Qu'est-ce que veiller ?
1AVA
1er dimanche de l'Avent - Année A
Is 2,1-5 ; Ps 121 ; Rm 13,11-14 ; Mt 24,37-44
Nous entrons dans le temps de l’Avent, celui qui nous prépare à Noël. Ou plus exactement, le temps qui précède Noël. Car il pourrait y avoir un contresens sur la spiritualité de l’Avent. Nous pourrions penser qu’il s’agit seulement d’organiser les préparatifs d’une fête. Bien sûr nous savons que la préparation n’est pas seulement matérielle, et qu’il y a une préparation spirituelle qui est plus importante. Mais en vérité, si l’on écoute bien les textes de ce jour, il ne s’agit pas vraiment de purifier les cœurs comme on décore les maisons. Le but de l’Avent n’est pas de nous disposer à fêter dignement la nativité du Seigneur, mais plutôt de nous rappeler d’être prêt au jour du Seigneur. Le souvenir de sa première venue nous apprend à attendre la seconde venue, celle qu’annonce le prophète Isaïe, celle dont parle Jésus dans l’évangile. Ainsi la tonalité de ce temps n’est pas « préparez-vous » mais « veillez ».
Veiller c’est éviter de se retrouver comme aux temps de Noé : « les gens ne se sont doutés de rien jusqu’à ce que survienne le déluge qui les a tous engloutis ». Il s’agit donc d’être attentif, de ne pas se laisser distraire ni par l’ordinaire de la vie, ni par les événements de l’histoire. Qu’est-ce qui faisait la différence entre Noé et les gens de son époque ? Lui aussi mangeait et buvait, et il s’était marié, comme ses enfants d’ailleurs. Peut-être le faisait-il avec un peu plus de sobriété que d’autres, mais la différence, c’est qu’il écoutait la Parole de Dieu et qu’il la mettait en pratique dans sa vie. Y compris quand elle lui a demandé de construire une arche au milieu de nulle part ! Si nous voulons faire du temps de l’Avent, un temps de veille, il faut s’attacher à entendre et à écouter la parole. Sans se laisser distraire ! L’Avent est le temps par excellence pour replonger dans la Parole de Dieu, pour faire comme Marie, en retenant tout cela et en le gardant dans notre cœur. Prenons une résolution vis-à-vis de la Parole : choisissons une manière de lui être plus proche, en lisant un livre de la Bible dans son entier, ou bien en consacrant plus de temps à la méditation des textes du jour par exemple, ou encore en choisissant un verset comme devise de la journée.
Veiller, c’est encore se trouver du bon côté lorsque l’un sera pris et l’autre laissé. Ces paroles sont un peu mystérieuses. On ne sait pas bien s’il faut être pris ou laissé, et surtout on ne sait pas pourquoi l’un et pris l’autre laissé puisque les deux font la même chose. Mais on peut comprendre qu’il y a une différence intérieure : l’un est disponible, l’autre ne l’est pas. Il s’agit donc d’être disponible. A quoi ? A la présence de Dieu certainement. Une présence évidente, manifeste, une présence nouvelle que nous ne connaissons pas encore. Comment se rendre disponible à la présence de Dieu ? Sans doute en intensifiant notre prière. Ceux qui n’ont jamais le temps de prier peuvent décider de dégager un moment pour cela. Ceux qui ne prient que de temps en temps peuvent choisir d’avoir un moment plus régulier pour que la prière rythme leur journée. Ceux qui ont l’habitude de prier peuvent découvrir une autre forme de prière, celle qui irrigue notre vie, qui accompagne tout ce que nous faisons. Où que nous en soyons dans la vie spirituelle, le temps de l’Avent est un temps où nous laisserons un peu plus de place au Seigneur.
Veiller, c’est enfin, éviter de faire comme le maitre de maison surpris par un voleur. S’il avait veillé, il n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison. Il y a donc une dimension d’anticipation dans la veille. Une manière de vivre en prévision de ce qui va arriver. C’est pourquoi saint Paul conseille : « Conduisons-nous comme on le fait en plein jour » … L’Avent est un temps pour anticiper le jour du Seigneur. Pour vivre comme s’il était déjà là. Pour faire ce que nous faisons en présence de Dieu. C’est pourquoi c’est un temps de conversion, parce qu’il y a des moments où nous agissons comme si Dieu n’existait pas. N’hésitons pas à faire ce petit exercice de repérer les domaines de notre vie que nous laissons hors de la présence de Dieu.
Nous entrons dans le temps de l’Avent qui n’est pas d’abord celui du décompte des jours ou de la décoration des maisons, mais le temps de la veille. Le temps où nous sommes plus attentifs à la Parole de Dieu, le temps où nous laissons plus de place à la prière, le temps où nous essayons de vivre comme si l’on était déjà dans la gloire de la Présence de Dieu.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous accompagne pendant ce temps de veille. Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle nous apprenne à nous laisser façonner par la Parole de Dieu. Buisson Ardent qu’elle nous rende plus disponible à la présence du Seigneur. Rayonnement de joie qu’elle nous encourage à vivre déjà dans la lumière de la Gloire qui nous est promise, dès maintenant et pour les siècles des siècles.
de l'espérance à l'attente
XR-C
Christ Roi de l'Univers - Année C
2 S 5,1-3 ; Ps 121 (122) ; Col 1,12-20 ; Lc 23, 35-43
La fin de l’année liturgique est marquée par la fête du Christ Roi de l’Univers. Je ne pense pas que ce soit manquer de respect aux mystères divins, ni dénigrer la piété du peuple de Dieu que de remarquer que cela ne nous inspire pas une dévotion débordante. Il faut reconnaître que pour la plupart d’entre nous, il s’agit d’un dimanche comme un autre ! Et ce n’est pas l’évangile que nous venons d’entendre qui va nous inciter à avoir une conscience plus aiguë de la solennité de ce jour ! En matière de royauté il ne nous est guère donné à contempler que la croix comme trône, des épines pour couronne et les moqueries des chefs et des soldats comme acclamations triomphales !
Pourtant il y a une personne dans la scène que nous venons d’entendre qui a reconnu la royauté du Christ : c’est le bon larron … celui qu’on appelle traditionnellement Dismas (dont la mémoire est inscrite au 25 mars, ce qui fait qu’on ne la fête jamais, puisque c’est le jour où l’on célèbre l’Annonciation). Non seulement cet homme reconnaît la royauté du Seigneur, mais il lui fait hommage puisqu’il lui demande « souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume ». Cette dernière prière et la réponse de Jésus nous éclairent sur la véritable nature du Règne de Dieu.
D’abord il s’agit d’un futur : « quand tu viendras » demande Dismas ; « tu seras » répond Jésus. Nous-mêmes, dans le Notre Père, nous demandons « que ton Règne vienne ». Il ne s’agit donc pas d’un constat mais d’une perspective. Sans doute peut-on nuancer entre la Royauté, le Royaume et le Règne. Par exemple, un roi peut ne pas régner ou régner sur une partie seulement de son Royaume. Et c’est sans doute l’erreur majeure que font les chefs ou les soldats : croire que le règne est présent alors qu’il est à venir. Mais nous-mêmes est-ce que nous n’avons pas aussi cette impatience ? Est-ce que nous ne souhaiterions pas que la Royauté du Christ soit déjà manifestée ? Quand nous rêvons de vivre dans un monde parfait, quand nous attendons de Dieu qu’il règle tous nos problèmes tout de suite, nous cherchons un règne présent au lieu d’espérer le règne qui vient. L’impatience, c’est confondre « je veux » et « je fais » et penser donc que si Dieu ne fait pas c’est qu’il ne veut pas … Reconnaître dans la croix du Christ le trône du Roi de l’univers, c’est accepter de ne pas vivre dans l’immédiateté, c’est entrer dans le déploiement d’une promesse, être attentif à la germination du mystère.
Il y a aussi quelque chose d’imminent. « Aujourd’hui » dit Jésus : il s’agit donc d’un futur proche et non pas d’un futur lointain. Quelles conséquences ? Cela donne une note d’urgence qui interpelle et demande à ce qu’on se mobilise. Un futur lointain, on peut se dire « on a encore le temps », ou « on verra plus tard ». Alors qu’un futur proche nous dit « c’est le moment », « soyez prêts » ou encore « le temps est compté ». Ce n’est plus le temps de se disperser mais de se préparer. Le futur lointain risque d’être théorique et abstrait, tandis que le futur proche est beaucoup plus pratique et concret. La fête du Christ Roi de l’Univers nous invite à passer de l’espérance à l’attente … on comprend pourquoi elle se situe au terme du temps ordinaire, au seuil de l’Avent.
Enfin, il y a le caractère universel du Royaume. Dans l’évangile, l’évocation du « roi des juifs » a quelque chose d’incomplet, car Jésus n’est pas que le roi des juifs, il est le roi de l’univers. C’est la deuxième lecture, la lettre de saint Paul aux Colossiens qui nous le rappelait. Rien ni personne n’est exclu de cette royauté. Ne nous égarons pas à rechercher ce qu’implique pour nous le fait que les êtres invisibles relèvent du Royaume de Dieu, mais vérifions déjà que tout notre univers est concerné par le Christ. Est-ce qu’il n’y a pas tel ou tel domaine de notre vie dont nous pensons que cela n’a rien à voir avec la foi ? Ne sommes-nous pas tentés de soustraire au règne de Dieu telle ou telle partie de nos activités ou de nos préoccupations ? En reconnaissant que sa condamnation est juste, le bon larron remet sous la lumière du Christ les aspects les moins glorieux de son existence, et c’est ainsi qu’il peut entrer dans le Royaume puisque c’est le pardon des péchés qui en est la porte.
Sans doute la fête du Christ Roi de l’univers n’est-elle pas la célébration la plus populaire des mystères du Seigneur, pourtant nous aurions tort de la négliger, car elle nous rappelle ce vers quoi nous allons, elle nous invite à nous y préparer, en remettant tout ce qui fait notre vie sous le regard du Christ.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Etoile du Matin qu’elle oriente nos vies vers le Royaume de Dieu pour que nous grandissions dans l’espérance. Porte du Ciel qu’elle réveille notre attente pour que nous soyons prêts à rencontrer le Roi que nous suivons dans la foi. Mère du Bel amour qu’elle éclaire tout ce que nous sommes pour que nous élargissions notre charité et que nous puissions entrer dans la plénitude du Règne dès maintenant et pour les siècles des siècles.
Les faux signes
33TOC
33° Dimanche du Temps Ordinaire - Année C
Ml 3, 19-20a ; Ps 97 (98) ; 2 Th 3,7-12 ; Lc 21, 5-19
L’année liturgique se termine la semaine prochaine. Dans quinze jours nous entrons dans l’Avent qui commence un nouveau cycle de célébration et de méditation des mystères du Seigneur. Et comme tous les ans, les textes qu’on lit à la fin de l’année liturgique évoquent la fin des temps. Ce n’est pas forcément une mauvaise nouvelle puisque nous sommes invités à contempler la plénitude de la présence et de la puissance de Dieu. Mais comme le rappelait le prophète Malachie dans la première lecture, l’avènement du jour du Seigneur implique aussi la destruction de ce qui lui est opposé. Comme on est parfois plus habitués à ce qui n’est pas Dieu plutôt qu’à ce qui est Dieu, il n'est pas inutile de se préparer pour se trouver du bon côté au bon moment ! Et il ne s’agit pas de faire comme ceux qu’évoquent saint Paul et qui attendaient le jour du Seigneur en se laissant vivre, profitant des autres. En revanche, c’est sans doute pour avoir le temps de se préparer que l’on demande à Jésus, dans l’évangile : « quel sera le signe que cela est sur le point d’arriver ? ».
Or, si l’on scrute bien les paroles de Jésus, sa réponse est très surprenante. Sans doute avez-vous remarqué qu’il annonçait un tas de choses désagréables, pourtant chaque fois il relativise : « ce ne sera pas aussitôt la fin » et encore « avant tout cela ». Donc si l’on comprend bien ce que le Seigneur dit, les signes qu’il donne, ne sont pas les signes de la fin ! Il parle des faux prophètes et des usurpateurs, des catastrophes et des persécutions, mais chaque fois il dit que ce n’est pas le signe ! Au lieu de donner les signes du Jour du Seigneur, il met en garde contre les faux signes. Finalement, le seul conseil qu’il donne pour se préparer c’est la conclusion de l’évangile : « par votre persévérance, vous garderez votre vie ».
Ainsi il y a d’abord les faux prophètes, ceux qui se font passer pour Dieu ou qui annoncent l’imminence de la fin. Et tout au long de l’histoire il n’a pas manqué d’homme soi-disant providentiel ou de prophètes de malheur. Que ce soit pour rassurer ou pour affoler, chaque époque a ses peurs et ses espoirs. Mais Jésus nous avertit de ne pas nous laisser égarer. En la matière, la persévérance, c’est la fidélité à sa parole. C’est elle qu’il faut garder, c’est elle qu’il faut suivre. Et ça n’est pas parce que quelqu’un se réclame de l’évangile qu’il lui est fidèle … la triste actualité nous rappelle que les prédicateurs les plus brillants ne sont pas toujours les plus recommandables ! C’est à l’évangile que nous devons nous attacher, c’est dans notre fidélité à la Parole de Dieu que nous devons persévérer pour éviter de nous laisser égarer par les faux prophètes ou les charlatans !
Ensuite il y a les catastrophes. Qu’elles viennent de la bêtise des hommes ou des caprices de la nature, elles sont spectaculaires ! Naturellement, quand on est pris dans la tourmente d’une guerre, d’une famine, d’une épidémie ou d’un tremblement de terre, on pense instinctivement que c’est la fin de tout. Il est facile de se décourager ou de se résigner dans ce genre de moment. Et pourtant Jésus nous avertit : « ne soyez pas terrifiés : il faut que cela arrive d’abord ». Une manière de viser le beau temps après la pluie, de ne pas oublier le calme qui viendra après la tempête. Dans les catastrophes, la persévérance c’est la confiance qui nourrit la résistance. Confiance dans le mystère de Pâques qui nous rappelle que de tout mal peut sortir un bien, et que c’est ce bien que Dieu veut pour nous. Là encore, l’actualité de ces dernières années peut nous permettre de vérifier en quoi ou en qui nous avons mis notre confiance !
Enfin Jésus évoque les persécutions. Au moment où saint Luc écrit son évangile, elles sont déjà bien d’actualité, et elles le seront pour de nombreux siècles ! C’est peut-être l’épreuve la plus difficile car lorsqu’elle survient, elle nous concerne personnellement au plus intime de nous. Et pourtant Jésus nous donne les moyens de résister. « Vous n’avez pas à vous préoccuper de votre défense », « je vous donnerai un langage et une sagesse », « pas un cheveu de votre tête ne sera perdu ». Il nous invite donc à cette persévérance qui est fermeté. Quand on a peur, ce n’est pas le moment de lâcher la main qui nous conduit, mais c’est le moment de la serrer plus fort. Il nous appartient donc de rester fermement unis au Seigneur, surtout quand on cherche à nous en séparer.
Ainsi les faux prophètes, les catastrophes ou les persécutions ne sont pas les signes de la fin du monde mais des moments de persévérance. Persévérer dans la fidélité à la Parole de Dieu, persévérer dans la confiance en la Providence, persévérer dans la fermeté de notre communion au Christ. C’est ce que résumait sainte Thérèse d’Avila dans sa prière : « Que rien ne te trouble, que rien ne t’effraie. Tout passe, Dieu ne change pas. Qui tient à Dieu ne manque de rien. Dieu seul suffit ».
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Etoile du Matin qu’elle nous préserve de nous laisser égarer par les faux prophètes ; Secours des chrétiens qu’elle nous préserve du découragement et de la résignation ; Reine des martyrs qu’elle nous soutienne dans les difficultés pour que nous puissions témoigner que le Christ est notre Vie, dès maintenant et pour les siècles des siècles.
Le piège des sadducéens
32TOC
32° Dimanche du Temps Ordinaire - Année C
2 M 7,1-2.9-14 ; Ps 16 (17) ; 2 Th 2,16-3,5 ; Lc 20, 27-38
Il y a quelque chose de diabolique dans la question des sadducéens. Peut-être n’est-ce pas de la mauvaise volonté et qu’ils ont inventé cette histoire pour discuter avec Jésus de la compatibilité de la résurrection avec la loi, comme ils l’auraient fait avec tout autre rabbin pharisien. Mais l’histoire repose sa question lancinante. Et comme Jésus répond en disant qu’à la résurrection on ne prend ni femme ni mari, certains époux se désolent à l’idée que leur couple puisse être séparé dans l’éternité ! Faut-il alors renoncer à déployer une spiritualité conjugale si le mariage n’est qu’une affaire temporelle ?
Le problème c’est qu’on se laisse piéger par une histoire imaginée, par une fausse problématique et par une conception très différente des choses qui n’a rien à voir avec notre foi et notre vision du monde ! Pour s’en persuader, essayons de nous mettre dans l’esprit des sadducéens et posons-nous quelques questions. D’abord pourquoi sept frères ? la question ne se pose-t-elle pas dès le deuxième ? Ensuite, puisqu’ils admettaient la répudiation, la question ne se pose-t-elle pas sans qu’il soit nécessaire d’inventer cette histoire sordide ? Enfin, où est le problème puisque la Bible dit que Salomon avait 700 femmes et 300 concubines … la question n’est-elle pas encore plus spectaculaire pour lui ? Et c’est là qu’on mesure qu’on est dans une autre conception du monde : le problème c’est donc que c’est une femme ! D’ailleurs, ils ne demandent pas « qui sera son mari » mais « de qui sera-t-elle l’épouse ». Certains répondront, que d’accord, mais pour des époux chrétiens ? Et bien il n’échappera à personne que les veuves chrétiennes ne sont pas obligées d’épouser le frère de leur mari pour lui donner une descendance !
Alors, on peut se demander pourquoi l’Esprit-Saint a inspiré à saint Luc de garder cet épisode de la vie de Jésus dans son évangile, si ça ne sert qu’à nous embrouiller les idées. D’abord, c’est un témoignage de la fidélité de l’évangéliste qui ne cache pas ce que Jésus a vécu. Et puis surtout, ici, l’enseignement de Jésus porte sur Dieu et la résurrection et non pas sur le mariage. Si l’on veut réfléchir au mariage chrétien, c’est à d’autres moments de la vie du Seigneur qu’il faut s’intéresser.
Ainsi la première leçon que nous devons retenir, c’est qu’on ne doit pas imaginer la vie éternelle à partir de notre vie présente. Or c’est un piège dans lequel nous tombons régulièrement. La vie éternelle n’est pas le prolongement de notre vie terrestre, elle en est plutôt l’accomplissement. Pour prendre une image, si notre vie est une fleur, la vie éternelle n’est pas cette fleur qu’on aurait séchée pour la garder toujours, mais elle est comme le fruit de la plante : ce n’est pas qu’elle n’ait rien à voir, mais elle est complétement différente. En fait ce n’est pas la vie terrestre qui sert de modèle à la vie éternelle, c’est la vie éternelle qui éclaire la vie terrestre et en donne le sens.
Pour cela, nous pouvons nous souvenir des sept autres frères dont parlait la première lecture. Eux sont bien réels et ils donnent l’exemple de ce que la résurrection change pour la vie terrestre. D’abord ils témoignent de la fidélité qui n’est pas l’attachement au passé mais l’appel de l’éternité. Ils nous invitent à considérer ce à quoi nous tenons pour que nous accordions plus d’importance à ce qui dure qu’à ce qui passe. Et dans le cas du mariage chrétien, c’est l’amour plus que le plaisir qui fonde la fidélité. Ensuite ils témoignent aussi de la force que donne l’espérance dans les épreuves. Cette grandeur d’âme qui impressionne le roi s’appuie sur la résurrection qui est comme une lumière qui brille dans les ténèbres. Mais quand on est dans un tunnel, pour apercevoir la lumière du jour, il faut lever la tête et non pas garder les yeux fixés sur le sol. Enfin les sept frères du livre des Martyrs témoignent aussi de la puissance de liberté que donne la résurrection. Seul celui qui tient par le ciel peut s’affranchir des remous de la terre. Dans un monde agité, il n’y a guère que la résurrection qui puisse nous donner cette liberté qui permet de garder la paix du cœur.
Alors ne nous laissons pas piéger par l’histoire des sadducéens mais, comme le recommandait saint Paul au Thessaloniciens, tenons fermes à la parole du Seigneur qui poursuit sa course, confiant que le Seigneur Jésus, et Dieu lui-même, nous a donné pour toujours réconfort et bonne espérance par sa grâce. N’imaginons pas la vie éternelle à partir de la vie terrestre, mais laissons la résurrection éclairer notre fidélité, nous soutenir dans les épreuves et élargir notre liberté.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Vierge fidèle qu’elle affermisse notre foi pour que nous nous attachions à ce qui demeure. Consolatrice des affligés qu’elle fortifie notre espérance pour que nous puissions triompher des épreuves. Mère du Bel Amour qu’elle encourage notre charité pour que nous puissions suivre le Christ jusque dans la lumière de la Pâques et resplendir de la Gloire des enfants de Dieu dès maintenant et pour les siècles des siècles.
Les enjeux de la Toussaint
TSST
Fête de Tous les Saints
Ap 7,2-4. 9-14 ; Ps 23 ; 1 Jn 3,1-3 ; Mt 5,1-12a
Nous voilà donc au jour de la Toussaint, au jour où, dans une même fête, nous honorons tous ceux qui se sont dans la gloire du cœur de Dieu. Ceux qui sont connus et reconnus, mais qui sont trop nombreux pour que l’on puisse consacrer un jour de l’année à nous souvenir de chacun ; mais aussi les inconnus, encore plus nombreux, qui ont vécu en faisant briller sur la terre une lumière divine.
Cette fête de la Toussaint est d’abord un acte de foi. En célébrant la foule immense et innombrable des saints, nous proclamons que la sainteté est possible. Non seulement pour des êtres d’exception, mais pour tous ceux qui acceptent de se laisser conduire par l’Esprit Saint. Nous proclamons que si le Christ a partagé notre condition humaine, c’est pour que nous puissions partager la condition divine. Fêter tous les saints, c’est proclamer notre foi dans les promesses du Seigneur et affirmer que le bonheur n’est pas un horizon lointain qui s’éloigne au fur et à mesure qu’on avance, mais qu’il est comme une semence qui déjà porte de nombreux fruits. Si nous imaginons la sainteté comme un idéal inaccessible, comment se fait-il que tant d’hommes et de femmes, de toutes nations, races, peuples et langues aient pu l’atteindre ? C’est que la grâce se déploie à la mesure de la place qu’on lui laisse. Et la foi est la porte que nous ouvrons dans nos vies à la puissance de Dieu. Par la pauvreté de cœur et par la douceur, nous apprenons à faire confiance à Dieu pour que ce soit lui qui nous rende heureux.
La fête de la Toussaint est aussi un acte d’espérance. Elle nous rappelle ce à quoi nous sommes destinés. Elle est l’occasion de contempler le but du chemin que nous parcourons, de creuser en nous le désir de la gloire de Dieu. Comme le disait saint Jean, ce que nous serons ne paraît pas encore clairement : quand on n’est pas arrivés ce n’est pas le moment de s’arrêter ! En nous permettant de fêter la sainteté de tous ceux qui nous ont précédés, l’Église nous donne des motifs d’avancer avec plus de joie et plus d’entrain. Car l’espérance ne consiste pas à rêver mais à attendre, et plus l’espérance grandit, plus le désir se creuse. C’est pourquoi les larmes, la faim et la soif de justice sont les signes que progresse en nous l’espérance de la béatitude.
Enfin la fête de la Toussaint est un acte de charité. C’est une occasion d’aimer plus, d’aimer mieux. Comme une fête de famille resserre les liens et renforce l’unité. Fêter tous les saints, c’est se réjouir du bonheur des autres, c’est découvrir des frères et sœurs aînés qui nous montrent le chemin et qui nous accompagnent. C’est avoir déjà un avant-goût de la Jérusalem Céleste en vivant cette communion des saints qui est le mystère de l’Église et qui nous fait participer au cœur de Dieu. C’est rendre grâce pour la gloire de l’amour partagé avec le Seigneur. Cet amour de charité qui se déploie dans la miséricorde, dans la pureté de cœur et dans la paix.
Oui, aujourd’hui est une grande et belle fête car, confiant dans les promesses du Christ nous croyons que sont innombrables ceux qui vivent dans la plénitude de la lumière divine ; nous contemplons ce à quoi nous sommes appelés pour creuser en nous le désir de voir Dieu ; nous participons à la joie de tous ceux qui déjà chantent la louange du Seigneur et intercèdent pour nous.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais et Reine des Saints nous aide à entrer pleinement dans le mystère que nous célébrons. Porte du Ciel qu’elle nous fortifie dans la foi, Consolatrice des affligés qu’elle nous affermisse dans l’espérance. Mère du Bel amour qu’elle nous entraine dans la charité pour que nous puissions chanter la Gloire de Dieu dès maintenant et pour les siècles des siècles.