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de l'appel à l'alliance

26 Juin 2019 , Rédigé par mane-nobiscum-domine Publié dans #Temps Ordinaire

à l'occasion du 25° anniversaire de mon ordination  … 

Lectures du jour : Gn 15, 1-12.17-18 ; Ps 104 (105) ; Mt 7, 15-20

Sans doute, lorsque la parole de Dieu lui fut adressée pour la première fois, Abram quitta-t-il avec enthousiasme son pays et sa parenté pour se rendre disponible à la promesse. Il était encore dans une dynamique de projet – comme on dirait aujourd’hui. Mais avec le temps, les événements et les inévitables difficultés, l’enthousiasme s’émousse. Et même s’il vient de triompher des quatre rois, même s’il vient de recevoir l’hommage de Mekisedek, Abram est résigné, presque amer : « Mon Seigneur Dieu, que pourrais-tu donc me donner ? ». 

C’est qu’il doit passer du projet à la vocation. Trop souvent on confond les deux. Mais le projet c’est notre rêve à nous, tandis que la vocation c’est le rêve de Dieu pour nous. Ça n’est pas contradictoire, mais ce n’est pas la même chose. Spécialement quand nos capacités ou nos faiblesses nous font douter, il est important de vérifier que c’est bien sur Dieu que s’appuient nos perspectives. Ainsi « Abram eut foi dans le Seigneur », car c’est la foi qui fait passer du projet à la vocation. Une foi qui ne s’accorde pas ponctuellement, mais qui – comme toute confiance – se renouvelle autant que nécessaire. Régulièrement il nous faut passer du projet à la vocation, régulièrement il faut faire cette confiance en Dieu : ce que tu veux, non pas ce que je veux. 

Pourtant le texte que nous venons d’entendre nous montre un deuxième passage dans la vie d’Abram. Dieu l’invite à passer de la vocation à l’alliance. Une vocation, ça pourrait être comme une mission, fidèlement exécutée loin de la présence divine … D’une manière subtile et respectueuse, nous pouvons être tentés d’opposer au Seigneur le principe de subsidiarité : « laisse moi faire » lui disons-nous implicitement. Mais une alliance, c’est bien autre chose, c’est un compagnonnage au jour le jour, c’est accepter que Dieu n’ait pas la place qu’on lui laisse, mais celle qu’il propose. Tant qu’on est dans une vocation, on est serviteur, c’est dans l’alliance que nous devons amis, pour reprendre les paroles de Jésus. Comment Abram passe-t-il de la vocation à l’alliance ? Par cette histoire de sacrifice, où il prépare tout, mais où c’est Dieu qui agit. Du coté de l’homme, il y a un vrai investissement: prendre les animaux prescrits, les partager en deux quand c’est possible, et surtout les protéger en chassant les rapaces qui s’approchent. Générosité et persévérance, les deux composantes de tout engagement. Mais ce n’est pas l’homme qui allume le braiser fumant, ce n’est pas lui qui passe la torche enflammée. Le primat de la grâce auquel nous invite saint Jean Paul II, ce n’est pas attendre que Dieu agisse pour faire quelque chose, c’est préparer toute chose pour que Dieu puisse agir ; c’est être disponible à l’action de Dieu et toujours lui laisser le dernier mot !

Se souvenir du passé n’a d’intérêt que si c’est pour éclairer l’avenir. Nous ne lisons pas l’histoire d’Abram comme la mémoire des hommes illustres, mais comme la Parole que le Seigneur nous adresse pour comprendre ce qu’il attend de nous. Vivre une vocation plutôt qu’un projet et vivre sa vocation dans l’alliance. Ce n’était pas plus facile pour Abram que pour nous ; ça n’est pas plus facile pour un prêtre que pour un couple ; ça n’est pas plus facile dans la consécration que dans la vie du monde. La seule chose qui rend plus faciles la foi et l’engagement, c’est de n’être pas seul à les vivre. C’est de voir que d’autres font confiance à la Parole de Dieu pour guider leur vie, que d’autres sont disponibles à la puissance de Dieu pour accomplir ce en quoi ils se sont investis. 

Alors que le Seigneur nous aide, chacun ici présent, à passer du projet à la vocation et de la vocation à l’alliance. N’attendons pas des autres qu’ils nous précèdent : Abram l’a déjà fait, les saints l’ont déjà fait, c’est à nous désormais d’avoir foi dans le Seigneur, c’est avec nous désormais que Dieu conclut une alliance pour que nous demeurions en Lui comme il demeure en nous, pour que nous portions les fruits que le Seigneur attend, dès maintenant et pour les siècles des siècles. 

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Etablis dans la grâce

16 Juin 2019 , Rédigé par mane-nobiscum-domine Publié dans #Fêtes

TOTRIC

Solennité de la Sainte Trinité - Année C

Il n’aura échappé qu’aux distraits ou aux indifférents que le thème de notre année en paroisse est d’approfondir le fait que nous sommes établis par le Christ. Au long des mois nous avons essayé de comprendre comment le Seigneur comptait sur nous, là où nous sommes. Nos rencontres et notre témoignage ne sont ni le fait du hasard ni une option dans la vie spirituelle, mais le fruit de la Providence : ce que le Seigneur a désiré 

Pourtant la deuxième lecture nous invite aujourd’hui à élargir notre perspective. Non seulement le Christ nous a établis là où nous sommes, dans l’histoire et la vie du monde ; mais aussi, il nous a établis dans la grâce. Pour le dire autrement : le Christ nous a établis dans le cœur de Dieu. Et c’est bien le sens de cette fête de la Trinité, que de regarder autour de nous avec les yeux de la foi pour contempler cette grâce où le Seigneur nous a établis 

La première grâce c’est la possibilité : si nous sommes établis dans le cœur de Dieu, c’est qu’on nous y a fait entrer. Et la porte c’est le Christ. C’est lui qui nous ouvre la possibilité d’habiter en présence du Seigneur. D’ailleurs, il ne fait pas qu’ouvrir en se reculant poliment pour nous dire « après vous » ; il nous précède et nous dit « viens et suis moi ». Mais comme toute possibilité personne ne peut la saisir à notre place. Si nous ne voulons pas entrer dans la grâce, personne ne le fera pour nous. Ainsi la première manière d’accepter que le Christ nous établit dans la grâce, c’est la foi. Cette confiance obéissante ou cette obéissance confiante par laquelle nous nous engageons à la suite du Christ. 

Mais la porte ouverte par le Christ n’est pas un portique ! La possibilité a un but et, si Jésus nous accompagne, ce n’est pas pour faire une balade mystique mais pour nous conduire vers le Père. La grâce dans laquelle nous sommes établis n’est pas seulement de passer en coulisse pour comprendre ce qu’on voit en découvrant ce qu’on ne voit pas ; c’est surtout réaliser que nous sommes voulus, aimés et attendus. « Trouvant mes délices avec les fils des hommes » quelle belle expression du livre des Proverbes pour nous faire découvrir le cœur du Père qui se révèle à nous. Ainsi la deuxième manière d’accepter que nous sommes établis dans la grâce, c’est l’amour de charité, cet amour par lequel nous recevons ce qui vient du Père.

Pourtant il ne s’agit pas juste de rentrer et de regarder. Être établis dans la grâce ça n’a rien de statique, comme si nous étions plantés dans le ciel ou pétrifiés comme un ornement de la cour céleste. Il y a entre le Père et le Fils un mouvement d’amour qui va incessamment de l’un à l’autre, un mouvement dans lequel nous sommes entraînés : c’est l’Esprit Saint qui nous conduit vers la plénitude. Etre établis dans la grâce ce n’est pas recevoir un tampon, mais monter dans un train de progression et de perfection. C’est ce qu’annonçait Jésus et c’est ce que développe saint Paul. La troisième manière d’accepter que nous sommes établis dans la grâce est l’espérance qui est le consentement au souffle de l’Esprit.

Aujourd’hui où nous sommes invités à fêter la sainte Trinité. Plutôt que de se perdre en savantes réflexions ou en spéculations oiseuses, contemplons cette grâce dans laquelle nous sommes établis. Nous savons que c’est le même mystère qui se déploie dans le Père, le Fils et le Saint Esprit, que c’est dans le même mouvement que nous sommes invités, accueillis et entraînés dans la grâce où nous sommes établis. 

Que la Vierge Marie nous accompagne dans la contemplation du mystère du cœur de Dieu. Fille de Sion, Mère du Sauveur et Temple de l’Esprit, qu’elle nous aide à croire ce qui nous est proposé, à espérer ce qui nous est promis et à aimer comme nous sommes aimés pour que nous demeurions au cœur des Trois qui sont uns, comme ils demeurent en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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Pourquoi Pâques s'arrête à la Pentecôte ?

8 Juin 2019 , Rédigé par mane-nobiscum-domine Publié dans #Pâques

PEVS

Messe de la Veille au Soir de la Pentecôte

Ex 19, 3-8a, 16-20b ; Ez 37, 1-4 ; Rm 8,22-27; Jn 7,37-39

Voilà déjà quelques semaines que nous avons célébré Pâques. La vie étant ce qu’elle est, c’est désormais un souvenir qui s’estompe discrètement, et l’on n’en parlerai plus guère si la liturgie ne nous le rappelait obstinément. On va donc désormais tourner la page et entrer dans le temps ordinaire. Mais pourquoi est-ce la Pentecôte qui termine le temps pascal ? Après tout l’Ascension ne ferait-elle pas aussi bien l’affaire ? 

En vérité, il y a une relation très étroite entre la résurrection du Christ et le don de l’Esprit. Si le mystère de Pâques s’arrêtait à l’Ascension, on serait d’une certaine manière condamné à rester la tête en l’air, attendant le retour du Seigneur. Mais, on se souvient que ce n’est pas ce que demandaient les anges : nous ne sommes pas destinés à être les spectateurs de la gloire de Dieu. Nous ne serons pas témoins de la résurrection parce que nous en parlerons, mais parce que nous en vivrons. Et pour vivre de la Résurrection, il faut que l’Esprit-Saint nous soit donné et qu’il agisse en nous et par nous. Achever le mystère de Pâques à l’Ascension, ce serait comme si Dieu avait sorti le peuple d’Egypte pour le laisser dans le désert. S’il a libéré son peuple, c’est pour qu’il écoute sa voix et garde son alliance. Sans la rencontre au Sinaï, le passage de la Mer Rouge est un beau spectacle sans lendemain ; de la même manière sans la Pentecôte, le matin de Pâques est un beau spectacle sans lendemain. 

Par sa résurrection, le Christ nous a ouvert les portes du Ciel, et c’est pourquoi nous pouvons entrer dans le dialogue divin par la prière. Mais il ne s’agit pas de singer ce que Jésus faisait. Saint Paul rappelle : « L’Esprit vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut ». Il est très important de découvrir l’originalité de la prière chrétienne. C’est l’Esprit qui prie en nous, et pas seulement par des gémissements inexprimables, mais aussi pour intercéder, pour nous insuffler ses intentions. Tant que nous nous pensons à l’origine de notre prière, nous restons extérieurs au mystère de Pâques … nous devrions toujours commencer la prière par cette invocation « viens Esprit Saint, viens prier en moi ». 

Dans le mystère de Pâques, nous découvrons que Jésus est la Parole de Dieu : il est le sommet de la Révélation, Dieu nous a tout dit en Jésus. Mais souvenons-nous de l’histoire d’Ezéchiel : la parole de Dieu ne fait que rassembler les ossements desséchés pour leur donner consistance et figure humaine mais cela ne suffit pas : «  il n’y avait pas d’esprit en eux ». C’est l’Esprit Saint qui donne vie à ce que la Parole de Dieu rassemble. C’est très bien de connaître la Bible, c’est encore mieux de l’étudier et surtout de la mettre en pratique, mais si nous voulons la vivre, il ne faut pas en rester à la lettre ou à l’histoire, il faut se laisser emporter par le souffle de l’Esprit : c’est lui qui nous en donne le goût, c’est lui qui la fait respirer en nous, c’est lui qui la fait battre au rythme de notre cœur. 

Par le mystère de Pâques, les eaux de la mort sont devenues une source d’eau vive. Auprès du Christ nous trouvons ce qu’il faut pour étancher toute soif : il comble toute attente, il soulage toute souffrance, il console toute peine. Mais l’on ne boit pas au Christ, sans que l’Esprit fasse de nos cœurs un fleuve qui s’écoule là où nous sommes. Le don de Dieu ne se reçoit pas pour se garder jalousement à notre propre profit, il nous entraîne à donner ce que nous avons reçu : la lumière est faite pour rayonner, la parole pour retentir, l’eau pour jaillir et l’amour pour aimer. 

Il n’y a pas de Pâques sans Pentecôte, ni de Pentecôte sans Pâques, car l’on ne peut séparer la gloire du Fils et le don de l’Esprit. Ce soir nous sommes invités à persévérer dans l’espérance de la Résurrection en renouvelant notre disponibilité au souffle de Dieu, en attendant plus intensément la présence de l’Esprit Saint en nous. 

A l’exemple de la Vierge Marie qui a laissé l’Esprit Saint accomplir en elle la Parole de Dieu, ouvrons nos cœurs et nos vies au Don de Dieu. Porte du Ciel, qu’elle nous apprenne à faire de notre prière une porte ouverte au souffle de Dieu. Miroir de la sainteté de Dieu, qu’elle  nous montre comment vivre l’Evangile. Mère du Bel amour, qu’elle nous entraine là où l’Esprit nous conduit, pour que ce que nous avons reçu du Seigneur jaillisse de nos cœurs en fleuves d’eau vive et que s’accomplisse notre espérance : le Christ est ressuscité ! Alléluia ! Il est vraiment ressuscité ! Alléluia ! 

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