t-on pas les chrétiens comme « les fidèles » ?

Reste un détail intrigant dans la parabole : les jeunes filles qui avaient de l’huile en réserve, ne partagent pas avec celles qui en manquent. Cela pourrait paraître choquant : le partage n’est-il pas une valeur de notre foi ? Cela vaut la peine d’entendre ce qu’elles disent pour expliquer leur attitude : « jamais cela ne suffira pour nous et pour vous ». Ainsi ce n’est pas tant qu’elles ne veulent pas, mais elles ne peuvent pas. Il y a des choses qu’on peut partager, et d’autres choses qu’on ne peut pas partager. Il y a des choses pour lesquelles on peut se faire aider, et d’autres que nous sommes les seuls à pouvoir faire. Par exemple, personne ne peut manger à notre place, ou personne ne peut se laver à notre place ! Rappelons-nous : il s’agissait d’aller à la rencontre de l’époux : peut-on rencontrer vraiment quelqu’un par procuration ? Il y a d’autres enseignements de Jésus sur le partage, mais cette parabole est là pour nous prévenir que l’entrée dans le Royaume ne se délègue pas. Il y a un point dans la relation à Dieu où nous sommes en première ligne et qui nous implique personnellement.

Nous qui sommes « invités aux noces de l’Agneau », entendrons-nous l’avertissement de Jésus dans la parabole des dix jeunes filles ? Sans doute le Royaume des Cieux évoqué par le Seigneur désigne-t-il d’abord les derniers temps. Mais ne nous faisons pas illusion : c’est déjà maintenant, dans notre vie spirituelle que nous devons veiller à être dans les dispositions que Dieu attend de nous pour être acteurs et non pas spectateurs ; c’est déjà maintenant que nous devons nous exercer à la persévérance et vivre la fidélité ; c’est déjà maintenant que nous devons assumer ce que personne ne peut faire à notre place.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Etoile du matin, qu’elle nous apprenne à répondre à l’appel du Seigneur, en nous disposant à ce qu’il nous demande. Secours des Chrétiens, qu’elle nous soutienne dans la persévérance pour que nous restions fidèles à ce que nous avons reçu. Rose mystique, qu’elle nous encourage à déployer le Don de Dieu, pour nous puissions vivre la rencontre à la première personne, et demeurer en Lui comme Il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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5 novembre 2023 7 05 /11 /novembre /2023 14:18

31TOA

31° Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Ml 1,14b-2,1.2b.8-10 ; Ps 130 ; 1 Th 2,7b-9.13 ; Mt 23,1-12

L’évangile que nous venons d’entendre est en quelque sorte la tarte à la crème de toutes les critiques vis-à-vis de l’église ou des prêtres ! Ne voyez dans mes propos aucun manque de respect pour la parole de Dieu, même si je reconnais volontiers un peu d’agacement dans l’usage que certains en font. Cela dit, je ne suis pas convaincu qu’il serait plus évangélique de revendiquer le titre de « Monsieur l’archiprêtre », plutôt que celui de « père » ! Sans compter qu’on continue à parler de père dans les familles même chrétiennes, et que les artistes, les enseignants ou les hommes de loi ne s’offusquent pas qu’on les appelle « maitre » ! Chacun comprendra facilement qu’on ne peut pas réduire le message de Jésus à de simples questions de protocole.

Il est bien plus intéressant de s’attarder sur les justifications que donne le Seigneur. Pour résumer, on peut dire qu’il invite à ne pas se mettre à la place de Dieu. En précisant, on remarquera qu’il y a deux types d’avertissements : « ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, ou de maître » et « ne donnez à personne sur terre le nom de père ». Donc l’avertissement est double : ne vous prenez pas pour Dieu, et ne prenez personne pour Dieu.

Ne vous prenez pas pour Dieu … car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ et vous êtes tous frères. C’est le premier avertissement, et malheureusement, il ne concerne pas seulement ceux qui enseignent. Sans doute la tentation est-elle plus forte pour le savant qui peut se laisser enivrer par le savoir. Dans un poème des Fleurs du Mal (Châtiment de l’orgueil) Baudelaire fait le portrait saisissant d’un théologien qui devient fou lorsqu’il se met à croire que la gloire de Dieu dépend de ce qu’il dit. Mais le plus souvent, c’est subtilement que l’on se met à la place de Dieu. Quand on prétend savoir mieux que les autres ce qui est juste ou ce qui est vrai, quand on préfère donner des leçons plutôt qu’en recevoir, quand on jauge la foi à l’aune de nos impressions. Il n’est pas toujours nécessaire que les autres nous admirent pour qu’on se prenne pour un maître. Il suffit de faire passer le Christ après nos idées, par exemple en consentant seulement à ce qu’il nous donne raison !

Mais si Jésus nous met en garde contre l’orgueil, il avertit d’un autre danger : « ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux ». Il ne s’agit plus ici de se prendre pour Dieu, mais de prendre un autre pour Dieu. Cela arrive quand on porte à quelqu’un l’affection et la confiance qu’on doit à Dieu. Quand la parole ou l’opinion d’un autre prime pour nous sur l’évangile. C’est une manière d’idolâtrie. Rien ni personne ne devrait être plus important que le Seigneur. Cela ne signifie pas, évidemment qu’on ne doive aimer personne, ni qu’on ne fasse confiance à personne, mais aucune relation n’est absolue, toutes nos relations doivent être mesurées ou référées à Dieu. Mettre quelqu’un à la place de Dieu, c'est risquer qu’il le croie et qu’il nous fasse faire n’importe quoi.

Il reste un troisième moyen de confondre Dieu et les hommes. Saint Paul, dans la deuxième lecture, l’évoque en félicitant les Thessaloniciens de l’avoir évité. « Vous avez accueilli la Parole de Dieu pour ce qu’elle est réellement, non pas une parole d’hommes, mais la parole de Dieu qui est à l’œuvre en vous, les croyants ». Il ne s’agit plus de mettre un homme à la place de Dieu, mais de mettre Dieu à la place des hommes. Je sais bien que ce n’est pas très facile de se prémunir de ce piège, puisque le Seigneur utilise des moyens humains pour nous parler. Comment d’ailleurs pourrait-il faire autrement puisque nous sommes humains ? Mais, comme dit le proverbe, quand le sage montre la lune, il ne faut pas regarder son doigt ! Il nous faut donc être vigilants pour accueillir la Parole de Dieu dans l’humilité et dans la foi pour qu’elle soit une porte vers le mystère, un guide pour reconnaître la présence divine.

« Rendez à Dieu ce qui est à Dieu », disait Jésus à ceux qui l’interrogeait sur l’impôt. C’est bien la même invitation qui nous est faite aujourd’hui : ne pas confondre Dieu et les hommes, mais reconnaître à chacun à sa place : c’est Dieu qui est au centre, lui et non pas nous, lui et personne d’autre. L’équilibre n’est pas toujours facile à tenir, mais il est bon de garder au cœur l’interpellation du prophète Malachie : « n’avons-nous pas tous un seul Père ? N’est-ce pas un seul Dieu qui nous a créés ? »

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Temple de l’Esprit Saint, qu’elle nous rende dociles au Don de Dieu pour que nous sachions reconnaître la présence de l’invisible. Mère de l’Église, qu’elle ouvre nos cœurs à ceux que le Seigneur place auprès de nous, sans que nous confondions le message et le messager. Porte du Ciel, qu’elle nous apprenne à nous tenir devant Dieu pour que nous puissions demeurer en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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29 octobre 2023 7 29 /10 /octobre /2023 14:17

30TOA

30* Dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Ex 22,20-26 ; Ps 17 ; 1 Th 1,5c-10 ; Mt 22,34-40

A l’écoute de l’évangile, certains se seront peut-être fait la réflexion que le passage était bien connu et que ce n’est pas aujourd’hui qu’ils seront surpris par la Parole de Dieu. Qu’on s’en réjouisse ou qu’on s’en désole, entendre un texte biblique en se disant qu’on le connait déjà est toujours un signal d’alerte, c’est le signe qu’il faut creuser davantage notre compréhension du texte. Si on n’est pas étonné par l’enseignement du Seigneur, c’est qu’on ne l’a pas bien écouté !

Déjà, une première chose qui peut nous étonner c’est que les deux commandements que cite Jésus demandent d’aimer. Mais est-ce qu’on peut commander d’aimer ? Ne dit-on pas, au contraire, que l’amour ne se commande pas ? Il est vrai que le mot désigne des choses tellement différentes : on l’utilise pour parler de la relation entre époux, comme de la relation avec ses parents ou ses enfants, c’est toujours le même mot pour évoquer ce que l’on mange et ce que l’on fait, pour parler d’une passion ou d’un goût, d’un enthousiasme ou d’une complaisance. Il faut donc comprendre que l’évangile nous parle d’un amour qui se décide et non pas d’une émotion qui se ressent, d’un amour qui s’exprime et non pas d’un plaisir qui s’éprouve. La précision est loin d’être anecdotique, en particulier dans les difficultés. Quand on n’a pas envie de prier, on peut décider de se tourner vers Dieu ; lorsque l’autre ne nous intéresse pas, on peut décider de ne pas rompre le lien ; lorsqu’il nous énerve, on peut décider de rester positif. Ce que décrivait la première lecture : ne pas accabler, ne pas imposer des intérêts, laisser le minimum nécessaire, paraît bien ordinaire, mais parce que c’est le premier pas de la justice, c’est aussi la porte de l’amour.

Une autre chose peut aussi nous étonner : que la relation à Dieu soit décrite en termes d’amour. En fait, c’est loin d’être une évidence dans le monde comme conception de la religion. Souvent la religion est comprise comme une idée à défendre, ou comme des rites à observer ou encore comme une certaine manière d’agir. Mais Jésus nous rappelle qu’il s’agit d’abord d’un amour. Nous sommes donc invités d’abord à une mystique … ou si le mot vous fait peur à une vie spirituelle. Ça ne veut pas dire que la doctrine, la liturgie ou la morale ne soit pas importantes, mais elles découlent de l’amour, et permettent de l’authentifier et de l’exprimer. Est-ce que nous pouvons dire en vérité « j’aime le Seigneur » ? Quand nous scrutons la Parole de Dieu, quand nous essayons d’expliquer les mystères du Seigneur, est-ce un exercice intellectuel ou une manière de mieux le connaître pour mieux l’aimer ? Quand nous venons à la messe ou que nous faisons nos prières, surtout quand on préférerait faire autre chose ou être ailleurs, est-ce que nous pensons en faire une preuve d’amour en nous disant qu’il s’agit d’abord de faire plaisir à Dieu ? Dans nos choix de vie et dans nos comportements, nous arrive-t-il de faire cette courte prière : « Seigneur, je vais faire ça, puisque tu le demandes » ? Sans doute savons-nous qu’il faut aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme et de tout son esprit … mais il ne suffit pas de le savoir, il faut le vivre !

Enfin une troisième chose peut encore nous étonner. C’est peut-être ce qu’il y a de plus original dans la réponse de Jésus au docteur de la loi, c’est de rapprocher les deux commandements de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain en disant qu’ils sont semblables. Bien sûr toutes les religions comportent une morale, mais le rapprochement de Jésus va plus loin : puisqu’il s’agit d’aimer son prochain comme soi-même, il ne s’agit pas simplement de faire ce que Dieu dit être bien, il s’agit de découvrir que notre relation aux autres est le reflet de notre relation à Dieu. L’expérience nous montre que prétendre aimer l’autre sans aimer Dieu est une ambition décevante, mais  prétendre aimer Dieu sans aimer l’autre est une dangereuse illusion. Peut-être que selon les circonstances de la vie nous serons plus attentifs à l’un ou à l’autre des commandements, mais le texte que nous avons entendu nous rappelle que tout découle des deux commandements et non pas d’un seul. Et parce que c’est difficile de les tenir tous les deux, il est important de ne pas s’habituer à l’enseignement du Seigneur, mais de se laisser toujours surprendre et déranger pas cet évangile.

Aussi ne croyons pas que nous n’ayons rien à apprendre de la Parole de Dieu aujourd’hui. Ce n’est pas parce que nous la connaissons, qu’elle ne peut pas nous étonner. Jésus nous demande d’aimer d’un amour qui décide, qui donne et se donne, il nous invite à grandir dans la foi pour progresser dans l’amour, il nous montre combien notre relation aux autres est la mesure de notre relation à Dieu

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Mère du Bel Amour, qu’elle nous apprenne à aimer selon le Cœur de Dieu. Etoile du Matin, qu’elle ouvre notre cœur, notre âme et notre esprit à l’Esprit d’Amour. Trône de la Sagesse, qu’elle fasse rayonner dans nos vies ce que nous avons reçu pour que nous puissions demeurer en Dieu, comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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