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17 juillet 2022 7 17 /07 /juillet /2022 10:44

16 TOC

16° Dimanche du Temps Ordinaire - Année C

Gn 18,1-10a ; Ps 14 (15) ; Col 1, 24-28 ; Lc 10, 38-42

Si l’on comprend aisément que la rencontre aux chênes de Mambré et le repas chez Marthe et Marie se rejoignent dans une même thématique de l’hospitalité, il est assez saisissant que la tonalité des deux textes soient si différentes. Ainsi l’accueil du Seigneur mérite à l’un l’accomplissement de la promesse, tandis que l’autre ne reçoit qu’un désaveu cinglant. Mais ce rapprochement contrasté nous permet peut-être de ne pas réagir trop vite ni trop catégoriquement à l’histoire de Marthe et Marie. Certains, en effet, défendront Marthe en reprochant à Jésus son ingratitude … ce qui est difficilement compatible avec la foi chrétienne ; d’autres prétendront suivre pieusement le Seigneur en accablant Marthe de tous les maux … ce qui n’est sans doute pas très juste et certainement excessif. On voit mal comment la Parole de Dieu pourrait dénigrer l’hospitalité, le dévouement et le service ! En revanche, sans doute l’Esprit Saint nous avertit-il de quelques pièges auxquels nous devons être attentifs.

En définitive, ce que Jésus reproche à Marthe, ce n’est pas d’avoir tout fait pour bien l’accueillir et lui préparer un bon repas, mais c’est plutôt d’être perfectionniste en donnant plus d’importance au service qu’à celui qui est reçu … d’autant que manifestement il y a une certaine jalousie vis-à-vis de Marie, mais que c’est à Jésus qu’on fait des reproches !

Ainsi le premier piège est celui du perfectionnisme, c’est-à-dire de se focaliser sur les moyens en oubliant le but. « Une seule chose est nécessaire » dit Jésus, comme pour aider son hôtesse à retrouver l’ordre des priorités. Malheureusement ce n’est pas un piège réservé au dévouement que cette perte du sens. Nombreux sont les domaines de l’activité humaine où le risque est grand d’oublier l’horizon à force de se remonter les manches. C’est peut-être pour cela que la Bible s’ouvre sur le commandement du Sabbat et que l’Église tient au précepte dominical. Si l’on ne sanctifie pas le septième jour, qu’est-ce qui nous fera relever la tête pour nous rappeler le but de notre vie ?

L’inconvénient des pièges du dévouement, c’est qu’ils s’enchaînent l’un l’autre. Toute accaparée par le service, Marthe regarde avec un certaine jalousie sa sœur, assise aux pieds du maître. Il y a quelque chose du regard de Caïn dans sa remarque. Le deuxième piège c’est donc l’aigreur et la division. Quand on commence à regarder d’un mauvais œil ceux qui ne font pas comme nous, quand on juge non pas les idées ou les attitudes mais les personnes, quand la générosité renferme sur soi et divise, alors c’est le signe que quelque chose ne va plus, et qu’il faut corriger la dérive du cœur. Il est remarquable que, sous les chênes de Mambré, Dieu s’intéresse à Sara. Il ne parle à Abraham que pour s’informer de sa femme, comme pour nous rappeler que le Seigneur voit ceux qui sont invisibles aux yeux du monde. Si l’on prend les moyens de contempler le regard de Dieu sur nous, alors nous n’avons plus besoin de nous rassurer en se comparant ou en se justifiant. Voilà un bon moyen de mesurer la justesse de notre prière : est-ce qu’elle augmente en nous l’unité ou bien est-ce qu’elle nous fait ruminer la division ?

Enfin, puisque la jalousie a remis Marthe au centre de ses propres préoccupations, vient le troisième piège : celui de la prise de pouvoir. « Dis-lui donc de m’aider » … Ainsi c’est le Seigneur qui devrait obéir à ses ordres ! Celui qui est servi devient celui qui doit servir, et surtout le serviteur devient le maître dans le subtil renversement du service en pouvoir ! Voilà pourquoi Jésus la remet à sa place. C’est peut-être le piège typique du dévouement que ce glissement vers la domination : l’humilité devient une manipulation masquée, la miséricorde devient condescendance et l’engagement se fait intransigeant. La seule manière d’éviter ce piège c’est sans doute le respect, ce qu’en termes spirituels on appelle l’adoration : se tenir devant Dieu là où il nous attend, à l’exemple de saint Paul qui rappelle aux Colossiens la présence du Christ, dans les souffrances comme dans le service, dans la mission comme dans l’accompagnement.

Loin d’être un désaveu de l’hospitalité ou des tâches ménagères, le dialogue entre Jésus et sainte Marthe est surtout un avertissement pour éviter les pièges du dévouement et veiller à ce que notre cœur se laisse guider par la sanctification, la contemplation et l’adoration qui ne sont pas d’abord des pratiques mais des manières d’être.

Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Etoile du matin qu’elle nous apprenne à garder les yeux fixés sur l’essentiel ; Miroir de la Sainteté de Dieu qu’elle nous montre comment nous enraciner dans le Christ ; Humble Servante du Seigneur qu’elle nous garde fidèles à la Parole pour que notre cœur batte au rythme du cœur de Dieu, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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