La Vocation de la famille
NO-SF-B
Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph - année B
Gn 15,1-6 ; 21,1-3 ; Ps 104 ; He 11, 8.11-12.17-19 ; Lc 2,22-40
Dans la grande semaine qui suit la Nativité du Seigneur, nous sommes invités à méditer et à approfondir le sens de ce qui a commencé dans la nuit de Bethléem. Et le dimanche c’est vers la Sainte Famille que nous tournons nos regards. Cette année, c’est donc l’évangile de la présentation au Temple qui nous est proposé.
C’est un récit dense qui offre de nombreux sujets de méditation, en particulier à travers les figures de Siméon et d’Anne qui témoignent de la vocation de l’enfant. Mais il y a un détail qui pourrait nous échapper, et ce serait dommage. On pourrait penser que les deux rappels de la Loi se rapportent à la même démarche : on imagine que Marie et Joseph offrent « un couple de tourterelles ou deux petites colombes » pour consacrer leur garçon premier né. Mais en fait l’offrande concerne la Purification de Marie et non pas la consécration de l’enfant. L’habitude était, en effet, que les parents, présentant leur enfant au Seigneur pour le consacrer, « rachètent » celui-ci avec une somme d’argent. On peut donc penser que Joseph et Marie viennent confier Jésus au Temple pour qu’il y soit élevé et qu’il serve Dieu depuis son plus jeune âge. Or voilà qu’on leur rend l’enfant : c’est à eux de l’élever, c’est à eux que le Seigneur confie le soin de veiller sur lui. Rien de plus normal, pensez-vous … et pourtant rien de plus admirable que ce message : ce n’est pas au Temple, mais c’est à la famille de former et d’éduquer le Serviteur de Dieu. La lumière des nations ne s’épanouit pas dans l’enceinte sacrée où l’on offre les sacrifices, mais au cœur d’une famille de Nazareth.
Là, dit l’évangéliste, « l’enfant grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui ». Voilà qui va nous permettre d’approfondir ce qu’on attend d’une famille. D’abord il s’agit de grandir et de se fortifier. Cela peut paraître bien banal, et pourtant nous savons combien cela suppose de soins attentifs. Il s’agit de nourrir et d’entourer. Les sciences modernes nous ont sensibilisé à l’importance d’une alimentation saine et équilibrée pour la croissance d’un enfant. Il ne s’agit pas de faire porter aux parents une charge excessive, et tout ne dépend pas d’eux, mais ils ont une vraie responsabilité : c’est un véritable engagement. Il y a quelque chose de la réalité de l’Incarnation qui se joue dans la sainte Famille. Pour que le Verbe fait chair puisse grandir et se fortifier, il a fallu que ses parents s’occupent de lui, le nourrissent et le soignent. C’est la condition de tout homme, c’est aussi la condition de Jésus.
Il était rempli de sagesse. Voilà une qualité qui ne nous surprend pas chez le fils de Dieu, mais elle met en lumière un autre aspect du rôle de la famille. A quoi servirait la sagesse si elle ne peut s’exprimer ? Ce n’est pas Marie et Joseph qui donnent à Jésus sa sagesse, mais ils doivent lui permettre de se manifester. Le rôle de la famille n’est pas d’être un moule où l’on fabrique des individus identiques, mais un terreau qui permet à chacun de déployer sa vocation. Il ne s’agit plus de donner ce qui est nécessaire, mais de permettre ce que le Seigneur attend de chacun. Et ce n’est pas le moindre défi pour des parents que d’accepter que leurs enfants soient différents d’eux ! C’est le défi de l’éducation qui n’est pas un formatage mais un accompagnement. C’est là que la famille dépasse le rôle nourricier, que l’on partage avec les animaux, pour devenir une réalité spécifiquement humaine permettant le déploiement de la personne. Une manière de coopérer à l’œuvre de Dieu, ce qui requiert humilité et disponibilité.
Enfin la grâce de Dieu était sur lui. Là encore cela ne nous surprend pas pour Jésus, même si l’on peut espérer que c’est le cas de chacun de nous. Mais qu’est-ce que cela implique pour la Sainte Famille ? Justement d’être sainte, c’est-à-dire accueillante et disponible à la grâce. Jésus ne grandit pas dans un sanctuaire de pierres, mais dans un sanctuaire d’amour, d’un amour qui prend sa source et son souffle en Dieu. Les paroles de Siméon à Marie désignent déjà le mystère Pâques, pour nous rappeler que la sainteté n’est pas un long fleuve tranquille mais la force d’un dépassement où les épreuves sont l’occasion d’un amour plus fort, comme elles étaient pour Abraham et Sarah l’occasion d’une foi plus grande. Et cette troisième dimension nous fait entrevoir combien la famille n’est pas seulement une institution naturelle ni un choix philosophique, mais une réalité spirituelle. En grandissant dans une famille, Jésus assume notre condition humaine, et révèle la vocation de toute famille à la sainteté.
En ce dimanche de la Sainte Famille, nous ne contemplons pas seulement un aspect du mystère de Noël, mais nous sommes invités aussi à découvrir la vocation de nos familles. Un lieu où l’on se donne et prend soin de chacun ; un lieu où l’on s’accompagne et où l’on reçoit les uns des autres ; un lieu qui nous tourne vers le don de Dieu pour que nous devenions le sanctuaire de la présence du Seigneur.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Secours des Chrétiens qu’elle veille sur nous comme elle a veillé sur Jésus ; Mère du Bon conseil qu’elle nous accompagne pour que nous puissions déployer le don de Dieu ; Porte du Ciel qu’elle nous rende disponibles à la présence de Celui qui est venu partager notre condition humaine pour que nous puissions partager sa gloire, dès maintenant et pour les siècles des siècles.
Le Seigneur est avec toi
4AVB
4° Dimanche de l'Avent - Année B
2 S 7,1-5.8b - 12.14a.16 ; Ps 88 ; Rm 16, 25-27 ; Lc 1,26-38
Cette année le calendrier liturgique est un peu serré : la quatrième semaine de l’Avent est réduite à sa plus simple expression : nous sortirons du quatrième dimanche pour entrer dans les célébrations de Noël. C’est dire que nous n’aurons pas beaucoup de temps pour méditer les textes que nous venons d’entendre ! Ce n’est pas pour autant qu’ils ne doivent pas préparer nos cœurs au mystère que nous allons célébrer. Il nous a été présenté deux grandes figures de l’histoire du salut : le roi David et la Vierge Marie. Or les deux récits commencent par la même remarque du prophète Nathan comme de l’ange Gabriel : « le Seigneur est avec toi ». Puisque nous allons fêter la naissance de l’Emmanuel – « Dieu avec nous », prenons le temps de voir comment nous pouvons vivre cette affirmation « le Seigneur est avec toi ».
D’abord c’est une présence discrète qui ne s’impose pas et qui ne se revendique pas. On peut noter que chaque fois c’est un autre qui remarque la présence de Dieu auprès de la personne. Parce qu’elle est discrète, la présence divine peut être ignorée ou négligée. Et nous savons, hélas, combien certains mettent tant d’efforts à gommer toute allusion à Jésus à l’occasion des fêtes qui deviennent celle de la fin d’année plutôt que celles de Noël. Souvent, même dans les familles, on considère que les célébrations religieuses viennent troubler les festivités familiales. Alors que l’on fête la présence de Dieu parmi nous, ceux qui la reconnaissent doivent s’effacer devant ceux qui l’ignorent ! « Le Seigneur est avec toi » est déjà un rappel du sens de Noël, une invitation à ne pas négliger celui nous rassemble et qui nous accompagne.
Pourtant il pourrait y avoir un contresens, celui que découvre le prophète Nathan. Que dit-il au roi David ? « Fais ce que tu veux puisque le Seigneur est avec toi ». Comme si la présence de Dieu était une assurance ou une permission. Mais la parole du Seigneur adressée à Nathan dans la nuit vient renverser les choses : ce n’est pas David qui construira une maison pour Dieu, c’est Dieu qui construira une maison pour David. La présence de Dieu n’est pas un instrument au service de nos projets, mais une invitation à participer à son projet. Trop souvent nous demandons à Dieu d’être d’accord avec nous, alors que c’est nous qui devons être d’accord avec lui. Demander une bénédiction, ce n’est pas demander que Dieu accepte ce que nous voulons faire, c’est demander que nous fassions la volonté de Dieu. Que de fois dans l’histoire du monde, comme dans notre cœur, nous avons fait de la présence de Dieu un étendard au lieu de la reconnaître comme une responsabilité.
C’est bien l’exemple que nous donne Marie dans le récit de l’Annonciation : « voici la servante du Seigneur ». Elle manifeste ainsi sa disponibilité à la présence de Dieu. Mais la suite de sa réponse nous dévoile un autre aspect important, celui du consentement : « que tout m’advienne selon ta parole ». Aux premières paroles de l’ange, elle avait demandé « comment cela va-t-il se faire ? » et l’on comprend que c’est une manière de dire : « qu’est-ce que je dois faire ? ». Et la réponse de Gabriel est admirable : « l’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre », en d’autres termes : « tu n’as rien à faire, juste à te laisser faire ». Une dynamique semblable à celle que dévoilait la réponse de Dieu au projet de David. La présence du Seigneur est une présence agissante qui nous propose de la laisser agir. Et il est souvent plus exigeant de se laisser faire que de faire soi-même !
Au moment où nous nous apprêtons à fêter la naissance de l’enfant dans la crèche, laissons retentir en nous la salutation « le Seigneur est avec toi ». C’est le rappel d’une présence qu’on pourrait négliger ; ce n’est pas un privilège mais une invitation ; une invitation à le laisser agir en faisant une place toujours plus grande à sa présence et sa puissance dans nos cœurs et dans nos vies.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Porte du Ciel qu’elle nous rende attentifs à la présence du Seigneur ; Trône de la Sagesse qu'elle nous apprenne à servir celui qui nous accompagne ; Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle nous rende disponibles à la puissance du Très-Haut pour que se déploie en nous le don de Dieu et que nous puissions demeurer en lui comme il demeure en nous dès maintenant et pour les siècles des siècles.
La joie de la germination
3AVB
3* Dimanche de l'Avent - Année B
Is 61,1-2a.10-11 ; Lc 1,46-54 ; 1 Th 5,16-24 ; Jn 1,6-8.19-28
Parmi les nombreuses traditions de l’Avent, nous avons en Provence, la coutume du blé de la Sainte Barbe qui peut nous aider à accueillir la parole du prophète Isaïe entendue dans la première lecture : « comme la terre fait éclore son germe, et le jardin, germer ses semences, le Seigneur Dieu fera germer la justice et la louange devant toutes les nations ». Cette image de la germination nous permet aussi de mieux comprendre la joie à laquelle nous invitait l’antienne d’ouverture : « Soyez toujours dans la joie du Seigneur, je le redis : soyez dans la joie. Le Seigneur est proche ». Voyons ce que peut nous apprendre la joie de la germination pour vivre ce temps qui nous prépare à Noël.
La germination est d’abord une promesse qui a déjà commencé. Il ne s’agit pas d’une promesse illusoire ou trompeuse, mais d’une parole qui est déjà en train de se réaliser. Et cela implique une certaine anticipation de ce qui est promis. Si vous plantez un arbre, sans penser à ce qu’il sera dans quelques années, vous risquez fort de le planter trop près de la maison ! Ainsi la germination invite à ne pas vivre dans l’impulsion de l’instant, mais à laisser l’avenir guider le présent. La joie de la germination est une joie par anticipation qui se nourrit de ce qui vient. Aussi le temps de l’Avent nous invite à ne pas nous laisser conduire par les caprices du désir ou l’éphémère de l’émotion, mais par la contemplation de la Parole de Dieu. C’est le temps par excellence pour méditer la Parole du Seigneur, pour la lire et la découvrir, pour la scruter et l’explorer, pour la garder et la ruminer.
Mais la germination demande aussi du discernement. Dans notre impatience nous risquons de négliger la justice et la louange qui commencent à éclore. La graine est si différente de la plante épanouie ! Il est si facile d’être dans la situation que dénonçait Jean Baptiste : « au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas ». Voilà pourquoi saint Paul avertit : « n’éteignez pas l’Esprit […] discernez la valeur de toute chose : ce qui est bien, gardez-le ; éloignez-vous de toute espèce de mal ». La joie de la germination est aussi une joie qui choisit de s’attacher à certaines choses plutôt qu’à d’autres. Si Dieu nous avertit de sa venue, ça n’est pas pour que nous y restions indifférents ! Aussi le temps de l’Avent est encore un temps de prière, un temps où nous laissons l’Esprit Saint éclairer nos cœurs et nos esprits pour que nous puissions reconnaître ce qui mérite notre attention, ce qui vient du Seigneur et ce qui conduit en sa présence.
Enfin la germination demande encore de la vigilance. La semence est fragile, et elle a besoin qu’on en prenne soin. Comment la plante grandirait si on ne l’arrose pas ? si elle n’est pas placée dans les conditions qui permettent qu’elle s’épanouisse. Ce n’est pas nous qui faisons germer la graine et pousser la fleur, mais nous pouvons l’en empêcher ou la favoriser. Ce n’est pas parce que nous ne dirigeons pas que nous ne pouvons rien faire. La joie de la germination est une joie décidée, qui nous implique et nous engage. C’est ainsi qu’il nous appartient de préparer les chemins du Seigneur, comme le criait Jean Baptiste dans le désert. Nous attendons le Merveilleux Conseiller, et nous préparons son chemin en nourrissant les germes de la sagesse par l’humilité ; nous attendons le Dieu-fort, et nous préparons son chemin en nourrissant les semences de la force par les efforts ; nous attendons le Père à jamais, et nous préparons son chemin en nourrissant les germes de l’amour par la générosité ; nous attendons le Prince de la Paix, et nous préparons son chemin en nourrissant les semences de la paix par le pardon. Le temps de l’Avent est bien un temps de conversion pour que la justice et la louange puissent germer là où nous sommes et éclore devant toutes les nations.
Nous voilà donc invités à entrer dans la joie de la germination. Une joie qui anticipe la promesse en s’attachant à la parole du Seigneur ; une joie qui choisit la justice en se laissant éclairer par l’Esprit ; une joie qui décide la louange en prenant soin du don de Dieu.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle nous apprenne à accueillir la promesse avec confiance. Mère du bon conseil qu’elle nous rende disponibles au souffle de l’Esprit Saint. Rose mystique qu’elle épanouisse en nous ce que Dieu a semé pour que nous puissions accueillir sa présence et revêtir les vêtements du salut, dès maintenant et pour les siècles des siècles.
Quelle attente en Avent ?
2AVB
2° Dimanche de l'Avent - Année B
Is 40,1-5.9-11 ; Ps 84 (85) ; 2 P 3,8-14 ; Mc 1,1-8
Nous savons que le temps de l’Avent est un temps d’attente, un temps qui nous invite à fixer nos cœurs sur ce qui va venir et qui n’est pas encore. On pense bien sûr aux célébrations de Noël, mais il n’y aurait pas de raison d’en faire un temps liturgique, si ça n’était qu’une affaire chronologique. Le souvenir de la naissance de Jésus nous invite à attendre son retour dans la gloire. Ainsi l’Avent nous propose de vivre dans l’attente de la présence du Seigneur. Encore cela reste-t-il des grands mots un peu abstraits. C’est pourquoi les différents textes que nous venons d’entendre nous présentent différents aspects de cette présence pour nous aider à mieux comprendre la nature de cette attente.
D’abord l’oracle d’Isaïe. Il commence par un appel « Consolez mon peuple ». La présence du Seigneur est donc une consolation, on l’attend comme on attend une délivrance. C’est une attente qui se vit dans l’espoir, c’est-à-dire dans le refus de la résignation. Malheureusement la vie ne manque pas de difficultés et de souffrances. A l’époque d’Isaïe, il s’agissait de l’exil et de l’esclavage à Babylone, mais il n’est pas nécessaire de se retrouver dans une situation aussi dramatique pour attendre une consolation. N’avons-nous pas trop d’occasion de regretter des ravins qui nous privent de ce que nous voulons, des montagnes qui fatiguent notre marche, des escarpements qui réduisent nos possibilités ? Attendre la présence du Seigneur comme une délivrance, c’est déjà ne pas baisser les bras devant les difficultés, relever la tête plutôt que de courber le dos, ne pas se résigner à l’injustice ni au péché, puisque nous avons besoin que Dieu règne dans le monde comme dans nos cœurs.
Ensuite il y avait la lettre de saint Pierre qui précisait : « ce que nous attendons, selon la promesse du Seigneur, c’est un ciel nouveau et une terre nouvelle ». La présence du Seigneur est une nouveauté, on l’attend comme on attend une promesse. C’est une attente qui s’appuie sur la confiance et qui s’exprime par une sorte d’anticipation pour préparer ce qui va venir. C’est pourquoi la Parole de Dieu est si importante pendant le temps de l’Avent. Comment attendre ce qu’on a oublié ? Comment préparer ce qu’on ne désire pas ? C’est en méditant la parole de Dieu que l’on peut contempler le ciel nouveau et la terre nouvelle que l’on attend ; c’est en se laissant guider par cette parole qu’on peut vivre dans la sainteté et la piété, comme nous y invitait l’apôtre. Attendre la présence du Seigneur comme une promesse, c’est grandir dans la foi, creuser le désir du règne de justice, et hâter l’avènement du jour de Dieu en s’attachant à ce qui vient plutôt qu’à ce qui disparaitra.
Enfin, il y avait le témoignage de Jean le Baptiste dans l’évangile. S’il invite à un baptême de conversion, il avertit : « voici venir celui qui est plus fort que moi […] moi je vous ai baptisé avec de l’eau ; lui vous baptisera dans l’Esprit Saint ». Ainsi ce qu’il propose n’est qu’un début. La présence de Dieu est un accomplissement, on l’attend comme on attend une plénitude. Il y a quelque chose du semeur dans l’attitude du Baptiste. Et c’est encore un aspect du temps de l’Avent qu’on pourrait illustrer par la coutume provençale du blé de la Sainte Barbe. Une manière de se rappeler que Dieu ne vient pas de nulle part, mais qu’il épanouit ce que nous avons semé. L’attente d’une plénitude n’est pas une idée, elle est un engagement et une vigilance pour que le temps déploie ce qui a commencé. Comment attendre le Prince de la Paix si nous ne voulons pas apaiser nos conflits ? Ce n’est pas nous qui apporterons la paix dans le monde, mais nous pouvons déjà être des artisans de paix, de ceux dont Jésus dit qu’ils sont appelés fils de Dieu.
Puisque nous sommes entrés dans le temps de l’attente, attendons la venue du Seigneur qui vient nous consoler en nous ouvrant à l’espérance ; attendons la venue du Seigneur qui accomplit la promesse en progressant dans la foi ; attendons la venue du Seigneur qui est plénitude de sa présence en nous engageant dans la charité
Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette Parole et à la mettre en pratique. Consolatrice des affligés qu’elle nous fortifie dans les épreuves et nous détourne du péché. Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle nous attache toujours plus à la Parole du Seigneur. Mère du Bel Amour qu’elle nous encourage à semer ce que nous attendons pour que nous puissions demeurer en Dieu comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.
Si le veilleur ne veille pas
1AVB
1° Dimanche de l'Avent - Année B
Is 63, 16b-17.19b ; 64,2b-7 ; Ps 79 ; 1 Co 1,3-9 ; Mc 13,33-37
« Prenez garde, restez éveillés », « Veillez donc », « ce que je vous dis là, je le dis à tous : Veillez ! ». Si l’évangile répète aussi souvent cette invitation de Jésus, on doit pouvoir conclure sans trop se tromper qu’il s’agit là de l’idée principale du texte. Ce n’est pas non plus une surprise, puisque l’invitation à veiller est le maître-mot de l’Avent.
Jésus raconte une parabole pour faire comprendre la situation. « Il en est comme d’un homme parti en voyage ». Il laisse sa maison à ses serviteurs, fixant à chacun ce qu’il doit faire. Il ne dit pas combien de temps il sera absent, mais il dit qu’il reviendra ! Le maître n’est pas mort, il n’a pas abandonné sa maison : il l’a confiée pour un temps. Ainsi nous sommes dans le monde comme ces serviteurs dans la maison. Si Dieu est absent ce n’est pas qu’il n’existe pas ou qu’il ne s’intéresse pas à notre monde, c’est qu’il nous a confié tout pouvoir et nous a fixé à chacun une tâche ! Alors imaginons ce qui se passe, s’il n’y a plus de veilleur.
Tout d’abord il peut y avoir le cas du serviteur qui s’installe dans la maison, à la place du maître. Il va dormir dans sa chambre, lire son courrier et ses dossiers, et il finit par utiliser sa garde-robe. Mais il est plus petit que le maître et n’a pas son instruction. Alors il s’étonne de ne rien comprendre à ce qu’il lit, d’être gêné par des vêtements trop grands … Voilà la situation de l’homme qui se croit le maître du monde, qui agit comme un propriétaire comme si Dieu n’existait pas. La nature des choses vient vite lui rappeler dramatiquement l’orgueil démesuré de sa position : le réchauffement climatique, l’instabilité politique et économique mondiale, les virus de toutes sortes s’imposent à lui et créent des déceptions à la mesure de son arrogance.
Il y a aussi le serviteur qui agit comme l’homme au talent enfoui … puisque le maître n’est pas là, il va négliger ses affaires. La poussière s’accumule, les champs ne sont plus cultivés, les factures ne sont plus payées. Petit à petit la maison ressemble au château de la belle au bois dormant, mais ça n’est pas le serviteur négligeant que le prince charmant viendra réveiller d’un baiser ! Voilà la situation de l’homme qui a oublié la Parole de Dieu et la mission qui lui a été confiée. La vie s’affaiblit peu à peu pour laisser place à la fatalité, au poids du temps et de l’histoire. L’homme devient le jouet des astres et du hasard et qui le conduisent au désespoir de l’usure et de la mort.
Il y a enfin le serviteur qui fait son travail mais qui n’attend plus le maître. Il fait les choses qui doivent être faites, mais il ne sait pas pourquoi. Sa vie devient machinale et son ouvrage routinier. Il ressemble de plus en plus à un robot, il mène une existence sans âme, sans goût sans intérêt. C’est la situation de celui qui n’a pas le désir de Dieu, qui ne sait plus pourquoi il vit et qui vit sans attendre, sans espoir … sa vie n’a pas de sens parce qu’il n’en voit pas le but, il ne sait pas où il va.
Au contraire, le veilleur n’oublie pas qu’il est au service et qu’un autre lui a fait confiance. S’il a des pouvoirs, ce n’est pas pour lui : il sait qu’il devra en répondre. Sa responsabilité ne le gonfle pas d’orgueil mais l’invite à humilité. Le veilleur ne se décourage pas d’attendre et ne laisse pas au temps le soin de garder ce qu’on lui a confié. C’est en s’engageant qu’il veille pour être fidèle à la mission reçue. Le veilleur ne se contente pas d’être là, il nourrit son attente du désir de revoir le maître. C’est ce désir qui lui rappelle le sens de ce qu’il fait et lui donne le goût de le faire.
Pendant ce temps de l’Avent, nous nous préparons à célébrer la venue du Seigneur. Le souvenir de Noël nous rappelle que le Christ doit revenir, qu’il n’a pas quitté le monde, mais que nous l’attendons et qu’il faut nous préparer à son retour. C’est un temps où nous nous efforçons de rester dans l’attitude du veilleur. Nous avons cette année quatre dimanches et trois semaines pour accueillir l’invitation à veiller dans une triple conversion. Conversion de l’humilité qui nous rappelle que le monde n’est pas à nous et que nous devrons en répondre devant Dieu. Conversion de l’engagement qui nous rappelle que Dieu compte sur nous pour prendre soin de ce qu’il nous a confié. Conversion de la contemplation pour creuser en nous le désir de Dieu. Par un effort de prière, de méditation de la parole de Dieu et d’attention à ceux qui nous entourent nous sommes invités à veiller, à attendre avec toujours plus d’impatience la venue du Seigneur.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entrer dans cette préparation à Noël avec détermination et enthousiasme. Arche de la Nouvelle Alliance, Etoile du Matin, et Mère de l’Espérance, que sa prière et son exemple nous permettent de demeurer fidèles à la Parole de Dieu, pour que prenant soin de ce qu’il nous a confié, nous soyons prêts à accueillir le Seigneur lors de sa venue et dignes de demeurer avec lui dans les siècles des siècles.