La famille, c'est l'affaire de tous
NOSFA
Fête de la Sainte Famille - année A
Le dimanche dans l’octave de la Nativité, on fête la Sainte Famille, ce qui est une manière de méditer sur le mystère de Noël en se souvenant de sa dimension familiale. En s’efforçant de contempler comment Dieu s’est fait homme, il n’est pas insignifiant de se rappeler qu’il est né, qu’il a grandi et vécu au sein d’une famille.
Cette année, l’évangile qui nous aide à méditer sur le sens de la fête est celui de la fuite en Égypte. A peine les réjouissances de la naissance terminées, voilà que commencent les contrariétés. Ainsi l’on touche du doigt l’importance de la famille pour protéger le petit d’homme à l’âge où il est le plus faible et le plus démuni … et même après. Que serait devenu Jésus sans Marie et Joseph ? Il y a quelque chose de paradoxal dans notre condition humaine. Même si nous sommes capables de grandes choses, même si l’humanité a, par son intelligence et son habileté, des possibilités absolument inouïes pour s’adapter et habiter le monde, tout commence dans l’humilité de l’enfance, où l’on a besoin d’être protégé et accompagné. Il y a des animaux qui naissent avec toutes leurs défenses et toutes leurs capacités … ce n’est pas le cas de l’homme qui a besoin d’une famille pour grandir de manière sereine. On ne répétera sans doute jamais assez l’importance de la famille dans l’éducation des enfants.
Mais la famille n’est pas seulement une protection, elle est aussi le lieu d’une transmission et de l’inscription dans une histoire. C’est ce que rappelait le texte de la première lecture. On aura remarqué que les conseils et les exhortations de Ben Sirac s’adressent surtout aux enfants, y compris quand ils sont adultes. C’est que la famille n’est pas que l’affaire des parents, les enfants ont aussi une responsabilité dans la qualité de la famille. Le respect est une sorte de reconnaissance de ce que l’on a reçu ; honorer ses parents, même sous la forme de miséricorde, est une manière de prendre le relais. Contrairement aux prétentions révolutionnaires, l’avenir ne se construit pas sur les ruines du passé. Rien de grand ne se construit sans s’appuyer sur le passé. Il ne s’agit pas de répéter ce qui a été fait, mais d’en hériter, pour le déployer, le faire fructifier et parfois l’améliorer. La famille est là pour nous rappeler que le monde n’a pas commencé avec nous, même s’il a besoin de nous pour continuer. Dans la famille, nous apprenons la valeur du temps et l’importance de la durée.
Enfin, le texte de saint Paul révèle aussi que la famille est le lieu où l’on apprend à entrer en relation les uns avec les autres. Comme chrétiens, ces relations sont appelées à se vivre à la manière de l’amour de Dieu pour nous : dans le don et le pardon, dans la recherche de l’unité et de la paix. Et pour cela il nous faut parfois quelques conseils pour nous aider à trouver l’attitude juste les uns vis-à-vis des autres. Au passage, ne comprenons pas de travers ce que nous dit saint Paul. Il ne s’agit pas de fournir des arguments pour revendiquer les uns contre les autres, mais de nous rappeler ce que, par notre situation et notre psychologie, nous avons tendance à oublier. « Femmes soyez soumises à vos maris », non pas que la femme soit inférieure à l’homme, bien au contraire ! C’est parce que la femme a un tel pouvoir sur l’homme, qu’il faut qu’elle se rappelle d’écouter et de respecter son mari. « Hommes, aimez vos femmes », non pas que les hommes n’aient pas de cœur, mais qu’ils ont besoin de se rappeler l’importance de l’attention et de l’affection. « Enfants, écoutez vos parents », parce que s’il est normal de vouloir voler de ses propres ailes, il faut aussi se souvenir que l’on ne sait pas tout et que l’on peut toujours apprendre des anciens. « Parents, n’exaspérez pas vos enfants » parce que la tendance un peu instinctive est de vouloir modeler les enfants à notre image, alors qu’ils sont appelés à vivre leur propre vie et à développer leurs propres qualités.
En ce dimanche, prenons le temps de contempler la sainte Famille pour réaliser l’importance de la famille dans notre vie. Lorsque Dieu s’est fait homme, il a eu besoin d’une famille pour grandir, pour hériter et s’inscrire dans l’histoire, pour apprendre à aimer à la manière de Dieu. Comment pourrions-nous nous en passer ? Il ne s’agit pas d’un état de fait où l’on se trouve plongé par les circonstances, mais d’une réalité qui est l’affaire de tous, d’un creuset où nous expérimentons que l’on peut être différent sans être inférieur : chacun à sa manière et à sa place assure la beauté de l’ensemble.
Que la Vierge Marie, Etoile du Ciel, Miroir de la sainteté de Dieu et Mère admirable veille sur nos familles. Qu’à son exemple et à celui de saint Joseph, nous sachions être toujours plus de meilleurs enfants, de meilleurs époux et de meilleurs parents pour vivre selon le cœur de Dieu. Qu’à sa prière, nos familles soient toujours plus le lieu où se manifeste l’amour de Dieu, dans la tendresse, la bonté, l’humilité, la douceur et la patience, pour que nous puissions un jour entrer pleinement dans la demeure éternelle où nous sommes attendus de toute éternité et pour les siècles des siècles
de la joie à la contemplation
NO-J
Nativité du Seigneur - Messe du Jour
La liturgie de Noël prévoit que l’on puisse célébrer et à assister à trois messes à trois moments différents : dans la nuit, à l’aurore et dans la journée. Si l’on en croit Alphonse Daudet, on les célébrait autrefois l’une à la suite de l’autre, plus ou moins distinctement et plus ou moins rapidement, selon l’humeur ou l’impatience des uns ou des autres. Il est sûr qu’il vaut mieux prendre les moyens de vivre chaque messe en son moment, d’autant que les textes de la Bible qui sont lus aident à entrer dans une attitude plus profonde. Autant les lectures de la nuit rappellent l’événement et participent à l’éclosion de la joie qu’il procure, autant les lectures du jour conduisent à une attitude plus intérieure de méditation pour découvrir et contempler le sens de la fête.
D’abord il y a le texte du prophète Isaïe : « comme ils sont beaux sur les montagnes, les pas du messager qui annonce la paix », « Éclatez en cris de joie, car le Seigneur console son peuple ». La première attitude à laquelle nous sommes invités c’est la joie de l’accomplissement. Ce sentiment de soulagement et d’aboutissement que l’on peut éprouver lorsque commence ce que l’on a attendu depuis longtemps, ce que l’on a désiré intensément. Et Noël est l’aboutissement de la longue attente du peuple, cet accomplissement des nombreuses promesses maintes fois répétées au long des siècles. D’une certaine manière la joie que nous ressentons à Noël mesure notre sensibilité aux besoins du monde : si nous avons le cœur blasé par le confort et l’abondance, alors nous ne ressentirons qu’un ennui au mieux amusé devant l’événement. Mais si nous savons nous laisser toucher par la misère (la nôtre comme celle des autres), si nous savons prendre part aux aspirations des hommes sans couvrir d’une satisfaction éphémère notre soif d’absolu, alors nous pouvons découvrir combien le mystère de Noël vient combler ce qu’il y a de meilleur en nous.
Ensuite il y a la réflexion de la lettre aux Hébreux : « A bien des reprises et de bien des manières Dieu a parlé à nos pères » mais en ces jours « il nous a parlé par son Fils, rayonnement de sa Gloire ». L’approche est peut-être plus réfléchie : il ne s’agit pas tant de ressentir que de réaliser l’importance de la mission qui commence à Noël. Après la joie, nous sommes invités à une deuxième attitude : la méditation. Derrière l’anecdote charmante d’une naissance champêtre, il y a un enjeu fondamental : la plénitude de la Révélation. Dieu ne nous parle plus par messager, mais directement, sa parole n’est plus accessible seulement à ceux qui comprennent les allusions, mais à tous ceux qui se laissent rencontrer. Et la parole de Dieu n’est pas un discours à apprendre ou à traduire mais une personne à découvrir et à aimer. Noël est comme une invitation à entrer dans un dialogue avec Dieu : non pas le monologue d’une prière qui serait comme un bureau des réclamations, ni celui d’une étude de quelques textes pour se soumettre à des idées, mais l’aventure d’une amitié où le Seigneur accepte de se faire petit enfant avant d’enseigner et de purifier.
Enfin nous avons entendu ce texte magnifique qu’on appelle le Prologue de saint Jean, et qui est le début du quatrième évangile : « au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu » « et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » … Il y a quelque chose de sublime et de mystérieux dans ce texte, quelque chose qui nous plonge dans la contemplation. La contemplation est la troisième attitude à laquelle nous sommes invités. Il s’agit de regarder toujours la même chose pour découvrir chaque fois une lumière différente ; c’est cette manière de goûter la douceur d’un terrain familier tout en se laissant transporté par ce qui nous dépasse. Et ce serait bien dommage en cette fête de Noël, de ne pas prendre le temps de contempler le mystère. C’est peut-être la dernière racine chrétienne de notre culture que de compter les années à partir de la naissance de Jésus. Le temps est centré sur Noël, tant est inouï ce qui se passe ce jour-là : celui qui était au commencement de tout est devenu l’un de nous, celui par qui tout a été fait a pris le risque d’être refusé pour nous permettre de le recevoir et de l’aimer … En vérité la contemplation est surtout l’aventure du cœur à cœur avec le Seigneur et c’est bien le jour par excellence de vivre cette aventure !
Ainsi, nous voilà conduits par les textes liturgiques de la joie à la méditation et de la méditation à la contemplation. Comme un chemin qui nous conduit plus profondément, comme un souffle qui nous entraîne plus haut.
Puisque la Sainte Vierge se tenait auprès de la crèche, qu’elle se tienne auprès de nous qui nous en approchons. Etoile du matin qu’elle nous apprenne la simplicité pour que nous puissions ressentir la joie d’être sauvés. Trône de la Sagesse qu’elle nous accompagne dans la méditation pour que nous puissions rencontrer celui qui vient à nous. Mère du Bel Amour, qu’elle forme notre cœur à la présence du Seigneur pour que nous puissions contempler la gloire du Verbe fait chair et naître de Dieu comme il nous le propose dès maintenant et pour les siècles des siècles.