La confiance est la mesure de l'amour
8 Dimanche du Temps Ordinaire - Année A
L’évangile que nous venons d’entendre est assez connu. Quelques unes de ses phrases sont même devenues proverbiales … pourtant j’ai été étonné de l’enchaînement. En résumant, Jésus dit : « nul ne peut servir deux maîtres, donc ne vous souciez par de ce que vous mangerez ou de quoi vous vous vêtirez ». C’est à dire que la confiance dans la Providence découle de notre choix de servir Dieu. Puisque nous suivons le Christ plutôt que l’argent, nous pouvons faire confiance pour qu’il ne nous manque rien.
Il y a quelques années, un humoriste s’était fait la spécialité de déstabiliser les gens qu’il interviewait en leur posant des questions incongrues. Un jour, interrogeant un évêque très engagé dans l’action sociale, il lui posa la question « est-ce que mes parents sont trop riches pour être aimés par Dieu ? ». Et bien d’une certaine manière, l’évangile lui répond : « est-ce que vos parents sont trop riches pour aimer Dieu ? ». Parce que le cœur de l’enseignement du Seigneur aujourd’hui est bien là : est-ce que nous aimons suffisamment Dieu pour lui faire confiance ? Et Jésus illustre avec deux sujets : la nourriture et les vêtements. L’un renvoie à la vie matérielle, à la subsistance, et l’autre à la vie sociale et relationnelle, à l’image que l’on donne ou que l’on veut donner.
Pour ce qui concerne la subsistance, la confiance en Dieu pour les affaires matérielles, on pourrait être tenté de trouver un peu naïve l’image des petits oiseaux. Vivre d’amour et d’eau fraiche, c’est bien sympathique, mais ça n’est pas très réaliste. Cela dit, il faut reconnaître que nous sommes souvent un peu exigeants quant au train de vie ! Il y a un tas de choses superflues qu’on considère comme nécessaires ! Et l’on risque alors d’être un peu comme des enfants capricieux disant à leurs parents : « si tu m’aimes, achète moi ça ! ». On retombe alors dans le piège de s’interroger sur l’amour de Dieu pour nous, alors que Dieu nous interroge sur notre amour pour lui. C’est sans doute l’un des pièges de notre société de consommation : attendre de Dieu le superflu, alors qu’il attend de nous que nous lui fassions confiance sur l’essentiel.
Le deuxième exemple de Jésus porte sur le vêtement, et il compare la beauté des lys des champs aux fastes de Salomon. Ce qui est en jeu, ici, c’est l’image que nous cherchons à donner de nous-mêmes. Est-elle juste une apparence pour impressionner les autres ? N’est-ce pas une manière d’essayer d’être aimé ou au moins admiré ? Alors que l’amour de Dieu ne se laisse pas impressionné par l’apparence, il nous dévoile la vérité de ce que nous sommes et nous apprend à en découvrir la beauté. Là encore, il faut se garder du piège de la société médiatique où le paraître passe avant l’être , en vérité l’amour de Dieu nous invite à faire confiance à la splendeur de l’être plutôt qu’aux artifices du paraître.
A travers ses paroles, Jésus nous rappelle l’amour que Dieu nous porte. Nous n’avons pas à nous préoccuper d’être aimés, mais notre premier souci doit être plutôt d’aimer. Et c’est la confiance qui mesure l’amour. C’est pourquoi il faut chercher d’abord le royaume de Dieu et sa justice. Parce que la vie spirituelle éclaire la vie matérielle et sociale en dévoilant l’essentiel et la vérité, alors que la vie matérielle risque de nous égarer dans le superflu, comme la vie sociale risque de nous égarer dans l’apparence. A chaque jour suffit sa peine, c’est aujourd’hui que le Seigneur nous aime, c’est aujourd’hui que nous devons l’aimer et lui faire confiance.
Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Secours des chrétiens qu’elle nous apprenne à nous attacher à l’essentiel plutôt qu’au superflu, car c’est l’essentiel qui demeure, tandis que le superflu s’épuise. Trône de la Sagesse qu’elle nous révèle la merveille que nous sommes pour que nous puissions rayonner de sa gloire sans la cacher dans les vanités de l’apparence. Vierge de la Confiance qu’elle nous accompagne dans le souffle de l’Esprit Saint pour que, accueillant avec foi le don de Dieu, nous puissions l’aimer toujours mieux en nous laissant guider par lui ; et demeurer en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles