Quatre aspects du mystère de Pâques
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Veillée Pascale (lectures I, II, III, VI) - Année C
Le chemin des femmes au matin de Pâques, ressemble au chemin que tracent les lectures que nous venons d’entendre. Au récit de la création correspond le moment : c’est un commencement, l’heure qui commence le jour, le jour qui commence la semaine. A l’épisode d’Abraham, correspond le projet des femmes : elles se rendent au tombeau pour effectuer leur devoir funéraire comme Abraham pensait marcher vers la mort de son fils en allant vers le pays de Moriah. Comme Moïse et le peuple virent l’obstacle de la mer s’ouvrir devant eux, les femmes trouvent la pierre roulée et le tombeau ouvert. Enfin, comme Baruch invitait Israël à retrouver la Source de la Sagesse dans la parole de Dieu, les hommes aux habits éblouissants invitent les femmes à découvrir le sens de ce qu’elles vivent dans les paroles du Seigneur. Quatre temps pour entrer dans le mystère de Pâques, quatre éléments pour saisir ce qu’on attend de nous.
Le premier élément, c’est le commencement. Pâques est un début, une nouvelle création : le Seigneur ne nous sauve pas en mettant une rustine, mais en renouvelant les cœurs, en inaugurant une vie nouvelle. C’est aussi pourquoi on parle de nouvelle naissance pour le baptême qui nous fait participer au mystère du Christ. Le récit de la création nous rappelait la présence de Dieu au commencement du monde : sa parole établit chacun selon son espèce, assignant la mission de chacun, répartissant les rôles. De la même manière le baptême nous établit dans le Christ et nous recevons la mission d’être prêtre, prophète et roi : de prier pour le monde, de témoigner de l’évangile, de conduire le monde selon le cœur de Dieu. Quelque chose de nouveau commence à Pâques, quelque chose de différent. Faisons l’effort de garder le dimanche comme premier jour de la semaine : la résurrection n’est pas ce qui termine, mais ce qui commence. Ce que nous célébrons n’est pas une récompense ou un aboutissement, c’est une impulsion et une fondation.
Le deuxième élément, c’est l’image de ces femmes qui cheminent vers un tombeau qui se révèlera vide. Certains estiment que marcher vers la mort est le lot de la condition humaine. Un philosophe disait : « dès qu’un homme nait, il est assez vieux pour mourir ». Pourtant l’histoire du sacrifice d’Isaac nous apprend autre chose. C’est une chose tellement inouïe, que trop souvent on comprend mal le texte. On le soupçonne d’encourager un Dieu avide de sacrifices humains, alors que c’est précisément le texte qui dit que Dieu n’en veut pas. Dieu refuse qu’Abraham tue son fils pour lui prouver sa confiance : il ne veut pas de notre mort, il est prêt à donner lui-même la victime qui nous remplacera. C’est le deuxième élément de Pâques : la révélation que Dieu nous veut vivants, qu’il a pris les moyens pour que sa gloire se manifeste dans notre vie.
D’une certaine manière, on peut dire que le symbole de Pâques, c’est le tombeau ouvert, la pierre roulée. Aussi étonnant que l’ouverture de la Mer Rouge pour permettre au peuple d’échapper aux armées de Pharaon. L’un et l’autre sont intimement liés à Pâques. Ces deux images nous rappellent qu’il y a une dimension de salut dans ce mystère que nous célébrons. Dans toutes les angoisses, les difficultés ou les impasses que l’on peut connaître, le Christ vient ouvrir la possibilité d’une lumière divine. Puisque la mort est vaincue, rien n’est jamais définitivement fermé à la présence de Dieu. Quoique nous vivions, quoique nous subissions, Dieu propose toujours un bien plus grand.
Cependant, comme les femmes au tombeau, nous pouvons être un peu désemparés. C’est pourquoi il ne faut pas oublier le dernier élément : l’invitation des anges à se souvenir des paroles du Seigneur, comme on a entendu aussi le prophète Baruch inviter le peuple à retrouver les préceptes de Dieu. La sagesse a vécu parmi les hommes, dit-il, mais elle ne s’impose pas, jamais. C’est à chacun de saisir ce que Dieu nous donne, ce que Dieu nous propose. Et l’on sait que tout au long des siècles des chrétiens se sont engagés pour vivre concrètement la dynamique de Pâques : dans le pardon et la réconciliation, dans le service et le dévouement en refusant la résignation et l’injustice pour que reviennent à la vie ceux que le monde a délaissés.
Ce mystère de Pâques que nous célébrons cette nuit, ce mystère dans lequel nous sommes plongés par notre baptême est à la fois un commencement, une révélation, un salut et une invitation. Commencement d’une vie nouvelle : celle qu’inaugure le Christ ; Révélation de la volonté de Dieu qui nous appelle à partager l’éternité de son amour ; Salut qui nous libère du péché et de la mort ; Invitation à nous laisser sauver en accueillant la parole de Dieu pour la mettre en pratique.
Que la Vierge Marie nous aide à entrer pleinement dans la joie de la résurrection qui éclaire notre vie. Trône de la Sagesse, qu’elle nous apprenne à accueillir la révélation de Pâques par la confiance de la foi ; Porte du Ciel, qu’elle nous rende disponibles au Salut de Pâques par la puissance de l’espérance ; Mère du Bel Amour, qu’elle nous entraine à répondre à l’invitation de Pâques dans la douceur de la charité, pour que soit manifesté, vécu et partagé l’annonce du jour nouveau : le Christ est ressuscité ! Alléluia ! Il est vraiment ressuscité ! Alléluia !
les paroles de Jésus aux hommes
CARAC
Dimanche des Rameaux et de la Passion du Seigneur - Année C
Le dimanche des Rameaux est aussi celui de la Passion du Seigneur. Nous avons donc entendu le récit que donne saint Luc des derniers jours de Jésus. C’est une manière de plonger dans le mystère que nous allons célébrer, de nous rappeler les événements que nous allons revivre cette semaine. « Chaque matin, il éveille mon oreille, pour qu’en disciple, j’écoute » disait Isaïe dans la première lecture : essayons d’être disciples de Jésus et d’écouter ce qu’il dit aux hommes.
« Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis ». C’est la dernière parole que Jésus adresse à un homme. Elle est pour le bon larron, celui qui reconnaît à la fois la justice de son sort, et l’injustice de ce que subit Jésus. C’est la parole la plus réconfortante de toute cette histoire, et pourtant, il nous est sans doute difficile de nous identifier au bon larron. Peut-être parce que nous n’avons pas commis des crimes justifiant la peine de mort … ce qui est heureux ! Mais sans imiter la vie du bon larron, nous pouvons chercher à avoir un cœur comme le sien : le cœur d’un pécheur qui reconnaît sa faute et se confie au Seigneur reconnu dans l’innocent crucifié.
Avant cela, Jésus avait parlé aux femmes qui se lamentaient sur lui. « Ne pleurez-pas sur moi, pleurez plutôt sur vous-même » leur a-t-il dit. C’est une parole qui peut paraître un peu dure, après tout, c’est gentil de compatir à son sort. Mais Jésus nous met en garde contre ce qu’il peut y avoir de trompeur dans cette émotion. Elle détourne du vrai problème : que devient une société où l’on préfère le coupable à l’innocent ? Et puis il y avait peut-être quelque chose de formel dans ces lamentations : c’était un métier que d’être pleureuse ! Les paroles de Jésus nous invitent à ne pas rester spectateur, même ému, mais à voir combien nous sommes concernés par sa Passion.
Si l’on remonte encore dans le temps, il y a eu aussi tous les procès : celui devant le collège des anciens, celui devant Pilate et celui devant Hérode. Là, Jésus ne dit rien … ou pas grand chose. Mais il explique pourquoi : « si je vous le dis, vous ne me croirez pas ; si j’interroge, vous ne répondrez pas ». C’est une deuxième mise en garde contre les cœurs fermés, contre ceux qui savent déjà et qui cherchent ce qu’ils ont déjà décidé. Hérode voulait un spectacle, Pilate voulait la tranquillité, et les chefs du peuple voulaient éliminer Jésus. Dieu ne peut rien pour celui qui ne veut pas l’écouter, alors il se tait
Et puis, au tout début, il y avait les Apôtres. Jésus annonce que l’un d’eux va le livrer, et voilà que la conversation tourne au combat d’orgueil : qui d’entre eux est le plus grand ? C’est typique des apôtres, toujours à coté de l’histoire ! Pourtant Jésus les reprend doucement et surtout il les confirme dans leur mission : « vous mangerez et boirez à ma table, vous siègerez sur des trônes » ; et il dit à Pierre « quand tu seras revenu, affermis tes frères ». Une manière de leur rappeler qu’il compte sur eux, malgré leur faiblesse, malgré leur infidélité …
Et nous, quelle parole voulons-nous entendre de la part de Dieu ? Qui serons-nous ? Cyniques et entendus comme les juges, émus et superficiels comme les pleureuses, ou bien, à l’image des disciples et du bon larron, humbles et confiants dans celui qui compte sur nous malgré nos faiblesses, dans celui qui a pris notre condition pour nous introduire dans la sienne.
Que la Vierge Marie nous accompagne tout au long de cette semaine Sainte. Mère de miséricorde qu’elle nous montre comment devenir ce que Dieu attend de nous. Consolatrice des affligés, qu’elle nous apprenne à ne pas nous laisser piéger par nos émotions ou nos idées. Porte du Ciel, qu’elle nous conduise jusqu’à la gloire dans laquelle le Seigneur nous entraîne, dès maintenant et pour les siècles des siècles.