Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

La foi n'est pas un sondage

19 Juin 2016 , Rédigé par mane-nobiscum-domine Publié dans #Temps Ordinaire

12° Dimanche du Temps Ordinaire - Année C

 

Ainsi donc, Jésus pose aux disciples cette question : « pour vous, qui suis-je ? ». Mais avant il avait posé une autre question, différente : « qu’est-ce que la foule dit de moi ? ». Ce sont deux questions différentes, il doit donc y avoir deux réponses différentes … et entre nous … heureusement ! Parce que ce que dit la foule est exagéré ou irréfléchi ! Comment Jésus pourrait-il être celui qui l’a baptisé ! Dans la vie, en général, et dans la vie spirituelle en particulier, il faut se méfier de ce que dit la foule … ou les médias (ce qui revient au même aujourd’hui). S’ils apportent parfois des informations intéressantes, le plus souvent les opinions sont complétement fausses ! Jésus ne nous demande pas d’être comme tout le monde ou de penser comme tout le monde. La vie spirituelle n’est pas une affaire de sondage, et ce n’est pas la majorité qui détermine la vérité ! En matière de foi, ce qui compte, c’est « pour vous », notre position, notre réponse.

 

Cela dit, Pierre donne la bonne réponse. Mais Jésus demande alors de ne pas la répéter … c’était bien la peine de poser la question ! En fait, d’après ce que dit Jésus par la suite, on peut comprendre pourquoi il demande le silence : c’est trop tôt, ils risquent de se tromper et de se faire une fausse idée, parce que les mots sont piégés. Certes Jésus est le Messie de Dieu, certes il n’est pas juste un prophète, mais le sauveur. Pourtant ça n’est pas à la manière des hommes qu’il nous sauve. Il ne sera pas sauveur comme un roi victorieux ou un syndicaliste énervé, mais il nous sauve dans l’amour de Dieu, en donnant sa vie, en se sacrifiant pour nous. Ainsi le mystère de Dieu n’est pas une affaire de mot : il ne suffit pas de le dire, il faut le vivre.

 

Ensuite, Jésus enchaîne avec les consignes pour ceux qui veulent le suivre. Un peu logiquement, si on veut suivre Jésus, on doit être dans les mêmes dispositions que lui, vivre la même dynamique. Reconnaître que Jésus est le Messie de Dieu n’est pas une déclaration anonyme, il ne s’agit pas de répondre à une question et de reposer le téléphone pour passer à autre chose ! Reconnaître que Jésus est le Christ, nous concerne, nous engage et change notre vie.

 

Et ce que les disciples ont vécu dans l’épisode que raconte l’évangile, nous le vivons, nous aussi aujourd’hui, en entendant cette parole, et surtout en allant communier. D’abord, il s’agit d’un acte personnel. Personne ne vous force et rien de vous oblige à communier : on ne communie pas pour faire comme tout le monde, c’est une démarche personnelle qui est une manière de répondre à la question de Jésus « pour vous qui suis-je ? ». On ne vient pas communier juste parce qu’on assiste à la messe, on vient communier pour dire au Seigneur qu’il est notre force et notre nourriture, pour répéter cette réponse que nous lui avons faite au jour du baptême : « Tu es le Messie de Dieu »

 

Ensuite il ne s’agit pas que de mots. Bien sûr lorsque le prêtre présente l’hostie, en disant « le Corps du Christ » on répond « Amen » et non pas autre chose, et on le répond clairement avec conviction pour dire « je crois » … Mais tout dans notre attitude doit exprimer qu’on reconnaît le Christ dans la communion. Si on le fait de manière désinvolte ou distraite, notre attitude contredit nos paroles. Il ne suffit pas de donner la bonne réponse, il faut la vivre, vivre le mystère.

 

Enfin, cette réponse et cet acte nous engagent. Ça n’est pas une parenthèse dans notre vie. En recevant le corps du Christ, nous sommes unis à lui, nous cherchons à vivre et à aimer comme lui, en faisant ce qu’il nous a demandé, en vivant comme il a vécu, en aimant d’un amour généreux qui donne et se donne.

 

Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Arche de la Nouvelle Alliance, qu’elle nous apprenne à avoir une relation personnelle avec Dieu, à ne pas nous laisser guider par la foule, en faisant comme tout le monde, mais à entrer dans un cœur à cœur avec le Seigneur. Porte du Ciel, qu’elle nous conduise jusqu’à ce qu’elle nous montre, dans une cohérence entre nos paroles et nos gestes, dans l’unité d’une vie qui fait ce qu’elle dit. Mère du Bel Amour qu’elle nous entraîne dans l’Esprit qui nous est donné en acceptant de nous laisser transformer pour vivre et aimer selon le cœur de Dieu, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

Lire la suite

Tu me fends le coeur

12 Juin 2016 , Rédigé par mane-nobiscum-domine Publié dans #Temps Ordinaire

11° Dimanche du Temps Ordinaire - Année C

 

Ceux qui ont un peu de culture régionale se souviennent sans doute de la fameuse réplique lors de la partie de cartes de Marius : « tu me fends le cœur ». Bien sûr il ne s'agit pas ici de tromper la vigilance de Panisse  tout en adressant un message à Escartefigue, mais il n'en reste pas moins que cela pourrait être un bon résumé de la parole de Dieu que Nathan transmet à David.

 

Et l'on peut comprendre l'amertume du Seigneur : il a tout donné à David, il est même prêt à lui en donner encore plus. Mais en faisant ce qui est mal aux yeux de Dieu, David a méprisé son bienfaiteur. « Tu me fends le cœur » c'est d'abord le reproche de l'offensé, de celui qu'on « espiche comme un scélérat » pour reprendre les mots de Pagnol. Et il faut bien reconnaître que, souvent, on n’apporte pas à Dieu toute la considération qu’il mérite. Il ne faut pas confondre la miséricorde et l’indulgence ni même la tolérance. La miséricorde ne diminue pas la gravité du péché, le pardon ne rend pas bien ce qui est mal … On ne peut pas comprendre la miséricorde si l’on ne réalise pas à quel point notre péché brise le cœur de Dieu. Comme le disait saint Paul, il ne s’agit pas d’observer la loi, mais de croire … le péché n’est pas simplement une contravention à la loi, sanctionnée plus ou moins sévèrement par un juge qui doit être impartial, il s’agit d’un manque de confiance en Dieu, d’un mépris de lui. Il faut entendre ce reproche qui revient obstinément dans les impropères : que t’ai-je fais, oh mon peuple ? Ce reproche douloureux est le premier aspect de la miséricorde.

 

« Tu me fends le cœur » c'est encore le constat du miséricordieux, de celui qui ne reste pas insensible à la misère de l'autre, qui ne se blinde pas dans un cœur de pierre. C’est le regard que Jésus aurait bien aimé trouver chez le pharisien devant la pécheresse en pleurs le couvrant de baisers. La miséricorde n’est pas dans le jugement, mais dans la compassion, même si cela doit nous déranger, même si cela doit nous remettre en question. La miséricorde refuse de se réfugier dans l’indifférence ou l’impuissance, mais elle se manifeste dans la bienveillance et dans l’engagement. Dieu n’a pas voulu nous laisser englués dans la misère de la condition humaine, par son incarnation et par sa rédemption, il est venu jusqu’à nous pour nous rassembler et nous retrouver. L’ouverture à l’autre, la main tendue est le deuxième aspect de la miséricorde.

 

« Tu me fends le cœur » c'est enfin la réponse du pêcheur repentant, de David reconnaissant son péché et sa faute, c’est aussi l’attitude humble et affectueuse de la pécheresse s’approchant de Jésus. Parce que la miséricorde reçue permet la miséricorde donnée, parce que l’amour reçu permet l’amour donné. C’est en reconnaissant que Dieu est miséricordieux que nous pouvons devenir miséricordieux, pour nous et pour les autres, dans un repentir qui ne cherche ni excuse ni justification, mais qui se laisse aimer pour aimer davantage. La miséricorde transforme et se transmet.

 

En cette année de la miséricorde on pouvait difficilement trouver des textes plus inspirants que ceux que nous venons d'entendre. La miséricorde n'est pas l'indulgence : elle est un cœur brisé devant la misère. Parce qu’elle nous fait souffrir, qu’elle nous stupéfie ou qu’elle nous interpelle toute misère nous atteint directement ou indirectement ; et la miséricorde n'accepte pas d'ignorer ce qui ne va pas, ce qui ne devrait pas être, ce qui est à regretter. La miséricorde est aussi le cœur sensible qui se laisse toucher, qui ne se réfugie pas dans l'indifférence ou la fatalité pour s'épargner la souffrance, pour éviter d'avoir à changer ses projets ou nuancer ses principes. La miséricorde enfin ouvre à la miséricorde elle adoucit le cœur de pierre pour qu'il ne se drape pas dans l'illusion de l'orgueil pour qu'il puisse entrer dans le dialogue de l'amour où l’on se donne en reconnaissant qu’on a reçu. Bien loin de la galéjade, le soupir douloureux « tu me fends le cœur » est une belle manière d’entrer dans la miséricorde pour aimer à la hauteur de Dieu.

 

Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Trône de la Sagesse qu’elle nous apprenne à reconnaître ce qui n’est pas digne de Dieu, ce qui n’est pas digne de nous pour que nous puissions accueillir la miséricorde. Consolatrice des affligés qu’elle ouvre nos cœurs à la souffrance de ceux qui ont besoin de nous pour que nous puissions vivre la miséricorde. Mère de Miséricorde, qu’elle nous entraîne dans le souffle de l’Amour divin pour que la miséricorde puisse s’étendre jusqu’aux extrémités de la terre, et nous conduire à la demeure éternelle où Dieu sera tout en tous, dans les siècles des siècles.

Lire la suite

Quelle compassion ?

5 Juin 2016 , Rédigé par mane-nobiscum-domine Publié dans #Temps Ordinaire

10° Dimanche du Temps Ordinaire - Année C

 

L’histoire de la résurrection du fils de la veuve de Naïm est bien sympathique, mais pour être parfaitement honnête je la trouve un peu lointaine de notre expérience habituelle. Bien sûr l'épisode annonce le mystère de Pâques et manifeste la puissance de Dieu, mais il y a dans la vie tellement de drames qui ne se terminent pas aussi bien que l'histoire paraît exceptionnelle et un peu décalée. Alors que faire quand un texte ne nous parle pas beaucoup ? Il faut le creuser un peu plus, un peu mieux.

 

En cette année de la miséricorde une expression peut retenir notre attention : « Jésus fut pris de compassion ». Le latin traduit « misericordia mutus »  poussé par la miséricorde. Pour qui Jésus a-t-il de la compassion ? Pour la mère du garçon, qui était veuve et perdait son fils unique. On sait quelle précarité impliquait, à l'époque, le fait pour une femme de se retrouver veuve et sans enfant. On peut donc penser que c'est l'avenir bien sombre de cette femme qui touche Jésus. Pourtant elle n'est pas seule, l'évangéliste précise même qu'une foule importante de la ville l'accompagnait. Faut-il alors penser que cette foule n’est là que pour l’enterrement, et que tous ces gens la laisseront tomber ensuite ? Bien sûr on ne réécrit pas l’histoire (surtout celle qui ne s’est pas passées), mais c’est une situation plausible … et qui rajoute à la cruauté du moment !

 

Ainsi peut être que la question que nous pose le texte n’est pas celle à laquelle on pense spontanément ! On se voit à la place de la mère ou du fils, et l’on se demande pourquoi le Seigneur nous laisse dans les difficultés sans nous aider miraculeusement. Mais la question porte peut-être sur le type de compassion que nous éprouvons, sur notre attitude vis-à-vis de ceux qui souffrent ! Nous voyons en effet deux types de compassion : celle de la foule et celle de Jésus. L’une accompagne mais ne fera rien, l’autre va soigner et réparer, l’une regarde, l’autre agit, l’une laissera tomber, l’autre s’implique. Il y a deux types de compassion, et nous sommes invités à imiter celle du Christ.

 

D’abord Jésus touche le cercueil, et les porteurs s’arrêtent. C’est la première chose à faire : arrêter la fatalité. Oh ! Bien sûr, on ne vas pas se mettre en travers des convois funéraires, mais n’y a-t-il pas des situations où nous nous résignons trop facilement … surtout quand ça concerne les autres ? Que de situations sont prétendues inéluctables, alors qu’elles ne le sont pas ! Si l’on en croit l’esprit du monde, la plupart des solutions sont des solutions de mort. Qui arrêtera les porteurs pour dire que l’avortement ou le divorce ne sont pas les seules solutions, ni les meilleurs réponses aux drames de l’existence ? Tout au long de l’histoire, des chrétiens ont arrêté les porteurs de la résignation pour soigner les malades, libérer les captifs ou instruire les ignorants. On ne peut pas tout faire, on ne peut pas tout empêcher ni tout réparer, mais il y a plus de choses à faire qu’on ne le croit, il y a moins de fatalité qu’on ne le dit.

 

Ensuite Jésus commande au jeune homme : « lève-toi ». C’est la deuxième attitude : l’évangile est proclamé avec assurance : « Dieu te veut debout », c’est la position de l’homme ressuscité. D’ailleurs les orientaux ne s’agenouillent pas durant le temps pascal : puisqu’on est ressuscité, on se tient debout ! Annoncer l’évangile, c’est changer notre regard sur ceux qui souffrent, c’est rappeler leur dignité et leur vocation. C’est les porter vers le projet de Dieu et non pas vers le cimetière. Même quand ça veut dire d’avertir les pécheurs, de supporter l’ennuyeux ou de vêtir ceux qui sont nus.

 

Enfin Jésus rend l’enfant à sa mère. Quelle expression étonnante ! L’enfant ne s’est pas précipité vers sa mère, ni sa mère vers lui ? Et bien non ! D’une certaine manière, il appartient à Jésus puisque c’est lui qui l’a ramené à la vie. Au passage, une ancienne tradition dit que ce jeune homme est saint Materne, et qu’il évangélisera ensuite la Gaule Belgique, fondant les évêchés de Trèves et Cologne. Toujours est-il que Jésus ne garde pas pour lui, il rend l’enfant à sa mère. C’est bien un service, et dans un service celui qui est servi reçoit plus que celui qui sert. Il y a une sorte de dépouillement dans le service … Vous me direz que Jésus ne reste pas sans rien : il gagne en notoriété, mais on sait bien la valeur de cette admiration de la foule qui s’effacera à la première difficulté. La compassion du Christ donne et se donne, quand elle pardonne les offenses, quand elle nourrit l’affamé, quand elle prie pour les vivants et pour les morts.

 

Oui, au delà du miracle, l’épisode de la veuve de Naïm nous invite à choisir la compassion du Christ, plutôt que celle de la foule. Il nous invite à une miséricorde qui refuse la fatalité, qui annonce l’évangile et qui donne généreusement.

 

Que la Vierge Marie nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Tour de David, qu’elle nous donne la force de résister au découragement ou à l’inaction pour que nous triomphions de la résignation. Reine des cieux, qu’elle nous soutienne dans l’annonce de l’évangile pour que nous rappelions la volonté de Dieu et la rendions crédible par notre engagement. Mère du bel amour, qu’elle nous entraîne dans le don généreux qui se met au service de nos frères pour que tous puissent resplendir de la Gloire qui nous est promise, dès maintenant et pour les siècles des siècles. 

Lire la suite