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12 janvier 2020 7 12 /01 /janvier /2020 14:10

NO-BA-A

Baptême du Seigneur - Année A

Depuis bien longtemps, on associe le baptême du Seigneur au mystère de Noël. C’est qu’il s’agit d’une théophanie, une manifestation de Dieu qui se présente aux hommes. Bien sûr cette scène, où se donnent à voir et à entendre le Père, le Fils et le Saint-Esprit, est l’une des manifestations les plus extraordinaires de la divinité, extraordinaire d’ailleurs non seulement par la présence des trois personnes divines, mais aussi par sa douceur et sa sobriété. Pourtant le plus étonnant dans cette histoire n’est peut-être pas la scène finale. 

Le premier étonné, c’est Jean Baptiste : « c’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! » Ne passons pas trop vite sur cet étonnement. La démarche que proposait Jean Baptiste, c’était une démarche de pénitence, il s’agissait de demander pardon de ses péchés. Or Jésus n’a aucun péché à se faire pardonner. En fait, c’est assez typique de la nouveauté de Noël : l’homme passe sa vie à essayer de se rapprocher de Dieu et voilà que c’est Dieu qui se rapproche de l’homme. Il faut accepter de se laisser surprendre par Dieu, il faut accepter qu’il ne soit pas là où on le pense, accepter que ce soit lui qui fasse ce qu’on estimait devoir faire. C’est même sans doute une des clés de la progression spirituelle que de consentir à ce renversement des rôles. Vous n’arrivez pas à prier ? Laissez l’Esprit Saint prier en vous ! Vous avez du mal à faire ce qu’il faudrait ? Remettez votre tâche entre les mains du Seigneur ! Vous désespérez de vos faiblesses ? Confiez-vous à la miséricorde de Dieu. Rappelons-nous qu’il est plus important d’accueillir Dieu qui vient à nous que de chercher à le rejoindre.

Mais l’explication que donne Jésus est aussi étonnante : « laisse faire pour le moment ». Cela suppose que les choses seront différentes plus tard ; et de fait, pour que Jean Baptiste soit sauvé il faudra qu’il soit baptisé dans la résurrection du Christ (comme tous les saints de l’ancien testament). Ainsi, il y a des choses divines qui doivent être faites d’une certaine manière à certains moments et d’une autre manière à d’autre moments ! Dieu se plie aux nuances du temps. Alors que nous avons souvent tendance à confondre l’éternité et l’immobilité, les paroles de Jésus à Jean Baptiste nous invitent à accueillir la grâce du moment. Ne tombons pas dans le piège de l’abstraction. Les choses ne sont pas subitement blanches ou noires : il faut du temps pour changer, il faut du temps pour progresser. Le Seigneur a accepté de se préparer pendant trente ans à sa mission et nous voudrions, nous, arriver à la sainteté en un instant ! Acceptons, pour nous, pour les autres et même pour Dieu de vivre chaque moment selon sa grâce.

Enfin la phrase de l’évangéliste pour décrire le baptême est également étonnante : « Jean le laissa faire ». Il y a une sorte de court-circuit entre celui qui agit et celui qui subit. Ceux qui regardaient le baptême de Jésus ont vu Jean agir, et pourtant Matthieu dit que Jean « laisse faire » Jésus. Voilà qui en dit long sur les relations entre l’action de Dieu et l’action de l’homme. On serait facilement enclins à penser que ce sont deux alternatives : si on laisse faire le Seigneur, on n’aurait qu’à attendre sans rien faire … mais ce n’est pas comme ça que ça marche : ce n’est pas Dieu ou nous, c’est Dieu et nous, et même Dieu à travers nous. Le baptême du Seigneur manifeste que nous sommes acteurs de la puissance divine. Alors, me demanderez-vous, comment faire la différence entre ce que nous faisons et ce que nous laissons Dieu faire, puisque dans les deux cas nous agissons ? La différence, c’est l’intention ou plus exactement l’esprit dans lequel nous agissons. C’est notre cœur qui fait la différence. Et les deux signes qui permettent de reconnaître la disposition de notre cœur, avant d’agir c’est l’obéissance et après l’action le détachement. Jean baptise Jésus parce que celui-ci le lui a demandé, même si personnellement il pense que ça aurait dû être le contraire : il agit par obéissance à la parole de Dieu ; et après le baptême Jean disparaît de la scène : on ne parle plus de lui, c’est Jésus qui est le centre de ce qui arrive. De même qu’après Noël, on ne parle plus de Marie ou de Joseph, mais de Jésus seulement : c’est lui que les bergers et les mages viennent adorer, même si les acteurs de la nativité étaient plutôt ses parents !

Le baptême du Seigneur est la manifestation de Dieu, mais ce n’est pas une manifestation spectacle qui se donne à voir, c’est une véritable révélation qui nous dévoile le mystère du cœur de Dieu. Il nous surprend, car c’est lui qui vient à nous, alors même que nous devrions aller à lui ; il se donne dans la subtilité du moment, alors même que nous l’imaginons immuable ; il agit à travers nous quand, par l’obéissance et le détachement, nous le laissons faire. 

Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Arche de la nouvelle Alliance qu’elle nous apprenne à accepter de nous laisser rejoindre par le Seigneur. Etoile du Matin qu’elle nous montre comment accueillir la grâce du moment. Humble Servante du Seigneur, qu’elle nous encourage à agir pour laisser faire la puissance de Dieu et qu’ainsi nous puissions entrer dans la joie de l’amour trinitaire, dès maintenant et pour les siècles des siècles. 

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